L’Auto, 16 mars 1925 : une « honnête sortie » des Bleus contre les Brésiliens (2-7)

Publié le 1er mai 2019 - Bruno Colombari

C’est le tout premier match de l’équipe de France contre un adversaire brésilien. Heureusement pour le palmarès, il n’était pas officiel, car le CA Paulistano d’Arthur Friedenreich a taillé des croupières aux Bleus.

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Officiellement, il a fallu attendre juin 1958 et la demi-finale mondiale de Solna pour assister au premier France-Brésil de l’histoire. Officieusement, il y a des précédents. L’équipe de France avait en effet joué contre le club de Santos fin juillet 1930 (1-6) et, le 1er août de la même année à Rio, un amical contre le Brésil. La confédération brésilienne le compte comme officiel, mais pas la FFF. Dommage, car la courte défaite des Bleus (2-3 après avoir mené 2-0 sur un doublé d’Edmond Delfour) contre les Brésiliens d’Arthur Friedenreich était plutôt flatteuse.

Mais quelques années avant ces deux matchs intégrés dans la tournée sud-américaine de la Coupe du monde en Uruguay, l’équipe de France avait déjà rencontré le Brésil. C’était le 15 mars 1925 au stade de Buffalo contre l’équipe du Club Athlético Paulistano, dont le joueur le plus connu était, déjà, Arthur Friedenreich. Il y avait, précise Pierre Cazal, quatre autres internationaux : Mario Seixas, Abraham Patusca dit Araken (prêté par le Santos FC), Joao Neto dit Preguinho et Anfiloquio Guarisi dit Filo, qui fut international pour l’Italie !

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
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L’article

Pour une fois que l’équipe de France fait la Une de l’Auto (et sur deux colonnes de gauche, s’il vous plait), c’est pour une déculottée (2-7) acquise lors d’un match non-officiel. Le titre est lui-même assez baroque, compte tenu qu’une défaite à domicile par cinq buts d’écart ressemble assez peu à une honnête sortie. Mais « ne nous désolons pas », affirme Gauthier-Chaumet, qui accable plutôt les sélectionneurs d’avoir retenu comme arrière droit le malheureux Manzanarès, complètement dépassé par la vista brésilienne. Le journaliste se garde bien de critiquer Manzanarès : « On l’a choisi, il est venu et il a joué de son mieux. L’attitude du public à son égard ne fut d’ailleurs pas faite pour faciliter sa tâche. Quand donc sera-t-on sportif en France ? »

L’article pointe les joueurs qui ont leur place en sélection et ceux qui ne l’ont pas : cet amical avait pour but de préparer un déplacement en Italie qui tournera, lui aussi, à la débandade (0-7) .

La description du match est confiée à Lucien Gamblin. Ce dernier est chargé d’analyser le jeu brésilien, dont il loue la qualité du contrôle, l’homogénéité de l’équipe au service « d’une seule grande étoile, Friedenreich, et quatre joueurs de tout premier plan : les deux arrières et les deux intérieurs ». Il décrit ensuite minutieusement le match : « Les Brésiliens inquiètent fort notre camp, le trio du centre attire nos arrières et barre ses ailiers, c’est une tactique différente de celle pratiquée jusqu’ici et cela aboutira à un nouveau but. »

L’auteur

Avant d’être journaliste, Lucien Gamblin était un footballeur, et pas n’importe lequel : il est l’un des rares internationaux d’avant-guerre (il débute en 1911) à poursuivre en sélection après l’armistice, pour cumuler 17 capes en 1923. C’est l’un des meilleurs défenseurs français à une époque où ceux-ci sont bien rares. Il remporte trois Coupes de France consécutives avec le Red Star entre 1921 et 1923. Puis, sa carrière terminée, il devient journaliste sportif à l’Auto et, après la deuxième guerre mondiale, à France Football.

Le contexte sportif

Neuf mois après le triomphe de l’Uruguay aux JO de Paris, les équipes sud-américaines organisent une tournée en Europe. Il y a les Argentins de Boca Juniors, les Uruguayens du Nacional Montevideo et les Brésiliens du Club Athletico Paulistano. Ces rencontres seront abusivement présentées, parfois, comme des matchs contre le Brésil, l’Uruguay ou l’Argentine, même s’ils n’ont aucune valeur officielle. Quatre jours après le CA Paulistano, l’équipe de France rencontrera le Nacional Montevideo, avec un résultat plus flatteur (0-0).

Le contexte historique

Alors qu’en Chine Sun Yat-sen meurt, le parti nazi (NSDAP) est à nouveau autorisé en Allemagne. Hitler le dirige. Le ministre des affaires étrangères de la république de Weimar, Gustav Stresemann, propose aux Alliés un mémorandum pour garantir la paix entre la France, l’Italie, le Royaume-Uni et l’Allemagne.

Le journal

L’Auto est née en octobre 1900 par la volonté d’Henri Desgrange. Il organise le Tour de France cycliste trois ans plus tard, créant l’événement sportif qu’il couvre pour son plus grand bénéfice. S’il privilégie, en une, le cyclisme le sport automobile et l’aviation, reléguant les sports collectifs en pages intérieures, il lui arrive de mettre en avant ces derniers. En mars 1925, le Italie-France de Turin est ainsi annoncé en une le 21 (veille du match) puis le 23 et encore une fois le 24 (avec des photos).

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Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
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