En phase finale, des terrains pas toujours neutres

Publié le 2 décembre 2019 - Bruno Colombari - 2

A l’Euro 2020, les Bleus joueront à l’extérieur, c’est-à-dire chez l’adversaire, au moins une fois contre l’Allemagne à Munich, et peut-être une deuxième, contre la Hongrie à Budapest. Voire une troisième contre l’Angleterre en finale à Londres. Quelle incidence ont eu les huit précédents ?

4 minutes de lecture

En phase finale, il y a trois types de terrain. Le plus fréquent, c’est le terrain neutre, où chaque équipe est à égalité en terme d’environnement. Viennent ensuite les matchs à domicile pour le pays organisateur. Et enfin, à l’opposé, les matchs que l’on peut considérer comme joués à l’extérieur puisque dans le pays de l’adversaire.

Ce dernier cas, le plus rare, n’est arrivé que huit fois dans le passé pour l’équipe de France. Un total relativement faible compte tenu des 122 matchs joués par les Bleus en phase finale de Coupe du monde 15 participations), d’Euro (9), de Coupe des Confédérations (2) ou de Jeux olympiques (4). Et qui augmentera d’une à trois unités en 2020 si, en plus de l’Allemagne, la France croise la Hongrie au premier tour et l’Angleterre à partir des demi-finales.

20 juillet 1966 à Londres : Angleterre-France, 2-0

Après un piteux match nul contre le Mexique (1-1) et une défaite face à l’Uruguay (1-2), l’équipe de France doit battre l’Angleterre 2-0 pour se qualifier pour les quarts de finale. Autant traverser la Manche à la nage. Les Français, qui ont imposé eux-mêmes la tactique au sélectionneur Louis Dugauguez, font bien mieux que se défendre, prennent les Anglais au piège du hors-jeu mais subissent de nombreuses fautes et s’inclinent sur deux buts de Hunt (38e et 75e). Avec des regrets.


 

6 juin 1978 à Buenos Aires : Argentine-France, 2-1

Même tarif douze ans plus tard dans un stade Monumental en fusion : battus d’entrée par l’Italie quatre jours plus tôt, les Bleus ne doivent surtout pas perdre contre l’Argentine. Ils produisent un match de très haut niveau, dominent même leurs adversaires, encaissent un pénalty juste avant la mi-temps, égalisent et manquent une balle de break par Six. Puis le gardien Bertrand-Demanes se blesse, est remplacé par Baratelli qui est battu sur une volée de Luque. Des regrets, toujours.


 

10 juin 1992 à Stockholm : Suède-France, 1-1

Les Bleus sont invaincus en compétition depuis trois ans quand ils affrontent la Suède en match d’ouverture. Mais ils sont essorés par une préparation physique beaucoup trop lourde, et Michel Platini a déjà la tête ailleurs. Livrés à eux-mêmes, les Français font ce qu’ils peuvent, c’est-à-dire pas grand chose. Ce nul (Papin ayant répondu à Eriksson) n’est pas une mauvaise opération en soi, mais il pointe déjà les limites d’une équipe médiocre. Elle sera éliminée une semaine plus tard, après un autre nul contre l’Angleterre et une défaite face au Danemark.


 

21 juin 2000 à Amsterdam : Pays-Bas-France, 3-2

Tout va pour le mieux pour les Bleus à l’Euro, après deux victoires brillantes contre le Danemark (3-0) et la République tchèque (2-1). Ils sont déjà qualifiés avant de jouer les Pays-Bas, et n’ont besoin que d’un nul pour finir premiers. Mais ils préfèrent la deuxième place pour rester à Bruges : Roger Lemerre fait jouer les remplaçants, qui font mieux que de la figuration et mènent deux fois au score avant de s’incliner.


 

30 mai 2001 à Taegu : Corée du Sud-France 0-5

Pour la première opposition entre les deux équipes, les Coréens coulent à pic face à une équipe de France bis où Carrière, Dacourt et Marlet font leurs débuts. Il y a déjà 3-0 à la 35e, et encore Dugarry a manqué un pénalty. Les Bleus, en repérage pour la Coupe du monde 2002, déroulent tranquillement et infligent à leurs hôtes le même tarif qu’au Japon un an plus tôt. Youri Djorkaeff ne le sait pas encore, mais il marque là son dernier but (le 28e) en sélection.


