Le premier quart d’heure d’un match est très rarement décisif. Il ne représente que le sixième de la durée d’une partie, beaucoup de choses peuvent encore se passer par la suite après un premier but marqué ou encaissé. Mais quand une équipe en plante deux, c’est le KO quasi assuré. On se souvient comment Saint-Etienne avait anéanti le PSV Eindhoven, à l’automne 1979, en menant au score 3-0 après 4 minutes et 44 secondes.
Jamais les Bleus n’ont démarré un match à cette vitesse-là, même s’ils s’en sont approchés à Copenhague contre le Danemark, où Olivier Giroud a réussi le doublé le plus rapide de l’histoire en marquant à la quatrième et à la sixième minute.
Quand les débutants en mettaient trois en dix minutes
En près de 800 matches disputés depuis 1904, l’équipe de France a marqué 195 fois dans le premier quart d’heure, dans 171 matches différents. Mais si l’on regarde les rencontres où elle a inscrit au moins un autre but dans cette période, il n’en reste plus que 23. Sur 22 de ces rencontres, les Bleus ont marqué deux fois, et sur une seule, ils ont inscrit trois buts. C’était le 17 décembre 1953 face au Luxembourg au Parc des Princes pour la qualification à la coupe du monde 1954. Ce jour-là, Jean Desgranges avait ouvert le score à la 2e minute, avant que Jean Vincent ne réussisse un doublé aux 6e et 10e minutes. Les Bleus l’avaient emporté 8-0. A noter que Gaston Barreau avait choisi d’appeler onze débutants pour ce match, l’équipe de France ayant déjà obtenu sa qualification. Parmi ceux-là, il y avait Jean Vincent, auteur d’un doublé et de d’une passe décisive, et Just Fontaine, qui signa un triplé.
Lacombe, Oliver, Cisowski et Vincent avant Giroud
Si personne n’a fait mieux qu’Olivier Giroud, Bernard Lacombe (en 1979 contre les Etats-Unis), Célestin Oliver (face à l’Islande en 1957), Thadée Cisowski (contre la Belgique en 1956) et donc Jean Vincent ont eux aussi réussi un doublé dans le premier quart d’heure. Parmi eux, deux ont récidivé : Lacombe en signant un triplé, et Cisowski en réalisant un quintuplé que seul Eugène Maës avait réussi auparavant.
Si on regarde maintenant les débuts de match les plus prolifiques en buts, le Bulgarie-France de juin 1932 à Sofia a fait encore mieux que le Danemark-France 2015, puisque Joseph Rodriguez avait ouvert le score dès la 1ère minute avant que Jean Sécember n’inscrive à la 6e le premier de ses quatre buts (score final 5-3).
Juste après, on trouve le Portugal-France de février 1983 (2-0 à la 8e minute avec des buts de Stopyra et Ferreri sur deux passes décisives de Platini) et le Féroé-France d’octobre 1987, où Anelka et Henry avaient fait le break aux 7e et 8e minutes. On notera d’ailleurs, et c’est étonnant, que ces quatre rencontres-là se sont toutes disputées à l’extérieur.
Doublé précoce, victoire assurée
Autre fait marquant : marquer deux fois dans le premier quart d’heure assure toujours la victoire finale. Enfin, presque toujours. Lors du tout premier match de l’histoire de l’équipe de France, le 1er mai 1904 au stade du Vivier d’Oie à Bruxelles, les Bleus (qui jouaient en blanc) ont bien marqué deux fois dans le premier quart d’heure, mais c’était après avoir encaissé un but dès la 7e minute. Le match s’était achevé sur un nul (3-3).
Depuis, les 22 matches suivants démarrés pied au plancher ont toujours débouché sur une victoire, même les fois où l’adversaire a marqué lui aussi dans les quinze premières minutes (le Pays de Galles et le Luxembourg en 1953). Et 12 fois, les Bleus ont marqué au final au moins cinq buts.
Dans les années 50, malheur aux retardataires
Enfin, si les débuts de match pied au plancher sont plutôt rares désormais (quatre depuis 25 ans), c’était devenu une spécialité dans les années 50. Mention spéciale en 1953 où Kopa et Piantoni s’en donnaient déjà à cœur joie face au Pays de Galles (6-1) et au Luxembourg (6-1) avant que Fontaine et Vincent, on l’a vu, n’en prennent de la graine toujours contre le Luxembourg (8-0). La Belgique en 1956, l’Islande en 1957 et le Portugal en 1959 complètent le tableau. Mieux valait ne pas arriver en retard au stade à cette époque !
Bonus : les buteurs du premier quart d’heure
Qui a marqué le plus souvent en début de match chez les Bleus ? Sans surprise, on trouve en tête le meilleur buteur français, Thierry Henry, avec 7 réalisations dans le premier quart d’heure (mais, bizarrement, aucun but dans les cinq premières minutes). Si Michel Platini (6), Just Fontaine (5), David Trezeguet, Zinedine Zidane et Jean-Pierre Papin (4) ne sont pas loin, on saluera la présence de Bernard Lacombe, qui n’a marqué que 12 fois en sélection, mais 5 fois dans le premier quart d’heure (dont trois buts dans les dix premières minutes). On se souviendra que c’est lui qui a marqué le but français le plus rapide en coupe du monde contre l’Italie en 1978 (après 31 secondes).
Philippe Gondet a pourtant fait mieux : trois de ses sept buts en sélection ont été inscrits dans les quinze premières minutes, soit 43% du total.
Voici sur le graphique suivant les 17 joueurs à avoir marqué au moins trois buts dans le premier quart d’heure. Le pourcentage est celui du nombre de buts marqués dans ce laps de temps comparé au total de buts marqués par chaque joueur.
Parmi les joueurs en activité, trois pourraient bientôt entrer dans ce classement, puisqu’ils ont déjà marqué deux fois en début de match. Il s’agit d’Olivier Giroud, de Karim Benzema et de Paul Pogba.