Paris-Soir, 24 mai 1937 : le fox-trot, la face B et l’hymne irlandais

Publié le 1er novembre 2019 - Bruno Colombari

On n’est jamais trop prudent au moment de diffuser l’hymne d’une sélection étrangère : une erreur d’inattention peut générer un incident diplomatique. Au printemps 1937, les Irlandais ne s’en sont pas offusqués, mais ils ont gagné le match.

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Le 7 septembre 2019, un étrange incident avait marqué l’avant-match France-Albanie : alors que l’hymne des visiteurs retentissait dans la sono du Stade de France, les supporters et les joueurs albanais réagissaient bizarrement. Et pour cause : l’hymne diffusé était celui de l’équipe d’Andorre, attendue trois jours plus tard. La faute à une erreur de fichier mp3 envoyé par mail en pièce jointe, et qui a plongé la FFF dans l’embarras.

Le 23 mai 1937, il y a eu un précédent. Ce jour-là dans un stade de Colombes plutôt clairsemé (20 000 spectateurs), l’équipe de France qui prépare la Coupe du monde qu’elle accueillera l’année suivante reçoit la sélection d’Irlande. C’est la troisième fois, après deux précédents en 1921 et en 1928 contre une équipe unifiée.

Et là, nous raconte Paris-Soir via Gaston Bénac dans son édition du 24 mai est joué « l’hymne irlandais, commencé par erreur par quelques notes de fox-trot ». La chanson d’un soldat (Amhrán na bhFiann en VO) n’a pourtant pas grand chose à voir avec le pas du renard, très prisée en France après la Grande Guerre.

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
L’article est cliquable : sur le site de Gallica, vous pouvez zoomer dans la page ou la télécharger.

Dans l’édition du même jour, L’Auto apporte une précision sous la plume de Constantin Brive :
« Cependant dans la coulisse, un drame se joue. Auprès du pick-up, qui fait aujourd’hui fonction de fanfare militaire, on tourne et retourne un disque dont les étiquettes sont rédigées en langue... d’Eire, probablement. »Je te dis que c’est ça le bon côté« , affirme un qui s’y connait. Et un joyeux rigodon éclate alors sur le stade. Les Irlandais n’en ont cure. Alors, hop ! on change de côté. Cette fois, ils s’immobilisent sur une jambe, comme un film en panne : c’est la bonne face. » Il y a souvent des trouvailles amusantes sur les face B des disques...

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
L’article est cliquable : sur le site de Gallica, vous pouvez zoomer dans la page ou la télécharger.

Si le fox-trot de Paris-Soir s’est transformé en rigodon, une danse folklorique originaire du Dauphiné qui a traversé l’Atlantique pour essaimer au Québec, ici au moins, l’origine de l’incident est ciblée : là aussi, comme en 2019, c’est une erreur de source, en l’occurrence de face de disque. Fichue technologie moderne...

En attendant, les Irlandais n’en ont pas fait cas, mais ils ont remporté la rencontre (2-0) malgré une domination outrancière de l’équipe de France. Bien fait.

pour finir...

Merci à Raphaël Perry qui a découvert cette anecdote dans Paris-Soir au cours de ses recherches dans la presse sportive de l’entre-deux guerres. Merci également à Matthieu Delahais qui a déniché l’article de L’Auto du même jour.

Entre 1904 et 1919, 128 internationaux ont porté au moins une fois le maillot de l’équipe de France. Si leur carrière internationale est la plupart du temps anecdotique, leur vie est souvent romanesque.

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