 

10 juin 2001 à Yokohama : Japon-France 0-1

Onze jours et quatre matchs plus tard, les Bleus testent la pelouse de la finale contre le Japon après avoir sorti le Brésil C en demi-finale. Une fois le score ouvert par Vieira à la 28e, il ne se passe plus grand chose, malgré la présence de 7 champions du monde et de 3 champions d’Europe. Vainqueurs de leur troisième trophée en trois ans, les Français sont plus que jamais les favoris pour 2002. On connaît la suite.


 

22 juin 2010 à Bloemfontein : Afrique du Sud-France 2-1

Jusqu’à la Coupe du monde sud-africaine, les Bleus n’avaient jamais perdu contre la Chine. C’est fait le 4 juin en amical. Ils n’avaient jamais perdu contre le Mexique. Fait le 17 juin à Polokwane. Et jamais perdu contre l’Afrique du Sud. Fait le 22 juin, deux jours après la célèbre grève du bus de Knysna. Au sein d’une équipe en déroute complète qui encaisse deux buts en première mi-temps et perd Gourcuff, expulsé, Thierry Henry joue son dernier match en bleu avec le brassard de capitaine. Et il le perd.


 

19 juin 2012 à Donetsk : Ukraine-France 0-2

Après une entame poussive contre l’Angleterre (1-1), les Bleus se resaisissent, réveillés par un orage dantesque qui retarde le début du match de plusieurs dizaines de minutes. Le milieu Diarra-Cabaye-Nasri prend le meilleur et en trois minutes, le break est fait avec Ménez et Cabaye (53e et 56e). La qualification quasi assurée, les Français se feront bouger par la Suède d’Ibrahimovic (0-2) avant d’être éliminés sans combattre par une Espagne beaucoup trop forte pour eux (0-2 encore).


 

30 fois à domicile, 23 victoires !

Si elle a donc assez peu joué contre le pays organisateur en phase finale, à l’inverse l’équipe de France a souvent évolué à domicile : 30 fois sur 122, soit près de 25% des matchs ! Elle a accueilli pas moins de sept compétitions depuis 1904 : les JO de Paris en 1924, les Coupes du monde 1938 et 1998, les championnats d’Europe 1960, 1984 et 2016 et la Coupe des Confédérations 2003.

Et là, les résultats sont brillants : 23 victoires pour seulement 5 défaites et 2 nuls. Les équipes ayant battu la France à domicile en phase finale se comptent sur les doigts d’une main : l’Uruguay en 1924 (5-1), l’Italie en 1938 (3-1), la Yougoslavie et la Tchécoslovaquie en 1960 (5-4 et 2-0) et enfin le Portugal en 2016 (1-0). L’Italie (0-0 en 1998) et la Suisse (0-0 en 2016) ont pour leur part fait jeu égal.

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Autrement dit, il y a bien un avantage déterminant dans le fait de jouer une phase finale à domicile, comme le montre le graphe suivant. Alors que sur terrain neutre, les Bleus l’emportent dans 46% des cas et perdent 31% de leurs matchs, en France ils en gagnent 77% et en perdent 17%. Une évidence, dites-vous ? Si l’on veut : depuis 1980, il y a eu 10 Euros, 10 Coupes du monde et 10 Coupes des Confédérations. Si troissélections ont remporté cette dernière à domicile (Mexique 1999, France 2003 et Brésil 2013), une seule a gagné une Coupe du monde à la maison : la France. Et une seule a gagné un Euro à domicile : la France encore.

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Vos commentaires

  • Le 4 janvier 2020 à 22:26, par Coeur Bleu En réponse à : En phase finale, des terrains pas toujours neutres

    Bonjour,

    Dans le tableau général des matches, vous aviez considéré que ces huit matches sont sur terrain neutre. Mais je suis d’accord avec vous sur le fait que cela change la donne.

    Il est intéressant de noter que, lors des matches à élimination directe, à part la finale de Coupe des Confédérations contre le Japon (Coupe qui ne compte que 1N et 1E), l’équipe de France n’a jamais rencontré à « l’extérieur » un pays organisateur en 22 matches de Coupe du Monde et 7 d’Euro.
    La série s’arrêtera-t-elle avec 12 organisateurs ? Suivant les résultats des barrages, la Roumanie pourrait être un candidat en 8èmes. L’Italie en quart, mais il faudrait déjà qu’ils ne soient que 3èmes de leur poule, voire l’Angleterre dès les demies comme vous le mentionnez.

  • Le 5 janvier 2020 à 08:38, par Bruno Colombari En réponse à : En phase finale, des terrains pas toujours neutres

    Bien vu, c’est une remarque intéressante en effet. Et la pression sur un match à élimination directe est bien plus forte qu’en phase de poules. Jouer l’Angleterre à Wembley ne serait pas un cadeau, assurément.

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