Jean-François Larios, une cavale au Canada

Publié le 8 novembre 2021 - Richard Coudrais

Jean-François Larios est le premier international français à avoir évolué dans un club de foot au Canada. C’était en 1983, pour un passage très bref au sein d’un championnat à l’agonie, la NASL.

3 minutes de lecture

Lorsque Jean-François Larios rejoint le Manic Montréal en janvier 1983, l’annonce ne manque pas de surprendre. A l’époque, peu de footballeurs français (aux exceptions notable de Michel Platini et Didier Six) tentent l’aventure à l’étranger. Et ils sont encore plus rares ceux qui traversent l’Atlantique et pour cause : L’ancien Stéphanois est tout bonnement le premier footballeur français à rejoindre un club d’Amérique du Nord.

Un rêve americain

Le Manic Montréal est un club tout neuf. Il a été fondé en 1980 par les brasseries Molson qui avaient acheté la franchise de Philadelphie pour la délocaliser dans la métropole québécoise. Nous sommes en effet dans l’univers du sport à l’américaine aux us et coutumes fort éloignées de ce que l’on connait en Europe. Le soccer tente de s’implanter en Amérique du Nord et utilise les mêmes recettes que les ligues de basket (NBA), de baseball (MLB), de foot américain (NFL) et de hockey sur glace (NHL).

Parmi leurs nombreuses particularités, ces ligues ont depuis toujours fait comme si la frontière entre les Etats-Unis et le Canada n’existait pas. Ainsi le Manic Montréal est-il intégré à la North American Soccer League (NASL) et joue dans la même cour que le Cosmos New York et Los Angeles Aztecs. Cette ligue nord-américaine a beaucoup fait parler d’elle dans la deuxième partie des années soixante-dix, lorsqu’elle parvient à attirer de très grands joueurs en fin de carrière parmi lesquels le roi Pelé en personne mais aussi Cruyff, Beckenbauer, Best, Eusebio, Carlos Alberto, Chinaglia...

Le Manic est rapidement devenu un club très populaire. Ses rencontres au Stade Olympique de Montréal, théâtre des Jeux de 1976, se disputent devant 30 000 spectateurs en moyenne. On l’imagine très bien devenir le premier club canadien champion NASL.

Road to Manic

Mais quand Jean-François Larios débarque dans la Belle Province au printemps 1983, les choses ont un peu changé. La NASL a été désertée par ses stars et est devenue une ligue exsangue qui vit sans le savoir encore les dernières heures de son histoire. Quant au Manic, cette saison 1982-83 est la pire de sa courte destinée. Le club canadien aligne les contre-performances et voit son public retourner dans les patinoires de hockey. Jean-François Larios est donc chargé d’amener un peu de technique dans une équipe qui en manque cruellement. Hormis le Yougoslave Dragan « Guzo » Vujović, le reste de l’effectif est plutôt physique et sans imagination.

Mais le Français est lui-même dans une phase creuse de sa carrière. International à 17 reprises, il a décidé, à vingt-six ans, de décliner toute sélection au terme de la Coupe du monde 1982. A Saint-Etienne [1], il subit de plein fouet la crise d’un club où a été révélée la pratique de salaires occultes. Des têtes tombent parmi lesquelles celles de Jean-François Larios devenu persona non grata. Après un premier transfert avorté à l’Atlético de Madrid, il se retrouve au Manic Montréal pour une pige de quatre mois avant de rejoindre Neuchâtel Xamax en juillet 1983.

Contrarié par une blessure au genou, le Français ne donne pas la pleine mesure de son talent, d’autant qu’il s’adapte très mal au gazon synthétique, une matière utilisée dans la plupart des stades nord-américains. Jean-François Larios ne joue finalement que six rencontres, inscrit un but, et met fin à l’aventure sans n’avoir pu infléchir le destin de son club. Le Manic disparaîtra en effet quelques mois plus tard après avoir tenté de se transformer en une Team Canada, une équipe entièrement composée de joueurs canadiens dans la perspective d’une qualification à la Coupe du monde 1986.

Jean-François Larios aura donc été le seul footballeur français à avoir participé à la NASL, qui ferme boutique en 1984. Il faudra attendre l’émergence de la Major League Soccer (MLS) en 1993 pour voir d’autres internationaux français traverser l’Atlantique. Parmi lesquels Youri Djorkaeff et Thierry Henry.

Les internationaux français en Amérique du Nord

Le premier championnat nord-américain, de 1967 à 1984, avait pour sigle la NASL. Lorsqu’il a été recréé en 1994, il a pris le nom de MLS.

Joueursel.clubpériodematchsbuts
Jean-François Larios 17 Manic Montréal 1983-1983 6 1
Youri Djorkaeff 82 New York MetroStars 2005-2006 49 13
Laurent Robert 9 Toronto FC 2008-2008 21 1
Thierry Henry 123 New York Red Bulls 2010-2014 135 52
Mikaël Silvestre 40 Portland Timbers 2013-2014 8 0
Peguy Luyindula 6 New York Red Bulls 2013-2015 48 6
Michaël Ciani 1 Los Angeles Galaxy 2017-2018 28 2
Bacary Sagna 65 Impact Montréal 2018-2019 40 2
Rod Fanni 5 Impact Montréal 2018-2020 47 1
Blaise Matuidi 84 Inter Miami depuis août 2020 46 1

Les internationaux français devenus entraineurs en MLS

Patrick Vieira entraineur du New York FC de 2016 à 2018
Rémi Garde entraineur de l’Impact Montréal de novembre 2017 à août 2019
Joël Bats entraineur des gardiens (2018) puis entraineur adjoint (2019) à l’Impact Montréal
Thierry Henry entraineur de l’Impact Montréal de novembre 2019 à février 2021

[1Jean-François Larios a été formé à l’ASSE et y joue depuis ses débuts, à l’exception de la saison 1977-1978 où il fut prêté à Bastia, ce qui lui permit de participer à l’épopée européenne du club corse

Entre 1904 et 1919, 128 internationaux ont porté au moins une fois le maillot de l’équipe de France. Si leur carrière internationale est la plupart du temps anecdotique, leur vie est souvent romanesque.

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Hommage à Pierre Cazal