Le résultat était-il prévisible ?
Dans un Euro à peu près aussi sexy qu’un clerc de notaire, on pouvait imaginer qu’un match nul conviendrait aussi bien aux Bleus, qui visaient la première place, qu’aux Suisses, qui cherchaient surtout la qualification. Pas aidée par une pelouse calamiteuse et une barre transversale sur la trajectoire d’une frappe de Pogba et d’une volée de Payet, l’équipe de France a donc obtenu, ou concédé selon comment on voit les choses, un 0-0 qui laisse perplexe sur le niveau réel des hommes de Deschamps. Ce dernier match de poule ressemble trop à celui contre l’Equateur au Maracana, il y a deux ans, pour qu’on s’empêche de se dire que la deuxième quinzaine de l’Euro s’annonce compliquée. Et encore, en 2014 les Bleus sortaient de deux matches emballants contre le Honduras et la Suisse, alors que cette année on attend encore une prestation aboutie.
L’équipe est-elle en progrès ?
Elle a déjà été largement remaniée : au milieu, le trio titulaire contre l’Albanie a laissé la place à Cabaye, Sissoko et Pogba, alors qu’en attaque, Giroud et Martial ont été remplacés par Gignac et Griezmann. Seule la défense n’a pas bougé. Qu’en conclure ? En terme de percussion, c’est mieux, les attaques étant déclenchées beaucoup plus rapidement avec un jeu vertical. En terme de construction, c’est encore largement perfectible, même si le milieu de terrain est incontestablement la satisfaction de la soirée, avec deux remplaçants alignés. De quoi donner des éléments de réflexion à Didier Deschamps pour les huitièmes de finale. Aucune des trois compositions de la phase de poule n’a été pleinement satisfaisante. La solution viendra peut-être d’une synthèse des trois.
Quels sont les joueurs en vue ?
Incontestablement, Moussa Sissoko et Yohan Cabaye ont parfaitement joué leur rôle à Lille, donnant des couleurs et du punch à un milieu de terrain assez décevant depuis le début de l’Euro. Le premier a traversé plusieurs fois la défense suisse au pas de charge dans son style dévastateur, en parvenant en plus à bien finir ses actions. Le second a plutôt bien distribué le jeu en position basse, tout en participant aux tâches défensives avec beaucoup de détermination. De plus, cette organisation sans Matuidi a permis à Paul Pogba de se placer côté gauche où il se sent manifestement plus à l’aise. Le joueur de la Juve a réussi une belle première période, avant de disparaître en début de deuxième mi-temps et de finir fort. Laurent Koscielny a été solide derrière, alors qu’Adil Rami semble reprendre confiance après un début d’Euro inquiétant. Enfin, l’entrée de Dimitri Payet a beaucoup apporté devant et aurait mérité un meilleur sort.
Quels sont les joueurs en retrait ?
Pas flambant, c’est le moins qu’on puisse dire, à Marseille contre l’Albanie, Patrice Evra a été encore en dessous de son niveau à Lille avec un placement très aléatoire et un apport offensif minimaliste. Bacary Sagna a commis une grosse faute dans le temps additionnel qui aurait pu se payer cher. Kingsley Coman a été intermittent, alors qu’André-Pierre Gignac est passé complètement à travers, hormis un bon une-deux avec Griezmann. Olivier Giroud peut dormir tranquille. Antoine Griezmann n’a pas vraiment convaincu, même si sa frappe de la 57e minute aurait pu être décisive.
Quelles sont les attentes pour le prochain match ?
S’ils ne haussent pas leur niveau de jeu, et si notamment ils ne poussent pas plus franchement dans le premier quart d’heure, les Bleus vont souffrir dimanche prochain en huitième de finale, quel que soit leur adversaire : dans un match à élimination directe, il serait extrêmement périlleux d’entrer dans les dix dernières minutes sans avoir marqué. On attend donc beaucoup de Paul Pogba, que l’on aimerait voir associé à Yohan Cabaye et N’Golo Kanté au milieu. Et d’Antoine Griezmann, qui reste encore loin de son vrai niveau. Pour l’instant, ce premier tour ne permet toujours pas de dire si l’équipe de France est capable de passer la vitesse supérieure, ou si elle va caler dès que le niveau va monter, comme en 2014. Les paris sont ouverts.