Thierry Sestier : « pour le Dico, il faut savoir rester suisse, mais le plus léger possible »

Publié le 25 novembre 2018 - Bruno Colombari

Directeur artistique du Dico des Bleus après avoir conçu les maquettes de Boucherie Ovalie, Dans la Musette ou Ici c’est Paris, le graphiste indépendant Thierry Sestier parle de son métier, entre création et lois du marché.

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Peux-tu décrire ton travail avec les éditeurs ? Quel est le rôle d’un directeur artistique dans le monde de l’édition ?

Mon travail consiste à mettre en image les idées et souhaits des éditeurs. A s’adapter à la cible et au positionnement de l’ouvrage. Je suis assez libre, mais je dois prendre composer avec l’éditorial, le marketing, le service commercial… qui interviennent tous dans la chaîne. Il faut donc concilier l’artistique et les lois du marché. À moi de satisfaire les deux.

La direction artistique n’est pour moi qu’une affaire de choix graphique : couleurs, polices, traitement et choix des images qui donneront un ton à l’ouvrage : moderne, vintage, classique… ou les trois à la fois !
C’est la phase la plus importante et aussi la plus intéressante dans mon travail. J’essaye de me faire plaisir et de répondre aux briefs.

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Crédits : photo Thierry Sestier

Avant d’être directeur artistique du Dico, sur quels livres de sport avais-tu travaillé ?

Avant d’être à mon compte, j’ai longtemps travaillé chez un packager parisien. J’avais déjà abordé le sport, il y a longtemps mais dans ma jeunesse. Une fois en freelance, j’ai été amené à travailler avec Benoît Bontout, éditeur sportif. Il m’a confié des couvertures de biographies, d’essais, de livres illustrés : La fabuleuse histoire des France-Brésil, Ici, c’est Paris, Les Bleus c’est nous, le premier tome de Boucherie Ovalie

Notre collaboration a continué avec Benoît chez Marabout : Dans la musette, le tome 2 de la Boucherie, le livre des 10 ans du CFC, la bio de Martin Fourcade, l’almanach de L’Équipe, le Dico des Bleus… la liste est longue et variée : j’ai pu aborder tous les sports, de la voile au golf, à la moto, en passant par le rugby, le trail…

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Quelles sont les particularités de la maquette d’un livre de sport ?
La place faite aux images ? La couverture ? Le format ? Le type de papier ?

Je ne pense pas qu’il ait de particularités graphiques à un livre de sport. Travaillant pour la jeunesse, le livre pratique, la fiction… le travail reste à mon avis le même. Le vrai fan de sport sera juste plus regardant et exigeant sur le choix iconographique proposé. Choisir de placer, dans un ouvrage, une photo de Séville 1982 en double page n’est pas anodin. On cherche aussi à trouver l’image rare, ou jamais publiée. C’est le cas dans le Dico des Bleus.

Je n’interviens pas dans le choix papier, ou le format. Ça relève souvent de questions budgétaires. On peut parfois me le soumettre, mais ça s’arrête là. Compréhensible. La couverture, c’est l’enjeu par définition. Elle doit raconter, attirer, se démarquer. C’est un travail à part, mais qui doit aussi donner le ton du livre. Pour la réédition du Dico des Bleus, afficher les deux meilleurs 10 de tous les temps était une évidence. Et ramener une touche dorée, un bon clin d’œil à notre deuxième étoile !

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Un dictionnaire est-il plus compliqué à maquetter qu’un livre séquencé en chapitres ?

Je pense. Il faut garder les codes figés du dico, tout en rythmant la mise en page. Savoir rester « suisse », c’est-à-dire méticuleux, propre, soigné, mais le plus léger possible. On n’est pas trop libre de sortir des lignes, mais c’est un défi tout aussi intéressant. C’est un travail hybride, qui je pense n’avait jamais été abordé dans le sport.

Pour le Dico des Bleus en particulier, où il y a plus de 1200 articles et plus de 400 photos et logos à faire entrer dans 24 lettres, comment as-tu fait pour gérer les différents volumes ?

Pour cet ouvrage, nous n’avions pas de chemin de fer. Ça a facilité la tâche. Guillaume Arduré, le graphiste qui a exécuté le bouquin a très bien géré la chose !

Et comme si ce n’était pas assez compliqué comme ça, voilà qu’à la fin du mois d’août tu te retrouves avec 126 articles à mettre à jour et une vingtaine à intégrer, sans parler des photos de la Coupe du monde à ajouter…

Pas simple du coup ! Tout bouger, sans rien bouger ! J’ai transmis ta question à Guillaume, voilà ce qu’il en dit : « Compliqué, oui et non, Cédric m’a signalé que nous pouvions rajouter une trentaine de pages pour intégrer ces nouvelles infos. Il y a eu surtout un travail de remise en page avec la seule contrainte de ne pas refaire l’ensemble de l’ouvrage, garder l’existant en intégrant de nouvelles photos et de nouveaux articles tous en gardant une maquette rythmée et aérée… »

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Comment sont choisies les photos ? Dans le cas du Dico, je suppose qu’il y a des critères historiques, graphiques, un équilibre à trouver entre les époques, la couleur et le noir et blanc, les vignettes et les doubles pages...

Pour le Dico, nous avons assuré nous même la recherche avec Guillaume via la banque d’images de L’Équipe : PresseSport. Le choix d’illustrer les joueurs célèbres s’imposait, mais il fallait aussi trouver un équilibre et mettre en avant les hommes de l’ombre : Grumelon, Chiesa, Despeyroux, Molitor…

Je privilégie toutefois les images argentiques aux numériques. Les images de sport des années 50, 60 ou 70 sont graphiquement et artistiquement plus intéressantes que les images numériques.

Quelles sont les contraintes données par l’éditeur et a contrario quels sont les domaines où tu as carte blanche ?

Benoît Bontout, l’éditeur, a une très grande connaissance graphique et de bonnes idées, il me tire toujours vers le haut, et le résultat est là ! Je prends en compte ses remarques mais je reste libre. J’ai donc souvent carte blanche, ce qui est pour moi, très confortable. Dans le cas du Dico des Bleus, la seule contrainte était de garder l’esprit dico, être informatif, pertinent, élégant, fluide tout en restant créatif.

Pour un auteur, il y a toujours un peu d’appréhension et beaucoup d’excitation au moment de découvrir le livre terminé. C’est pareil pour un graphiste ?

Oui, bien sûr. Puis c’est toujours une petite fierté.

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