Anne Costes est chargée des déplacements des Irrésistibles Français, Fabien Bonnel de la communication. L’association a été créée en octobre 2010 et anime un virage du stade de France. Elle suit aussi les Bleus dans leurs déplacements.
Que pensez-vous de ce tirage, d’un point de vue sportif tout d’abord ?
On se retrouve dans « le groupe de la mort », celui des deux derniers champions du monde et du dernier vainqueur de l’Euro… Forcément, ce n’était pas vraiment ce qu’on espérait, les Allemands et les Portugais non plus certainement. Et si les Portugais et nous savions que nous aurions un gros du chapeau 1, les Allemands pouvaient espérer un groupe beaucoup plus simple mais ils se retrouvent avec la bête noire du 2e et du 3e chapeau. Pour revenir sur nous, on est champion du monde et si on veut être champion d’Europe, il faut battre tout le monde !
On hérite en plus de l’Allemagne chez elle et, peut être, aussi de la Hongrie chez elle, si elle gagne son barrage. On n’est donc vraiment pas avantagé. Il va falloir faire des gros matchs dès le premier tour. L’avantage c’est qu’on ne joue pas trop loin de chez nous pour le premier match, on aimerait avoir le maximum de supporters avec nous pour ce match pour pousser les Bleus !
Regardons-le d’un point de vue logistique maintenant. L’Euro dans 12 villes différentes doit être un casse-tête pour les supporters qui vont suivre les matchs des Bleus… Quelles sont les difficultés supplémentaires par rapport à une compétition dans un seul pays ?
Ce qui est compliqué, c’est qu’habituellement on prend un aller-retour pour le pays hôte, par exemple la Russie en 2018, puis ensuite on gère les déplacements à l’intérieur du pays. Là, vu que la finale est à Londres, et qu’on joue en Allemagne et en Hongrie, suivi d’un huitième qui peut être à Dublin ou Bucarest, et un quart à Saint Petersbourg ou Rome, on ne peut pas prendre simplement d’aller-retour. Il faut quasiment prévoir des déplacements au jour le jour.
« La billetterie ouvre le 4 décembre. Il faudra prendre tous les billets voulus, même ceux après le premier tour ».
Comme on est dans un groupe compliqué, on ne peut même pas anticiper d’en terminer premier comme on pouvait le faire avant. Les matchs du second tour éclatés aux quatre coins de l’Europe risquent de freiner les commandes de billets pour le huitième et le quart de finale. Le contingent de supporters français sera forcément impacté malheureusement.
Quel budget faut-il prévoir pour suivre le premier tour des Bleus à l’Euro ? Comment vous y prenez-vous pour obtenir les billets ?
Pour les billets de match, la billetterie ouvre le 4 décembre. Il faudra directement prendre tous les billets voulus, même ceux après le premier tour. Pour tout ce qui est billet d’avion ou de train, chacun va s’en charger de son côté. Certains les ont même déjà pris.
En terme de budget, on a évité Bakou qui était la destination la plus chère. Pour Munich et Budapest, on peut trouver des aller-retour à moins de 200 euros. Les hébergements à Munich sont chers mais on devrait trouver des choses abordables à Budapest.
Le système d’inscription en ligne sur le site de la FFF sert à quoi si les billets sont en vente à partir du 4 décembre ?
A obtenir le code qui permettra d’accéder à la vente des places dans le quota des tribunes françaises. Sans lui, l’accès n’est possible qu’à la vente grand public.
« Il y aura des Casas bleues à Munich et à Budapest. »
Avez-vous des supporters adhérents dans d’autres pays ? Comment vous organisez-vous pour les retrouver lors des déplacements dans les pays où ils résident ?
Nous avons 40 adhérents à l’étranger répartis dans 20 pays. Chaque adhérent gère ses billets d’avion, c’est le cas aussi des adhérents étrangers. S’ils souhaitent être avec nous dans les hôtels, ils vont s’inscrire à nos déplacements et ils nous retrouveront sur place dans les auberges de jeunesse. Si ils voyagent en indépendant on les retrouvera dans les rues de la ville, ou dans nos points de rassemblement.
La FFF a-t-elle prévu de renouveler son dispositif de Casas Bleues dans les villes accueillant des matchs de l’équipe de France ?
Oui, il y aura des casas bleues à Munich et Budapest. Les Casas Bleues sont à l’origine un lieu de rassemblement pour les supporters français avant les matchs. Elles ont commencé en 2013 en Ukraine, un test avant d’être développé au Brésil pour la Coupe du monde, d’où le nom « Casa » qui a été gardé depuis. Elles se tiennent le plus souvent dans des bars aux abords des stades.
La formule à 24 équipes ne risque-t-elle pas de nuire à l’intérêt du premier tour, avec quatre groupes qui compteront trois qualifiés sur quatre ? On se souvient que le Portugal a été champion d’Europe 2016 après trois nuls au premier tour…
Vu notre groupe, peut-être que c’est pas si mal d’avoir 3 qualifiés sur 4 ! Même s’il sera difficile d’être dans les meilleurs troisièmes en sortant d’un groupe comme celui-ci.
