Zinédine Zidane devra patienter : la place de sélectionneur ne sera pas vacante l’été prochain, sauf bien sûr en cas de plantage dès le premier tour suite à une accumulation de tuiles (en mode Corée du Sud 2002) ou de dissolution du collectif terminé par un clash en interne (jurisprudence Afrique du Sud 2010). Auquel cas, Il y a fort à parier que la dernière année de mandat de Noël Le Graët serait chahutée, et que le sort de Deschamps pourrait ressembler à celui de Roger Lemerre en 2002 (évincé après avoir été prolongé quelques mois auparavant). On n’en est pas là.
Si les Bleus réussissent leur Coupe du monde en Russie, Didier Deschamps aura donc la perspective d’atteindre les huit ans de mandat de sélectionneur (2012-2020) et de s’approcher des 102 mois de Michel Hidalgo (janvier 1976-juin 1984). Il battra dès l’année 2018 le record de matchs dirigés détenu par Raymond Domenech (79), dès la onzième rencontre des Bleus.
Si l’équipe de France joue cinq matchs amicaux avant la Russie, avec les trois du premier tour ça en fera huit. Le onzième pourrait arriver soit en demi-finale, soit en septembre ou octobre. Compte tenu du nombre de sorties élevées lors des années paires (15 en 2014, 17 en 2016), il devrait atteindre les cent matchs dirigés d’ici 2020. Et s’il qualifie les Bleus pour l’Euro 2020, il participera à sa quatrième phase finale, ce qu’aucun sélectionneur français n’a fait avant lui (Hidalgo et Domenech en ont disputé trois).
Mais l’objectif ultime que le compétiteur-né qu’est Didier Deschamps n’est certainement pas d’exploser les stats de Michel Hidalgo ou Raymond Domenech. En prolongeant jusqu’à l’Euro 2020, il se donne la possibilité de rééditer le doublé Coupe du monde/Euro réalisé vingt ans plus tôt, avec un certain Didier Deschamps préposé au levé de trophées.
Objectif fumeux ? Si on tient compte du niveau de jeu des Bleus en finale de l’Euro 2016 contre un Portugal qui n’avait pas inventé la poudre et qui a joué sans son artilleur numéro un, oui, c’est un objectif fumeux. Si on regarde la qualité technique des dernières sorties de l’équipe de France, c’est également très présomptueux.
On peut aussi se souvenir à quoi ressemblait le jeu des Bleus de Jacquet lors du Tournoi de France 1997 (deux nuls et une défaite) ou de la série de matchs amicaux du début 1998 (3-3 contre la Norvège, 0-1 en Russie, 0-0 en Suède...). Et des prestations baroques des champions du monde dirigés par Roger Lemerre contre Andorre ou face à l’Islande en 1999.
2018, c’est encore loin. Et l’Euro 2020, n’en parlons pas. Beaucoup de choses se passeront d’ici-là. Les cadres de 2014, Paul Pogba, Raphaël Varane et Antoine Griezmann auront l’occasion de franchir le palier qui les sépare encore des Kopa, Piantoni, Giresse, Platini, Henry et Zidane.
Les jeunes pousses d’après l’Euro, Ousmane Dembélé, Kylian Mbappé, Benjamin Mendy, Adrien Rabiot et Thomas Lemar auront engrangé de l’expérience au plus haut niveau européen. Quant à ceux qui n’ont pas éclaté en 2016, comme N’Golo Kanté, Anthony Martial ou Kingsley Coman, ils auront une deuxième chance l’été prochain, si la concurrence ne les éjecte pas du groupe d’ici-là.
La principale inconnue, en réalité, vient du sélectionneur lui-même. A-t-il touché son plafond à Rio en 2014 et à Saint-Denis en 2016, avec un jeu peu en rapport avec le potentiel de ses hommes ? Va-t-il s’orienter vers des options plus conquérantes ? Début de réponse dans huit mois.
