Le bâton de Nasazzi fuit les Bleus depuis 2001

Publié le 4 septembre 2019 - Bruno Colombari

C’est un trophée autant virtuel qu’alternatif. Le bâton de Nasazzi, créé dès 1930 après la première Coupe du monde, est détenu par le vainqueur du vainqueur du vainqueur du premier champion du monde, à savoir l’Uruguay. Dont le capitaine était José Nasazzi.

3 minutes de lecture

A l’été 2018, l’équipe de France s’est retrouvée pendant quelques semaines quadruplement titrée après la finale gagnée contre la Croatie : championne du monde, numéro un au classement FIFA, détentrice du bâton de Netto [1] et championne de l’UFWC, le championnat du monde non-officiel.

Depuis, la première place au classement FIFA a été perdue (au profit de la Belgique) et l’UFWC est passé dans les mains des Pays-Bas en novembre 2018, puis dans celles des Allemands en mars 2019, qui détiennent aussi le bâton de Netto. Par contre le titre de champion du monde sortant est toujours français, au moins jusqu’en décembre 2022, et plus si affinités. Ça tombe bien, c’est quand même, et de loin, le titre le plus important du lot.

Il existe par contre un autre titre non officiel, depuis 1930, et celui-là, les Bleus ne l’ont plus depuis 2001. Il s’agit du bâton de Nasazzi. Tout comme l’UFWC, aucun objet ne le matérialise, il est totalement fictif, mais il a du sens : il s’agit de mettre en avant l’équipe qui a battu le premier champion du monde, sur le modèle de ce qui existe en boxe, par exemple. C’est d’ailleurs ce que font les promoteurs de l’UFWC, avec une légère nuance : eux partent du premier match international de l’histoire entre l’Angleterre et l’Ecosse en 1872.

Si le bâton de Nasazzi porte ce nom, c’est parce qu’il fait référence à José Nasazzi, capitaine de l’équipe d’Uruguay championne du monde en juillet 1930. Le point de départ est là : dès cette date, la première équipe à battre l’Uruguay dans les 90 minutes réglementaires (hors prolongations et tirs au but, donc) détient le bâton. Et ainsi de suite.

L’équipe de France l’a détenu sept fois entre février 1977 et avril 2001. Jamais avant, jamais après. Au nombre de jours cumulés (il faut être précis), ça représente 967 jours. Loin derrière le record détenu par le Brésil (11 fois, 3885 jours).

Le bâton arraché aux mains des champions du monde

La première fois, c’est donc contre la RFA de Maier et Beckenbauer, champions du monde en titre, que les Bleus s’approprient le fameux bâton, le 23 février 1977 (1-0). Ils ne conservent 35 jours, le temps de le rendre à la République d’Irlande dès le match suivant, le 30 mars 1977 à Dublin (0-1). Ils le retrouvent le 16 novembre 1977 en battant la Bulgarie (3-1) au Parc, et le cèdent le 2 juin 1978 à l’Italie (1-2) à Mar del Plata, 6 jours et 198 jours plus tard.

Il faut attendre la Coupe du monde suivante pour le retrouver, le 4 juillet 1982 à Madrid suite à la victoire contre l’Irlande du Nord (4-1). Les Bleus le gardent six jours et se le font dérober par la Pologne le 10 juillet à Alicante (2-3).

Ils remettent la main dessus le 16 février 1983 à Guimaraes contre le Portugal (3-0) et le conservent pendant 4 matchs et 203 jours, jusqu’à la défaite de Copenhague contre le Danemark (1-3) le 7 septembre 1983. Mais ils le récupèrent à l’Euro contre la Belgique le 16 juin 1984 à Nantes (5-0) et le tiennent pendant la durée record (pour l’équipe de France) de 320 jours, soit 8 matchs, jusqu’au 2 mai 1985 à Sofia contre la Bulgarie (0-2).


 

1998, 2000 : deux coupes mais pas de bâton

Il faudra attendre sept ans pour revoir le bâton, le 4 septembre 1991 à Bratislava contre la Tchécoslovaquie (2-1), mais il est à nouveau perdu 168 jours et 3 matchs plus tard Wembley face à l’Angleterre le 19 février 1992 (0-2). Les titres de champions du monde et d’Europe se feront sans : la toute dernière fois que les Bleus ont pris la succession de José Nasazzi, c’était le 25 avril 2001 contre le Portugal (4-0). Mais il a été égaré très vite sur le gazon de Taegu, où les Australiens l’ont ramassé le 1er juin 2001 (0-1).

C’est d’ailleurs ce qui fait le charme de ce trophée invisible : n’importe quelle équipe peut l’obtenir. 57 sélections l’ont fait (contre seulement 8 à avoir gagné la Coupe du monde), y compris la Finlande, le Zimbabwé, le Panama, Trinité et Tobago, les Antilles néerlandaises ou le Venezuela.

Deux occasions manquées en 2012 et en 2015

Depuis 2001 donc, jamais les Bleus n’ont récupéré le bâton. Il faut dire que les occasions ont été très rares, puisque pour le reprendre, encore faut-il rencontrer le détenteur. Après 2001, il a fallu attendre octobre 2012 et le match contre l’Espagne à Madrid pour avoir une première occasion (1-1). Ratée. Il y aura eu deuxième chance en mars 2015 avec la venue du Brésil à Saint-Denis, mais les Bleus s’inclinent à domicile (1-3) pour la première fois depuis 23 ans contre les Auriverde.

Le détenteur actuel est l’Espagne, depuis sa victoire contre la Suède en juin 2019. Comme les Bleus connaissent leurs adversaires jusqu’en novembre, ils ne pourront pas le récupérer avant 2020. Soit lors des matchs amicaux d’avant l’Euro, s’ils rencontrent l’Espagne ou l’équipe qui l’a battue d’ici-là, soit lors de l’Euro.

Un documentaire vidéo raconte de façon très vivante l’histoire du bâton de Nasazzi :


 

Un site web lui est consacré, mais il n’est plus à jour.

Mieux vaut consulter la page Wikipédia consacrée au sujet.

[1Lire l’article La France du capitaine Netto

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