Comment sont désignés les pays organisateurs de la Coupe du monde ?

Publié le 6 mars 2025 - Richard Coudrais

De Montevideo aux projets transnationaux des années futures, l’organisation d’une Coupe du monde de football passe avant tout par une décision de la FIFA où la controverse n’est jamais loin.

8 minutes de lecture

Dès que Jules Rimet, président de la FIFA, a annoncé lors du congrès d’Amsterdam en marge des Jeux olympiques de 1928, la création de la Coupe du monde de football, plusieurs pays européens se sont porté candidats à l’organisation de la première édition : l’Espagne, la Hongrie, l’Italie, les Pays-Bas et la Suède. Mais l’Uruguay, dont l’équipe remporte les deux derniers tournois olympiques, et est donc considérée comme championne du monde en titre, a également fait part de son intérêt, d’autant que le pays fête en 1930 le centenaire de son indépendance.

1930 : lointaine première

Les Pays-Bas et la Hongrie renoncent pour des raisons économiques, suivis par la Suède et l’Espagne qui se désistent quant à elles pour favoriser la candidature italienne. Mais cette dernière renonce à son tour estimant ne pas disposer d’assez de temps pour mettre l’épreuve en place. La voie est donc libre pour l’Uruguay que la FIFA désigne le 18 mai 1929 à l’occasion du congrès réuni à Barcelone.

1934 : première édition en Europe

Deux ans après la première édition, la FIFA doit désigner le pays organisateur de la Coupe du monde 1934 lors du Congrès de la FIFA à Stockholm. La Suède et l’Italie ont posé leur candidature, mais la première nommée se retire juste avant le vote, laissant le champ libre à l’Italie. Celle-ci accepte le challenge avec toutefois quelques réserves. Ce n’est que le 9 octobre 1932 qu’elle valide la décision de la FIFA. Cette édition est la seule où l’équipe du pays organisateur n’est pas qualifiée d’office. Un match contre la Grèce, deux mois avant l’ouverture de l’épreuve, est nécessaire à la Nazionale pour obtenir le billet. C’est aussi la seule édition où le tenant du titre n’est pas présent, l’Uruguay répondant par son absence au peu d’enthousiasme des équipes européennes à traverser l’Atlantique quatre ans plus tôt.

1938 : premier hôte élu

Trois pays font part de leur intérêt pour l’organisation de la Coupe du monde 1938 : l’Allemagne, l’Argentine et la France. Pour la première fois, la FIFA procède à un vote auprès des fédérations adhérentes. Le 13 août 1936, au congrès de Berlin, la France est élue dès le premier tour avec 19 voix contre 4 pour l’Argentine et aucune pour l’Allemagne. L’Argentine et d’autres pays d’Amérique du Sud contestent le choix de maintenir la Coupe du monde en Europe et décrètent un boycott de l’épreuve (que le Brésil, toutefois, ne respectera pas).

1942 : première édition annulée

Deux pays posent leur candidature pour la Coupe du monde 1942 : l’Allemagne et le Brésil. La FIFA souhaitant d’autres candidatures, repousse le vote à 1939. Mais entre-temps est déclenchée la seconde guerre mondiale. La Coupe du monde n’aura pas lieu. Celle de 1946 non plus.

1950 et 1954 : premières éditions reportées

Au lendemain de la guerre, la FIFA décide que la Coupe du monde sera organisée tous les deux ans, les années impaires. En juillet 1946, la FIFA en congrès à Luxembourg désigne les pays qui organiseront les tournois de 1949 et 1951. Le 26 juillet, le Brésil est désigné pour la première et le lendemain, c’est la Suisse qui hérite de la seconde. En juillet 1948, les retards dans les travaux incitent le Brésil à décaler d’un an la tenue du tournoi. La FIFA accepte (avait-elle le choix ?) et annonce qu’elle revient à un rythme quadriennal lors des années paires non-olympiques. La cinquième édition, en Suisse, est alors repoussée à 1954.

1958 : l’Europe seule au monde

Lors du congrès de Rio le 23 juin 1950, la veille du début de la quatrième Coupe du monde, la FIFA attribue l’organisation de la sixième Coupe du monde, qui se déroulera en 1958, à la Suède, seule candidate après les défections de l’Argentine, du Chili et du Mexique. C’est la dernière fois que deux éditions consécutives sont organisées sur le même continent.

1962 : les règles de l’alternance

Le pays organisateur de la Coupe du monde 1962 est désigné le 10 juin 1956 à l’occasion du congrès de Lisbonne. Trois pays ont déposé un dossier : l’Allemagne de l’Ouest, l’Argentine et le Chili. En raison d’une règle d’alternance tacite qui rend l’Amérique prioritaire, la RFA se désiste. Le vote donne la victoire au Chili à 32 voix contre 11 pour l’Argentine. Le tremblement de terre de 1960 (le plus puissant de l’histoire) ne fera pas revenir la FIFA sur sa décision.

