Un troisième match décisif, accessoire et parfois inutile

Publié le 25 juillet 2019 - Bruno Colombari

Comment ça, vous avez déjà oublié le grand France-Danemark du 26 juin 2018 à Moscou ? C’est l’occasion non pas de revoir le match, mais de faire un rappel historique des 12 dernières rencontres d’un premier tour de Coupe du monde.

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Le format actuel de premier tour avec des groupes de quatre équipes (et donc trois matchs à disputer) a été utilisé une fois en 1930 puis repris à partir de 1958. En 1934 et 1938, la compétition débutait directement par les huitièmes de finale, et en 1950 et 1954 le premier tour se jouait sur deux rencontres.

L’équipe de France a participé à 12 phases de poule à trois matchs. Si le dernier des trois n’a servi à rien à deux reprises (l’élimination étant acquise) et a été accessoire trois fois (déjà qualifié), il a été sept fois décisif. Et là, c’est un peu du pile ou face : quatre fois qualificatif pour trois fois éliminatoire. Voilà pourquoi il est prudent de ne pas en arriver là.

Déjà qualifiés : 1998, 2014, 2018

La configuration 2018 - des Bleus qui ont assuré leur qualification après le second match et qui jouent le dernier pour assurer la première place - est relativement rare. Ce n’est arrivé que trois fois jusqu’à présent. La première, le 24 juin 1998 contre le Danemark à Lyon, va permettre à Aimé Jacquet de faire tourner son équipe en intégrant Lebœuf, Vieira, Candela et Karembeu. Malgré une égalisation danoise sur une erreur défensive entraînant un pénalty, les Bleus l’emportent 2-1. C’est à ce jour la seule fois qu’ils ont gagné leurs trois matchs du premier tour.

Même configuration en 2014, mais l’issue est différente : dans un Maracana plein et pour un match sans enjeu contre l’Equateur, les Bleus déjà qualifiés se contentent d’un 0-0 qui leur assurela première place du groupe. Après avoir scoré huit fois en deux rencontres, ils ne marqueront plus que deux buts dans les trois matchs suivants.

Et en 2018, on ne change pas une formule qui gagne (ou plutôt qui fait match nul) : dans la foulée du 0-0 contre la Suisse à l’Euro 2016 après deux victoires initiales, l’équipe de France en mode gestion de l’effectif regarde passer le temps contre des Danois pas plus motivés que ça par une victoire, puisqu’un partage des points les qualifie. Et c’est donc un nouveau 0-0 particulièrement indigeste (rien à se mettre sous la dent) disputé comme en 2014 dans le plus grand stade du pays, en l’occurence le Loujniki de Moscou.

Déjà éliminés : 1930, 1978

En 1930, l’équipe de France joue dans un groupe 100% américain composé du Mexique, de l’Argentine et du Chili. Le vainqueur est directement qualifié pour les demi-finales. Après sa victoire initiale contre le Mexique, l’équipe de France est battue par l’Argentine, tête de série. Le troisième match contre le Chili est sans enjeu. Il n’y avait que 16 joueurs dans le groupe, et cette dernière sortie est l’occasion de faire entrer les remplaçants, hormis le gardien remplaçant André Tassin et le défenseur Numa Andoire. Nouvelle défaite (0-1) et fin de l’aventure.

En 1978, les deux défaites contre l’Italie et l’Argentine (1-2) ont sorti du tournoi les autoproclamés champions du monde des matchs amicaux. Contre la Hongrie à Mar del Plata, Michel Hidalgo donne du temps de jeu à Dropsy, Bracci, Petit et Papi, les seuls à n’avoir pas participé aux deux premiers matchs. Victoire pour l’honneur (3-1) avec le fameux maillot rayé vert et blanc de Kimberly.

Un troisième acte décisif et victorieux : 1958, 1982, 1986 et 2006

En juin 1958, le troisième match est décisif. Le score prolifique contre le Paraguay (7-3) n’a pas suffi aux Bleus pour assurer la qualification dès la deuxième rencontre (défaite 2-3 face à la Yougoslavie). La défense est remaniée avec l’entrée du gardien Claude Abbes à la place de François Remetter, le vétéran Roger Marche est remplacé en défense par Armand Penverne tandis que Jean-Jacques Marcel monte d’un cran. Kopa et Fontaine donnent deux buts d’avance aux Bleus (2-1) qui se qualifient pour les quarts de finale.

En 1982 à Valladolid, un nul suffit aux Bleus contre la Tchécoslovaquie pour passer le premier tour, après une défaite face aux Anglais (1-3) et une victoire contre le Koweït (4-1). Six ouvre le score après l’heure de jeu te il serait prudent d’assurer le coup avec un deuxième but. Il ne viendra pas. Au contraire : une faute de Bossis dans la surface offre un pénalty à Panenka (le vrai) et à la dernière minute, c’est Amoros qui sauve la baraque de la tête sur la ligne (1-1).

En 1986, rebelote. Le troisième match ne doit pas être perdu face à la Hongrie, et il ne l’est pas. Henri Michel garde son équipe-type, ce qui aura des conséquences pour la suite compte tenu de l’altitude, de la chaleur et de la moyenne d’âge élevée du groupe. La rentrée de Rocheteau à l’heure de jeu à la place d’un Papin dépassé permet aux Bleus de l’emporter largement (3-0), mais le nul face à l’URSS les place dans un tableau infernal : Italie, Brésil et RFA.

En 2006, la tournée d’adieu de Zidane passe par une victoire face au Togo, après deux nuls inquiétants contre la Suisse (0-0) et la Corée du Sud (1-1). Eric Abidal et Zizou sont suspendus, Mikaël Silvestre et et David Trezeguet les remplacent et c’est Vieira qui débloque la situation en deuxième période en marquant et en servant Henry six minutes après (2-0).

Un troisième acte décisif et perdu : 1966, 2002 et 2010

Le 20 juillet 1966, à Londres, c’est une sorte de mission impossible qui attend l’équipe de France à Wembley. Après des débuts ratés contre le Mexique (1-1) et une défaite face à l’Uruguay, il faut battre l’Angleterre chez elle. Les Bleus s’inclinent (0-2) après avoir livré leur meilleur match du tournoi et imposé au sélectionneur Henri Guérin un changement de tactique : fini le béton, place à la défense de zone. Un peu tard quand même.

Danois et Français se retrouvent le 11 juin 2002 à Incheon, mais ce n’est plus la même histoire : Zidane revient sur une jambe alors que Henry est suspendu, Lebœuf forfait et Petit absents, ces deux derniers remplacés par Candela et Makelele. Surtout les Bleus doivent l’emporter 2-0 pour effacer deux prestations complètement ratées contre le Sénégal (0-1) et l’Uruguay (0-0). Celle-là le sera encore plus, avec encore des tirs sur les poteaux (Desailly et Trezeguet) et deux buts danois sur des erreurs défensives.

A un moment donné, on s’est demandé si l’équipe de France allait jouer son dernier match du premier tour contre l’Afrique du Sud à Bloemfontein le 22 juin 2010, après l’affaire Anelka et la grève des joueurs à Knysna. Finalement, Raymond Domenech bâtit une équipe de bric et de broc avec Squillaci, Clichy, Gignac et Cissé, Alou Diarra récupérant le brassard. Les Bleus s’inclinent piteusement (1-2) et finissent à dix après l’expulsion de Gourcuff.

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