Avec 13 confrontations depuis 2001, l’Allemagne est l’adversaire le plus souvent rencontré par l’équipe de France au 21e siècle. C’est aussi un sparring partner privilégié en amical lors de la saison d’un championnat d’Europe. Depuis 1967, en 15 éditions, le match de Lyon sera le huitième du genre.
1967 : une manita pour Aubour
Louis Dugauguez aligne, face au finaliste de la Coupe du monde 1966, une équipe très inexpérimentée avec deux débutants, le défenseur sochalien Claude Quittet et le milieu de Stuttgart Gilbert Grecs, alors que Jean Baeza (1), Robert Péri (2), Charly Loubet (3) et Fleury Di Nallo (5) n’en cumulent que 11 à eux quatre avant le coup d’envoi. Dans un stade olympique de Berlin plein, les Français tiennent une mi-temps, pendant laquelle ils encaissent un but de Reinhard Libuda et perdent Robert Péri, expulsé. A dix, ils se font marcher dessus après la pause avec un doublé de Hans Siemensmeyer et deux buts en une minute signés Gerd Müller et Wolfgang Overath, Bernard Bosquier sauvant l’honneur (1-5). C’est à ce jour la plus large défaite française contre l’Allemagne.
La France est sortie du premier tour en tête de son groupe devant la Belgique, la Pologne et le Luxembourg, contrairement à l’Allemagne qui cale, devancée par la Yougoslavie. Mais les Bleus n’iront pas beaucoup plus loin : en quart de finale, ils se font étriller par ces mêmes Yougoslaves (1-1, 1-5).
1984 : sur un air de revanche à Strasbourg
Séville est encore frais dans les têtes, 21 mois plus tard, quand Allemands et Français se retrouvent le 18 avril 1984 à Strasbourg. Dans une ambiance bouillante qui ne fait même pas peur à Harald Schumacher, les Bleus privés de Tigana, Giresse et Platini font mieux que tenir tête aux champions d’Europe et l’emportent grâce à deux gauchers, Didier Six (passeur) et Bernard Genghini (buteur). Mais il ne reste que 11 des 24 acteurs de Séville à la Meinau (5 côté français, 6 côté allemand).
On croit alors que c’est la bande annonce d’une finale européenne, mais non : si les Bleus marchent sur l’eau, remportent tous leurs matchs et donc le titre, la Mannschaft s’embrouille les pinceaux au premier tour contre le Portugal (0-0), la Roumanie (2-1) et l’Espagne (0-1), qui l’emporte à l’ultime seconde. Pour la première fois depuis 1938, l’Allemagne est éliminée prématurément. Et Jupp Derwall quitte son poste de sélectionneur. Tout comme Michel Hidalgo, mais pas pour les mêmes raisons.
1987 : entame catastrophe à Berlin
En ce mois d’août 1987 morose, les Bleus n’ont pas le moral. Battus à Oslo en juin, ils ont perdu toute chance de défendre leur titre à l’Euro et surtout, ils ont perdu Michel Platini qui a mis un terme à sa carrière à 32 ans. Un an après la demi-finale de Guadalajara, ils retrouvent la RFA à Berlin en amical, et le match commence comme avait fini le précédent : par un but de Rudi Völler face à Joël Bats. Puis un deuxième : après 9 minutes, il y a déjà 0-2 et on craint le pire. Mais Eric Cantona, qui fait ses débuts à 21 ans, réduit le score avant la mi-temps. Avec quatre joueurs qui n’étaient pas au Mexique (José Touré, Fabrice Poullain, Gérald Passi et Eric Cantona), ils finissent mieux qu’ils avaient commencé, avec Bruno Martini à la place de Joël Bats, blessé.
L’Euro 1988, qui se joue en Allemagne, se passe donc de la France. Le pays-hôte est favori, mais s’il passe le premier tour (devant l’Italie, l’Espagne et le Danemark), il est piégé en demi-finale par des Néerlandais revanchards (la finale mondiale de 1974 n’est pas si loin) qui renversent le score dans le dernier quart d’heure, avec un pénalty de chaque côté. Mais Marco Van Basten met tout le monde d’accord.