1966 : football’s coming home

Le pays organisateur de la Coupe du monde 1966 est désigné le 22 août 1960 à l’occasion du congrès de Rome en marge des Jeux olympiques. Trois pays ont fait part de leur candidature : l’Allemagne de l’Ouest, l’Angleterre et l’Espagne. Cette dernière se désiste juste avant le vote qui voit la victoire de l’Angleterre à 34 voix contre 27 pour l’Allemagne fédérale. Curieusement, les deux pays retrouveront leur équipe en finale. Pour une nouvelle victoire anglaise.

1970 : première en Amérique du Nord

Le pays organisateur de la Coupe du monde 1970 est désigné le 8 octobre 1964 lors du du congrès de Tokyo à l’occasion des Jeux olympiques. Deux pays ont fait part de leur candidature : l’Argentine et le Mexique. Ce dernier l’emporte avec 56 voix contre 32. C’est la première fois que la Coupe du monde se déroulera dans la zone CONCACAF, hors Europe et Amérique du Sud.

1974, 1978 et 1982 : petits arrangements à long terme

Lors du congrès de Londres le 6 juillet 1966, la FIFA désigne les organisateurs des Coupes du monde 1974, 1978 et 1982. L’Allemagne de l’Ouest et l’Espagne font candidature pour la Coupe du monde 1974 qui doit revenir à l’Europe au nom de l’alternance. L’Argentine et le Mexique avaient déposé leur dossier pour la Coupe du monde 1978, mais le Mexique a retiré sa candidature après avoir obtenu l’organisation de 1970. La RFA et l’Espagne se mettent finalement d’accord pour organiser l’une l’édition de 1974 et l’autre celle de 1982. Aucun vote n’est donc nécessaire.

1986 : premier abandon

Le 9 juin 1974, lors du congrès de Stockholm, la FIFA attribue à la Colombie, seule candidate, l’organisation de la Coupe du monde 1986. Mais le pays sud-américain n’avait pas prévu d’accueillir vingt-quatre équipes, et de construire des stades supplémentaires. En proie de surcroît à une grave crise économique, le gouvernement colombien annonce qu’il abandonne le projet en novembre 1982. La FIFA lance un nouvel appel à candidature auquel répondent le Canada, les États-Unis et le Mexique. Le 20 mai 1983 à Zurich, le comité exécutif de la FIFA vote à l’unanimité pour le Mexique, premier pays à organiser la Coupe du monde pour la deuxième fois.

1990 : avantage politique

Quatre pays ont adressé leur candidature pour l’organisation de la Coupe du monde 1990 : l’Angleterre, la Grèce, l’Italie et l’Union soviétique. L’Angleterre et la Grèce se désistent finalement avant le vote du comité exécutif, qui a lieu le 19 mai 1984 à Zurich. L’Italie remporte les suffrages avec 11 voix contre 5 pour l’URSS. C’est la deuxième fois que le pays du Calcio organise le tournoi.

A la fin des années 1980, le rugby organise ses premières Coupes du monde sur le modèle du football. Si la première édition a lieu en 1987 en Australie, la deuxième, en 1991, est conjointement organisée par les cinq nations du traditionnel Tournoi, démontrant que l’édition d’une épreuve internationale peut simultanément se dérouler dans plusieurs pays. Ce sera également le cas en 1999 et en 2007. La FIFA prend note.

1994 : vedette américaine

Trois pays font part de leur intention d’organiser la Coupe du monde 1994 : le Brésil, les États-Unis et pour la première fois un pays africain : le Maroc. Le vote se déroule à Zurich le 4 juillet 1988 et désigne les États-Unis, vainqueur à 10 voix contre 7 au Maroc et 2 au Brésil.

1998 : une Coupe du monde francophone

Trois pays font part de leur intention d’organiser la Coupe du monde 1998 : la France, le Maroc et la Suisse. La candidature suisse est retirée par la FIFA, estimant qu’elle ne répond pas aux exigences. Le vote se déroule à Zurich le 2 juillet 1992 et désigne la France, vainqueur à 12 voix contre 7 au Maroc. La France accueille la Coupe du monde soixante ans après l’édition de 1938.

2002 : première édition en Asie

Trois pays ont déposé leur candidature pour l’organisation de la Coupe du monde 2002 : le Mexique, le Japon et la Corée du Sud. Le jour du vote, le 31 mai 1996, les deux pays asiatiques proposent une candidature conjointe. Celle-ci est élue à l’unanimité à l’issue d’un vote à main levée. C’est la première fois que la Coupe du monde est organisée simultanément dans deux pays. C’est aussi la première fois qu’elle se déroulera sur le continent asiatique.

2006 : tradition européenne

Cinq pays font part de leur intention d’organiser la Coupe du monde 2006 : l’Afrique du Sud, l’Allemagne, l’Angleterre, le Brésil et à nouveau le Maroc. Alors que le Brésil s’est retiré, le vote se déroule à Zurich le 7 juillet 2000. Trois tours sont nécessaires pour désigner le pays organisateur. Le Maroc est éliminé au premier et l’Angleterre au deuxième. L’Allemagne l’emporte finalement aux dépens de l’Afrique du Sud à 12 voix contre 11.

