Le résultat était-il prévisible ?
Après les bonnes entames des trois derniers matches, avec des buts inscrits dans le premier quart d’heure, on pouvait espérer que les Bleus mettraient la défense roumaine en difficulté. On savait aussi que l’ambiance serait chaude, que le stade tout neuf serait impressionnant. Ce qui n’était pas prévu, c’est l’état catastrophique d’une pelouse partant en lambeaux dès les premières minutes de jeu.
Avec des joueurs français qui avaient besoin de trois touches de balle pour faire un contrôle avant de délivrer une passe à dix kilomètres heure, et des Roumains bien regroupés derrière, le match est vite (si on peut dire) devenu du grand n’importe quoi, un concours d’arrachage de mottes sublimé par les ralentis de M6. Les petits corners joués à deux et terminés par une série de passes en retrait jusqu’au rond central illustre le manque d’ambition et d’esprit d’initiative des Bleus. Au final, le 0-0 résume parfaitement la pire rencontre depuis le sinistre France-Biélorussie d’il y a un an.
L’équipe est-elle en progrès ?
C’est une question qui devient cruelle. Brouillons et maladroits il y a quatre jours à Tirana, les Bleus sont passés à côté de leur match à Bucarest, malgré les cinq changements décidés par le sélectionneur. Sans résultat apparemment, car ce qui saute aux yeux dans cette équipe (même si ça ne date pas d’hier), c’est l’absence d’un leader sur le terrain, capable de bouger ses partenaires, de leur parler, d’impulser une dynamique, de sonner la révolte quand le rythme retombe.
Laurent Blanc avait fait le pari d’un milieu de terrain rajeuni et peu expérimenté (21 sélections cumulées pour le trio Martin-Cabaye-M’Vila avant le coup d’envoi), ça n’a pas marché : l’animation de jeu a été aussi anémique qu’en Albanie, avec Alou Diarra et Samir Nasri. Le sélectionneur a sorti un Malouda inutile à droite au profit d’un Valbuena qui n’est jamais passé. Il a maintenu Ribéry à gauche, et hormis un éclair à la 66e, le Munichois n’a jamais réussi à construire avec Martin et Benzema, lequel s’est adressé à lui à plusieurs reprises, visiblement excédé.
Quels joueurs sortent de ce match renforcés ?
Hugo Lloris a fait un sans faute dans des conditions très difficiles, avec des faux rebonds qui risquaient de le tromper à chaque tir, et des latéraux pas vraiment rassurants. Dommage qu’il ne s’impose pas davantage par la voix pour remettre de l’ordre quand c’est nécessaire.
Eric Abidal s’est montré plus sûr qu’en Albanie, et ses prises de balle plein axe auraient pu être à l’origine de contres intéressants. Adil Rami a fait pour sa part un peu de tout dans ce match, du bon (des gestes techniques limite suicidaires, mais généralement réussis) et du médiocre (une altercation avec Goian, une occasion vendangée en début de deuxième mi-temps, une erreur d’inattention qui aurait pu être fatale dans la surface française), mais il s’en tire au final plutôt bien.
Quels joueurs sortent de ce match affaiblis ?
Après une première mi-temps très vilaine, Patrice Evra s’est un peu repris, sans toutefois convaincre. Le prochain retour de Mexès dans l’axe combiné à l’installation d’Abidal à gauche devrait renvoyer le Mancunien sur le banc. De l’autre côté, Sagna a souffert face à Nicolita et n’a pas apporté grand chose devant, hormis sur l’occasion de Ribéry.
Au milieu, Yann M’Vila a raté son match, tout comme Marvin Martin qui va faire douter tous ceux qui le voyaient un peu vite en haut de l’affiche. Ce qui ne veut pas dire que le Sochalien n’a pas sa place, mais que l’associer à Yohan Cabaye, dont on attend toujours une prestation convaincante en sélection, n’était pas l’idée du siècle.
Déception aussi pour Mathieu Valbuena qui a semblé dépassé du début à la fin, incapable de déséquilibrer les défenseurs roumains ou de placer une frappe dangereuse. Lui aussi avait une occasion à saisir, qu’il a laissé passer.
Enfin, Karim Benzema aura beaucoup râlé (contre Ribéry notamment, contre l’état du terrain aussi sans doute) mais à sa décharge il a été très peu servi.
Quelles sont les attentes pour la prochaine rencontre ?
Le match contre l’Albanie ne sera donc pas décisif (sauf dans l’hypothèse où la Bosnie perdrait à domicile contre le Luxembourg) mais il faudra bien le gagner. Et ensuite, finir par un match couperet contre une Bosnie qui, ayant quasiment assuré sa deuxième place, pourra venir au Stade de France jouer la qualification directe. Autant dire qu’une victoire rapidement acquise contre les coéquipiers de Lorik Cana, un score large et un jeu ambitieux ne seront pas de trop afin d’aborder la finale du groupe dans de bonnes conditions.