1983, une année dans le siècle

Publié le 5 octobre 2013 - Bruno Colombari

Répétition générale de l’Euro, 1983 est l’année des débuts de Joël Bats et de la fin de Marius Trésor. Les Bleus croisent aussi la route de Michael Laudrup qui leur fera des misères quinze ans plus tard.

5 minutes de lecture

Le contexte historique

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La guerre froide se réchauffe brusquement après qu’un Mig soviétique ait abattu un 747 sud-coréen avec 269 passagers à bord, dont 61 Américains au-dessus des îles Sakhaline. Klaus Barbie, arrêté en janvier en Bolivie, est extradé en France à Lyon où il sera jugé pour crimes contre l’humanité. Les Marines débarques à la Grenade le 25 octobre, officiellement pour réprimer officiellement une rébellion marxiste. A Beyrouth, un double attentat suicide le 23 octobre entraîne la mort de 58 soldats français et 211 américains. La France bombardera une caserne à Baalbek en représailles. Cette année-là, Yannick Noah remporte Roland-Garros et Laurent Fignon gagne le Tour de France. Louis de Funès, Hergé et Tennessee Williams disparaissent.

Le contexte sportif

Cette année-là, le règne sans partage des clubs anglais se fissure enfin. La Juventus de Platini et Boniek semble taillée pour gagner la Coupe d’Europe, mais elle tombe sur un os, en l’occurrence Hambourg, en une revanche de la finale Italie-RFA de 1982. A la fin de l’année, c’est toutefois Michel Platini qui obtient son premier Ballon d’Or. En France, le FC Nantes de Coco Suaudeau fait des merveilles, même s’il manque d’un rien le doublé contre le PSG au terme d’une finale de coupe de France somptueuse. Les Verts descendent en D2, alors que les Girondins de Bordeaux d’Aimé Jacquet montent en puissance.

Le sélectionneur en poste

Michel Hidalgo entame sa huitième et dernière année. S’il avait été fortement contesté en 1981, jusqu’à la qualification pour le Mundial espagnol, les brillants résultats obtenus en 1982 et la perspective d’une année sans compétition lui laissent du temps pour préparer l’Euro. Et comme il a prévu de quitter la sélection à l’issue de celui-ci, il a carte blanche pour multiplier les essais. Avec l’arrivée de Joël Bats et la confirmation de Luis Fernandez, il a consolidé sa défense, même si l’attaque, avec Six et Lacombe en bout de course, peine à convaincre.

Le récit de l’année

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C’est à Coimbra que les Bleus commencent leur année le 16 février contre une équipe portugaise qui n’est pas encore la formation diabolique de l’Euro. Avec un milieu Fernandez-Giresse-Platini, soit les trois quarts du carré magique version 84-86, l’équipe de France réussi dix premières minutes parfaites : Platini sert Stopyra en profondeur (7e), puis offre une balle de but à Ferreri (8e). 2-0, le match est déjà terminé. Il y aura bien un troisième but, encore sur une passe décisive de Platini convertie par Stopyra (70e), qui pourrait être anecdotique si elle ne s’était pas produite à un moment particulier : Ferreri est sorti à la 63e, remplacé par Jean Tigana. Fernandez laissera sa place à Tusseau à la 75e. Pendant douze minutes donc, le futur carré magique a évolué sur la pelouse de Coimbra.

Un mois plus tard, c’est la belle équipe soviétique qui débarque à Paris. Comme le Portugal, l’URSS n’est pas encore l’épouvantail de la période 1986-1990, mais elle est très difficile à jouer. C’est d’ailleurs Tcherenkov qui ouvre le score face à un milieu Fernandez-Giresse-Platini-Ferreri. C’est Luis qui égalisera d’un très beau but plein axe suite à une remise de Platini (42e). Mais le meneur des Bleus est remplacé à la mi-temps par Tigana et l’attaque Stopyra-Amisse ne fait pas des étincelles (1-1).

Ça sera beaucoup plus facile le 23 avril au Parc contre une Yougoslavie bis. Michel Hidalgo, privé de Platini et de Giresse, en profite pour lancer Yvon Le Roux en défense centrale et José Touré en milieu offensif. Bonne pioche, car les Bleus prennent très vite l’avantage sur deux buts amenés par Bruno Bellone et transformés par Le Roux (22e) et Rocheteau (32e). Juste après la pause, le match est plié définitivement sur un coup-franc de Rocheteau (47e) et c’est Touré qui va signer ses débuts par un ultime but (74e) sur un corner de Ferreri (4-0).

Le 31 mai, l’équipe de France joue un match anecdotique contre la Belgique sur terrain neutre, à Luxembourg. Il y a tant de forfaits chez les Bleus que c’est une équipe improbable qu’aligne Michel Hidalgo avec Thouvenel, Lemoult, Soler ou Zénier. Après deux buts en deux minutes (Six, 11e et Voordeckers, 12e), il ne se passe plus grand chose et tout le monde peut passer à autre chose (1-1).