2010 : première édition en Afrique

La FIFA décide en 2003 que l’alternance se fera désormais sur quatre continents. Après l’Asie en 2002 et l’Europe en 2006, elle décrète que la Coupe du monde 2010 se déroulera sur le continent africain, puis celle de 2014 sur le continent américain. Pour l’édition de 2010, quatre candidatures sont déposées émanant de l’Afrique du Sud, de l’Egypte, du Maroc et une association de la Libye et la Tunisie. Cette dernière est retirée à la suite de la décision de la FIFA de ne plus accepter que les candidatures d’un seul pays, trop de problèmes étant survenus lors du Mondial 2002. Le 15 mai 2004, l’Afrique du Sud est élue dès le premier tour avec 14 voix contre 10 pour le Maroc et aucune pour l’Égypte.

2014 : le Brésil en solo

Le Brésil est le seul pays à avoir posé sa candidature pour l’organisation de la Coupe du monde 2014, a priori réservée à l’Amérique du Sud. Il est donc logiquement désigné le 30 octobre 2007. Deux ans plus tard, Rio obtient l’organisation des Jeux olympiques 2016.

2018 et 2022 : une interprétation de l’alternance

La FIFA décide de désigner le même jour les pays organisateurs des Coupes du monde 2018 et 2022. Les candidatures africaines et sud-américaines ne peuvent être présentées puisque l’Afrique accueille déjà l’édition 2010 et l’Amérique du Sud celle de 2014. Onze candidatures sont reçues par la FIFA : L’Angleterre, l’Australie, la Corée du Sud, les Etats-Unis, l’Indonésie, le Japon, le Mexique, le Qatar, la Russie, ainsi que deux candidatures conjointes : Belgique-Pays-Bas et Espagne-Portugal, la FIFA étant manifestement revenue sur sa décision de 2003.

La candidature mexicaine s’est retirée en septembre 2009 de même que celle de l’Indonésie. Un an plus tard, les États-Unis annoncent qu’ils se retirent de la candidature de 2018 mais qu’ils restent candidats pour 2022, tout comme l’Australie, la Corée du Sud, le Japon et le Qatar. Il ne reste finalement que des candidatures européennes pour 2018, ce qui exclut l’Europe du tournoi de 2022. Les votes ont lieu le 2 décembre 2010. Pour 2018, la Russie obtient 13 voix au second tour contre 7 pour Espagne-Portugal et 2 pour Belgique-Pays-Bas. L’Angleterre avait été éliminée au premier tour. Pour 2022, quatre tours sont nécessaires. Le premier élimine l’Australie, le deuxième le Japon et le troisième la Corée du Sud. Au quatrième, le Qatar obtient 14 voix contre 8 aux États-Unis.

2026 : l’ère de la démesure

Le pays organisateur de la Coupe du monde 2026 est désigné le 13 juin 2018. Deux candidatures sont parvenues à la FIFA, sachant que ni l’Europe, ni l’Asie n’avaient la possibilité de postuler. Ce n’est plus le comité exécutif qui participe au vote, mais à nouveau l’ensemble des fédérations de la FIFA, comme avant 1986. A l’issue du vote, la candidature des Etats-Unis, associée au Mexique et au Canada, recueille 134 voix contre 65 au Maroc.

2030 : l’édition du centenaire

L’organisation de la Coupe du monde 2030, celle du centenaire de l’épreuve, est ouverte à tous les continents. Un grand nombre de pays font part de leur intérêt, soit seuls, soit dans une candidature commune (Seize projets dans lesquels sont impliqués vingt-trois pays : Arabie saoudite, Argentine, Australie, Cameroun, Chine, Colombie, Corée du Nord, Corée du Sud, Égypte, Émirats arabes unis, Équateur, Espagne, Grèce, Israël, Italie, Japon, Maroc, Nouvelle-Zélande, Paraguay, Pérou, Portugal, Ukraine, Uruguay). Toutefois, le jour du vote, le 4 octobre 2023, il ne reste qu’une seule candidature en lice, celle réunissant l’Espagne, le Portugal et le Maroc. Pour célébrer le centenaire de l’épreuve, la FIFA organise trois matchs inauguraux à Montevideo, Buenos Aires et Asuncion. Six sélections seront donc qualifiées d’office en tant que nation organisatrice.

2034 : retour au Golfe

La Coupe du monde de 2034 doit être organisée, au nom de l’alternance, soit en Asie, soit en Océanie, puisque l’Europe, l’Afrique et l’Amérique du Sud organise celle de 2030 et l’Amérique du Nord celle de 2026. Un grand nombre de pays s’est manifesté (notamment l’Australie, l’Indonésie, la Thaïlande et… le Zimbabwe), mais seule l’Arabie Saoudite a maintenu sa candidature jusqu’au jour du vote, le 31 octobre 2023.

2038 : vers de nouveaux territoires

Pour la Coupe du monde 2038, seuls l’Océanie et l’Amérique Centrale et du Nord peuvent présenter un projet. Le Ghana s’est manifesté, mais l’Afrique n’est pas censée pouvoir accueillir le tournoi.

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