« Ce serait déjà énorme s’il y avait 10 000 supporters français au premier tour. »
L’UEFA s’est-elle engagée à regrouper les supporters d’un pays dans un secteur du stade ? En Russie l’an dernier ça n’avait pas été le cas…
Cette année, l’UEFA a mis en place un code de regroupement à inscrire dans la commande de billets afin de pouvoir être regroupés au stade. C’était comme ça en 2016 et ça avait plutôt bien fonctionné. On espère que ce sera pareil cette année.
L’UEFA attribue 10 000 places aux supporters français pour le match de Munich le 16 juin et 8000 places pour les matchs de Budapest les 20 et 24 juin. Est-ce que ça veut dire qu’il ne pourra pas y avoir plus de supporters français que ça à chacun de ces matchs ?
Ca serait déjà énorme qu’il y ait 8 à 10 000 supporters français par match du premier tour, en espérant que tous soient là pour donner de la voix et aider nos Bleus dans ce groupe compliqué. Souvenons-nous d’où l’on vient et les faibles quotas demandés précédemment.
Mais pour répondre plus précisément à ta question, certains Français ont déjà pris des billets lors des phases de vente précédente, les sponsors devraient en avoir et les familles des joueurs aussi. On pourrait donc dépasser ces chiffres.
Pourquoi des contingents si faibles alors qu’il s’agit de stades de 70 000 et 68 000 places ? Est-ce que c’est un pourcentage fixe attribué aux supporters de chaque équipe, même si l’une d’elle est hôte ? C’était comme ça en 2016 quand la France jouait à domicile ?
Oui, c’est un pourcentage du stade attribué à chaque nation et c’était notre cas en 2016 où nous n’avions qu’un certain quota de billets ouvert à la vente uniquement pour les Français. La grande majorité des autres places sont ouvertes en vente grand public. Évidemment, les habitants des pays hôtes demanderont une majorité des places de ce quota par facilité d’organisation pour s’y rendre.
« Aujourd’hui, les supporters perdent continuellement des parts des quotas au profit de la rentabilité financière. »
J’ai toujours des frissons en voyant les images des différents finales de Coupes d’Europe des clubs au début des années 90 où les stades sont pratiquement à 50% pour l’équipe A et 50% pour l’équipe B. Aujourd’hui, les supporters perdent continuellement des parts des quotas au profit de la rentabilité financière.
Les demi-finales et la finale auront lieu à Wembley. Difficile de faire plus près !
Oui ! on pourra mettre des bus en place pour rejoindre Londres, prendre l’Eurostar, l’avion, ou même faire les déplacements en voiture.
Il faut absolument, absolument, prendre ses billets conditionnels pour la finale dès maintenant, car il ne sera pas très compliqué de rejoindre la capitale anglaise le 12 juillet. C’est le message le plus important qu’on peut faire passer à tous les supporters français. Par expérience, on sait que beaucoup essaieront de prendre un billet pour la finale au dernier moment si la France s’y qualifie. Les billets conditionnels permettent de ne pas stresser pour avoir ces précieux sésames et de s’assurer de les payer le moins cher possible... bien qu’ils soient au tarif exorbitant de 295 euros.
Comment fonctionnent les billets conditionnels dont tu parles pour la finale ? On les réserve et en fonction des équipes qualifiées, on peut les revendre ? A qui et à quel prix ?
Les billets conditionnels sont des billets que tu n’obtiens que si ton équipe se qualifie et qui t’es remboursé si elle ne l’est pas. Par exemple, le siège Tribune 1 Bloc 1 Rang 1 Place 1 est vendu 24 fois, 1 fois à chaque supporter des 24 équipes. C’est un avantage pour les supporters de pouvoir être sûr d’avoir son billet pour la finale si son équipe y est et de ne pas devoir le revendre si elle ne se qualifie pas. C’est aussi un avantage financier conséquent pour les organisateurs qui font fructifier 24 fois le prix d’un billet pendant 6 mois.
En 2024, l’Euro revient à un pays hôte classique avec l’Allemagne. Ça devrait être plus facile pour les déplacements, non ?
Oui, ça nous rappellera la Coupe du monde 2006. On avait fonctionné pour la plupart en aller-retour pour chaque match, sauf pour certains qui faisaient toute la compétition et qui eux sont restés en Allemagne tout le mois. On espère refaire les 11 000 kilomètres en un mois que nous avions fait à l’époque, ça serait synonyme d’une belle épopée.
Pour terminer, à quel niveau voyez-vous les Bleus à l’Euro ? Le double double de Deschamps, 2018-2020 après 1998-2000, vous semble-t-il plausible ?
Ça serait vraiment un exploit qui nous fait déjà rêver ! Le premier tour nous apprendra beaucoup sur notre compétition. A nous de montrer qu’on mérite ce titre de champions d’Europe.