Autre chose, c’est un match piège à Copenhague en septembre où les Bleus sont pris à la gorge par une équipe en pleine ascension et qui confirmera ses progrès neuf mois plus tard à l’Euro. Michel Hidalgo teste l’Auxerrois Joël Bats dans les cages, lequel va passer une bien mauvaise soirée, battu trois fois par Kenneth Brylle (59e) et le jeune Michael Laudrup (20e, 75e) qui va faire tourner Yvon Le Roux en bourrique. C’est d’ailleurs le même qui marquera contre Barthez quinze ans plus tard lors de la coupe du monde. Platini a égalisé (26e) mais le milieu qu’il a composé avec Fernandez, Giresse et Genghini n’a pas fonctionné (1-3).

Le 5 octobre au Parc, Marius Trésor fait son retour face à l’Espagne. Zanon fait ses débuts au poste d’arrière gauche et Lemoult est aligné au milieu avec le trio Fernandez-Ferreri-Platini. Les Espagnols sont revanchards après un Mundial calamiteux et mieux vaut ne pas laisser traîner les pieds. Rocheteau marque encore (60e) et une faute de Bats sur Senor permet à la Roja d’égaliser en fin de match (1-1).

L’année se termine à Zagreb par un quatrième match consécutif sans victoire face à la Yougoslavie (0-0). Ce n’est pas la même équipe qu’en avril, renforcée par les frères Vujovic, Katanec et Safet Susic. Les Bleus privés de Platini et renforcés par Tigana ne peuvent offrir une victoire pour la dernière sélection de Marius Trésor, qui ne disputera donc pas l’Euro.

On remarquera que 1983, curieusement, aura été une répétition générale de l’Euro 84 puisque les Bleus auront joué contre tous leurs futurs adversaires (plus l’URSS), avec un bilan très mitigé (deux victoires, quatre nuls et une défaite). Ils feront beaucoup, beaucoup mieux six mois plus tard.

La révélation de l’année

José Touré a vingt-deux ans quand Michel Hidalgo le convoque en avril contre la Yougoslavie. Il fait une belle saison avec Nantes et s’illustrera en finale de la coupe de France contre le PSG avec un but brésilien. Celui qu’il réussit avec les Bleus n’est pas mal non plus : corner de Ferreri, amorti de la poitrine à l’entrée de la surface suivi d’une volée du droit sous la barre. On se dit alors que celui-là, dont la puissance et la technique se retrouveront plus tard chez Thierry Henry, est promis à un bel avenir en sélection. On se trompe. Touré ne sera rappelé qu’une fois en 1983 contre la Belgique, reviendra début 1984 puis se blessera, manquera l’Euro, reviendra ensuite, se blessera encore au printemps 1986 et manquera le Mundial mexicain. Il terminera sa carrière internationale dans l’anonymat en 1989 après 16 matches et 4 buts, laissant dans son sillage d’immenses regrets.

Les joueurs de l’année

Avec 31 joueurs appelés en sept rencontres, Michel Hidalgo a fait beaucoup tourner son effectif, multipliant les essais, notamment au milieu avec pas moins de treize candidats pour quatre postes. L’année voit le retour au 4-4-2 qui va déboucher sur le deuxième carré magique en 1984. Si Luis Fernandez est le seul joueur à avoir disputé toutes les rencontres, il a été épaulé par Jean-Marc Ferreri (5 matches dont 4 titularisations) Alain Giresse, Michel Platini (4 titularisations), Bernard Genghini et Jean Tigana (4 matches dont deux titularisations). En défense, Amoros (6 matches), Le Roux et Bossis (5) et Battiston (4) sont les plus souvent appelés. Devant, c’est Rocheteau qui a le plus joué (6 fois dont 4 titularisations) alors que Lacombe a disparu et Six n’a fait que deux apparitions. Yannick Stopyra a joué 4 fois (dont deux comme remplaçant).

Yvon Le Roux, José Touré, Jean-Claude Lemoult, Jean-Christophe Thouvenel, Philippe Vercruysse, Joël Bats, William Ayache et Jean-Louis Zanon ont été lancés par Michel Hidalgo. Alain Couriol, Marius Trésor, Jean-Pierre Tempet, Gérard Soler et Loïc Amisse ont terminé leur carrière internationale.

Les buteurs de l’année

Après le festival offensif du début d’année (trois buts au Portugal, quatre contre la Yougoslavie), l’attaque des Bleus va se tarir (trois buts en quatre rencontres). C’est Rocheteau qui a marqué le plus en 1983 avec trois buts contre deux à Stopyra. Touré, Le Roux, Fernandez, Ferreri et Platini en ont marqué un chacun. Michel se réserve pour son invraisemblable année 1984.

Carnet bleu

Naissance de Franck Ribéry (7 avril), Julien Faubert (1er août), Jérémy Mathieu (29 octobre) et Christophe Jallet (31 octobre).

Décès d’Emile Zermani (10 mai), Georges Ouvray (25 juillet), Angel Rambert (25 octobre), Emile Veinante (18 novembre) et Gabriel Braun (25 novembre).

Mots-clés

Entre 1904 et 1919, 128 internationaux ont porté au moins une fois le maillot de l’équipe de France. Si leur carrière internationale est la plupart du temps anecdotique, leur vie est souvent romanesque.

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