Leur Ballon d’or était collectif, le 15 juillet 2018

Publié le 4 décembre 2018 - Bruno Colombari

C’est finalement Luka Modric qui a obtenu le Ballon d’or 2018, Antoine Griezmann finissant encore troisième, comme en 2016, juste devant Kylian Mbappé et derrière l’indéboulonnable Ronaldo. Mais le trophée qu’ils ont partagé à 23 il y a cinq mois a bien plus de valeur.

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Comme en 2016, Antoine Griezmann n’aura vu le Ballon d’or que de loin, depuis une troisième place un peu injuste quand même en regard de son année brillante. Ce n’est pas un drame, et à choisir, franchement, entre deux séries de cinq Ballons d’or et une seule Coupe du monde, il n’y a jamais photo. Sauf à confondre le football et le concours de Miss France.

Ce qui a manqué à un joueur français pour remporter le trophée, c’est justement ce qui a fait la force de l’équipe de France en Russie : contrairement à 1984 ou 1998, il n’y avait pas de joueur d’exception tel que Platini ou Zidane, ou comme Modric, Ronaldo, Neymar ou Messi pour la Croatie, le Portugal, le Brésil et l’Argentine. France 2018 ressemble, par son homogénéité (pas son style de jeu) à l’Allemagne 2014 ou à l’Espagne 2010, ce qui avait aussi contribué à faire échouer Xavi, Inesta ou Neuer dans la conquête du Ballon d’or.

Un trophée porte-poisse, même pour Messi et Ronaldo

Cet échec n’aura certainement pas les conséquences désastreuses qu’il a eu en 2013 pour Franck Ribéry, lequel ne s’en est jamais vraiment remis. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder à quel point le Ballon d’or est une sorte de porte-poisse pour celui qui l’a gagné, du moins dans les mois qui ont suivi la cérémonie. On passera rapidement sur l’incroyable déveine de Lionel Messi avec l’Argentine (finaliste de la Coupe du monde 2014 et de la Copa America en 2015 et 2016). Son seul titre en sélection, aux JO de 2008, avait eu lieu avant son premier Ballon d’or (fin 2009).

Mais que dire de Cristiano Ronaldo ? Comme l’Argentin, il a tout gagné en club (cinq Ligues des Champions avec Man U et le Real), alors qu’avec le Portugal, il a commencé par verser beaucoup de larmes (finaliste de l’Euro 2004, demi-finaliste de la Coupe du monde 2006) avant d’être enfin titré à l’Euro 2016. Mais il avait dû laisser le Ballon d’or à Messi en décembre 2015, et il avait quitté ses coéquipiers sur blessure après 25 minutes en finale contre la France.

Cruyff, Rummenigge, Baggio, Ronaldinho : tous ont échoué

Vous en voulez d’autre ? Johan Cruyff, Ballon d’Or 1971, 1973 et 1974, muselé en finale de la Coupe du monde par Berti Vogts et finalement battu. Karl-Heinz Rummenigge, lauréat en 1980 et 1981, et battu en finale de la Coupe du monde 1982 par les Italiens. Marco Van Basten, titré en 1988, 1989 et 1992 après avoir remporté l’Euro. Roberto Baggio, récompensé en 1993 et finaliste malheureux contre le Brésil à Pasadena. Idem pour Ronaldo (le Brésilien), titré en 1997 et battu à Saint-Denis le 12 juillet 1998. Ou pour Ronaldinho, Ballon d’or 2005 et sorti de la Coupe du monde en quart de finale contre la France sept mois plus tard.

Côté français, c’est un peu la même chose, à une exception près, toujours la même : Michel Platini. Ballon d’or 1983 alors qu’il a perdu en finale de la C1 avec la Juventus, il réalise une année 1984 parfaite avec 13 buts dont 9 inscrits à l’Euro, sans compter un titre de champion d’Italie et une C2. Il garde le trophée trois ans, mais en 1986 il cale en Coupe d’Europe et et Coupe du monde, sorti à chaque fois en demi-finale et victime d’un tendon d’Achille défaillant.

Kopa, Papin et Zidane l’ont plus ou moins bien digéré

Les trois autres ont connu des fortunes diverses après leur Ballon d’or. Raymond Kopa s’en est plutôt bien tiré en 1959 avec une troisième Coupe d’Europe gagnée avec le Real, contre le Stade de Reims qu’il rejoint deux mois plus tard. Mais en sélection, il ne retrouvera pas son niveau exceptionnel de 1958.

Pour Papin, c’est plus compliqué : l’année 1992, il est champion de France pour la dernière fois avec l’OM qu’il quitte pour le Milan AC, mais il passe à travers à l’Euro avec les Bleus, même s’il marque les deux seuls buts français du tournoi.

Enfin, après une année 1998 extraordinaire, Zinédine Zidane souffre en 1999 : blessé, il manque quatre matchs qualificatifs des Bleus en mars et juin alors que la Juve est sortie de la Ligue des Champions en demi-finale par Manchester United.

Pour l’emporter en 2019, mieux vaut gagner la Ligue des Champions

En finissant respectivement troisième, quatrième et septième du Ballon d’or, Antoine Griezmann, Kylian Mbappé et Raphaël Varane s’épargneront peut-être une année 2019 délicate, allez savoir. Même si, pour être lauréat dans un an, il faudra sans doute gagner la Ligue des Champions : une phase qualificative d’Euro n’a en effet pas assez de poids auprès du jury pour faire pencher la balance.

La Coupe aux grandes oreilles pèse d’un poids démesuré dans le choix final, ce qui explique la présence de Ronaldo et Messi dans le top 5 en dépit d’une Coupe du monde décevante pour eux. En 2009, 2011 et 2015, Messi avait fait le doublé Ligue des Champions/Ballon d’or, comme Ronaldo en 2008, 2014, 2016 et 2017, le seul contre exemple récent en année impaire étant Franck Ribéry en 2013.

L’Atlético Madrid, le Paris SG ou le Real aideront-ils un joueur français à succéder à Zinédine Zidane ? Ou faudra-t-il patienter jusqu’en 2020 avec l’Euro et peut-être des transferts l’été prochain ?

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