Le résultat était-il prévisible ?
Compte tenu de la propension récente des Bleus à gagner facilement contre les équipes à leur portée et à piocher à l’extérieur contre des adversaires plus coriaces, une victoire sans trop de soucis était à prévoir. La faiblesse de l’Albanie, que l’on a connue bien meilleure à l’Euro 2016, aurait même pu aboutir à un carton dans les proportions de celui de mars 1991 (5-0) qui reste à ce jour la plus large victoire dans ce type de confrontations.
Sans une inhabituelle maladresse d’Antoine Griezmann devant le but (et notamment sur pénalty) et quelques belles occasions gâchées, les Bleus auraient pu se mettre définitivement à l’abri bien plus tôt, mais ça ne change pas grand chose à l’affaire. Ce n’était pas ce soir de rentrée que se jouait la qualification à l’Euro.
L’équipe est-elle en progrès ?
Il faudra la voir dans des matchs plus difficiles que celui-là, et notamment à Reykjavik en octobre, pour en juger. Mais en tout cas, cette équipe de France-là sait se rendre les matchs faciles, ce qui n’a pas toujours été le cas dans un passé récent (Luxembourg 2017, Australie 2018 entre autres). En marquant très vite, puis en pliant le résultat avant la mi-temps, les Bleus ont pu se permettre quelques fantaisies en attaque et surtout de régler des automatismes avec les deux titulaires qui n’étaient pas là en Russie, Clément Lenglet derrière et Kingsley Coman devant.
Il y a encore de la marge, évidemment, car il ne faut pas perdre de vue que cette équipe ne compte que trois trentenaires (Lloris, Matuidi et Giroud) et quatre joueurs de moins de 25 ans. Un peu plus de concentration aurait ainsi permis d’éviter le but albanais, même si le pénalty semble très généreux. Mais il reste encore du temps pour apprendre.
Quels sont les joueurs en vue ?
On attendait évidemment beaucoup des joueurs de retour de blessure comme Corentin Tolisso et Lucas Hernandez. Si le premier n’a pas fait de grosses différences au milieu et aurait pu prendre plus d’initiatives, le second a montré ce qui a tant manqué aux Bleus à Rotterdam et à Konya. C’est lui le titulaire indiscutable à gauche, et il s’est même offert une nouvelle passe décisive (sa quatrième) avant de provoquer le pénalty manqué par Griezmann.
L’autre retour du soir, c’est celui de Kingsley Coman, même s’il était rentré en jeu deux fois en juin dernier. L’attaquant du Bayern a réalisé son meilleur match en sélection, faisant oublier Mbappé, ce qui n’est pas rien, et se posant en candidat très sérieux pour un poste de titulaire à l’Euro.
Antoine Griezmann a alterné le très bon (le jeu en déviations) et le quelconque (un pénalty gâché, une occasion énorme manquée en deuxième période) : c’était un soir où il était meilleur au service des autres que de ses propres stats.
Enfin, un mot pour Raphaël Varane, impliqué sur les deux premiers buts et auteur d’une splendide passe décisive pour Coman qui a déchiré la défense adverse. On se dit qu’avec une telle technique, on aimerait le voir monter balle au pied plus souvent comme le faisaient Marius Trésor et Laurent Blanc.
Quels sont les joueurs en retrait ?
Si Corentin Tolisso aurait pu mieux faire en l’absence de Paul Pogba dans un registre différent, Thomas Lemar n’a pas montré qu’il pouvait être un titulaire dans un avenir proche. Le gaucher de l’Atlético a manqué de précision dans ces gestes, hormis sur l’action collective de la 55e terminée par le tir de Griezmann. Les retours de Mbappé devant et de Pogba au milieu ne lui laisseront pas beaucoup de place.
Quelles sont les attentes pour le prochain match ?
Le souvenir du match d’octobre 1998, le premier au Stade de France après le titre mondial, doit rappeler les Bleus à la modestie avant d’accueillir Andorre : ce soir-là, alors qu’on s’attendait à un déluge de buts, les joueurs de la principauté avaient tenu 53 minutes avant de craquer et ne s’étaient inclinés que sur le score de 2-0. Et toutefois la facile victoire du match aller en juin dernier (4-0) étaient montée à la tête des joueurs de Deschamps, la résistance acharnée des Andorrans à Istanbul contre la Turquie (0-1, but à la 89e) devrait suffire à les calmer. Il faudra marquer très vite, comme contre l’Albanie, et ensuite penser à soigner la différence de buts.
Au-delà, et comme c’était prévisible, c’est lors des deux matchs d’octobre (contre l’Islande à Reykjavik puis face à la Turquie à domicile) que la qualification se jouera entre les trois favoris du groupe qui se sont mutuellement battus. Les Bleus auront l’occasion de mettre tout le monde d’accord en remportant les deux matchs et en se facilitant le travail.