1996 : le coup de Laurent Blanc
Au printemps 1996, les deux voisins ont beaucoup à se faire pardonner. Lors de la Coupe du monde aux Etats-Unis, l’Allemagne unifiée (on ne parle plus de RFA) a calé en quart de finale contre la Bulgarie, pas vraiment une performance. Et les Bleus ne peuvent même pas se moquer, vu qu’ils ont été éliminés huit mois plus tôt par les mêmes Bulgares.
Mais en 1996, les Bleus restent sur deux ans et 21 matchs sans défaite. Aimé Jacquet est sélectionneur, Zinédine Zidane et Youri Djorkaeff ont pris la place de Eric Cantona et Jean-Pierre Papin. Et cette équipe-là, si elle n’est pas toujours brillante, ne lâche rien. Un but de Laurent Blanc après 6 minutes suffit (1-0) pour ce qui semble être, comme en 1984, une finale potentielle.
Mais un mois plus tard, si l’Allemagne remporte son troisième Euro (après 1972 et 1980) grâce à un but en or d’Oliver Bierhoff, ce n’est pas devant la France mais la République tchèque, laquelle a pris les Bleus à leur propre jeu (0-0, tirs au but) qui avait pourtant bien marché en quart de finale contre les Pays-Bas.
2003 : démonstration en noir et blanc
Le très gros flop de la Coupe du monde 2002 a été digéré par les Bleus, qui veulent boucler à Gelsenkirchen une année prolifique (12 victoires d’affilée dont une victoire en Coupe des Confédérations). La Mannschaft de Rudi Völler prépare la Coupe du monde 2006 à la maison et joue en noir, contre des Bleus en blanc. Pourquoi pas, après tout ?
Mais même sans Barthez, Desailly et Vieira, l’équipe de France de Jacques Santini souffre un gros quart d’heure puis sort le grand jeu. Henry d’abord, puis un doublé de Trezeguet en deuxième mi-temps (3-0), une démonstration presque gênante pour le vice-champion du monde complètement dépassé.
Pourtant, les deux équipes vont passer à travers l’Euro portugais sept mois plus tard. L’Allemagne ne gagne pas un match (deux nuls contre les Pays-Bas et la Lettonie, et une défaite face aux Tchèques) et sort dès le premier tour, et la France fait à peine mieux, avec une piteuse élimination en quart de finale face aux Grecs, futurs champions d’Europe (0-1).
2012 : Giroud ouvre son compteur
Relancés par Laurent Blanc, les Bleus partent confiants à l’Euro et restent sur une série de 17 matchs sans défaite. Ils s’en vont à Brême défier une Allemagne qui a terminé la Coupe du monde 2010 à la troisième place après avoir échoué contre l’Espagne en demi-finale. A Brême, face à des adversaires en vert, les Bleus maîtrisent le match, marquent une fois par mi-temps (dont le tout premier but d’Olivier Giroud en sélection) et s’imposent grâce à de nombreux arrêts d’Ugo Lloris (2-1).
La série d’invincibilité française va se poursuivre jusqu’en juin mais elle s’arrêtera brutalement, sur deux défaites consécutives, ce qui à l’Euro ne pardonne pas. Celle contre la Suède de Zlatan n’empêche pas les Bleus d’aller en quart de finale, mais elle les envoie contre l’Espagne, qui gagne quasiment en marchant (0-2). L’Allemagne gagne ses quatre premiers matchs, mais cale face à l’Italie en demi-finale (1-2).
2015 : Coman un soir de drame
Il y a comme un air de revanche, sur le stade de France ce 13 novembre 2015, un an et demi après le quart de finale de Coupe du monde remporté par l’Allemagne à Rio. Les Bleus, avec en attaque un Kingsley Coman étincelant pour ses débuts à 19 ans, l’emportent 2-0 mais cette victoire sera effacée par les attentats qui frappent la région parisienne pendant le match. Le Stade de France était visé par les terroristes, qui auraient fait un carnage s’ils avaient pu entrer dans l’enceinte.
Neuf mois plus tard, les deux équipes se retrouvent à Marseille pour une demi-finale tellement attendue qu’elle prend des airs de finale avant l’heure. Et effectivement, les Bleus sont nettement dominés pendant une mi-temps, mais tiennent bon grâce à un grand Lloris. Et Griezmann plante deux fois et élimine les champions du monde en titre (2-0). Le clapping des joueurs au pied du virage Nord est magnifique, mais prématuré : il reste une finale à jouer trois jours plus tard, et elle sera perdue.