Réagir après une douche froide : cinq cas d’école

Publié le 7 septembre 2017 - Bruno Colombari

Entre 1968 et 2010, les Bleus ont calé cinq fois en qualifications face à un adversaire beaucoup plus faible (Norvège, Israël, Biélorussie ou Chypre). Ils ont parfois su réagir, mais pas toujours.

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Si quelqu’un a eu l’audace, dimanche, de parier sur un 0-0 pour France-Luxembourg, il a sûrement fait une très bonne affaire, de quoi amortir les dépenses de la rentrée. Depuis l’après-guerre, des résultats aussi inattendus se comptent sur les doigts d’une main en phase qualificative d’un Mondial ou d’un Euro. En voici cinq, avec pour chacun des éléments de contexte et les conséquences qui ont suivi, aussi bien pour l’équipe que pour le sélectionneur.

France-Norvège 1968 à Strasbourg : 0-1

Le 6 novembre 1968 commence pour l’équipe de France la phase qualificative pour la Coupe du monde 1970 au Mexique. La tâche semble largement à la portée des Bleus, dans un groupe à trois complété par la Suède et la Norvège.

L’humiliation de Strasbourg suit un scénario assez proche finalement de celui de 2017 : un adversaire regroupé et de plus en plus combatif alors que l’heure tourne, et des Bleus qui arrosent copieusement la surface adverse sans jamais trouver la faille. A la 67e, ce qui devait arriver arriva : Odd Iversen fait un tout droit dans la défense française depuis le milieu de terrain, se heurte à Bernard Bosquier, bénéficie d’un contre favorable et vient battre Carnus d’une frappe en force, à la Kostadinov.


 

Cette défaite initiale et inattendue aurait pu ne pas être fatale à l’équipe de France, qui sera éliminée un an plus tard à Stockholm après avoir perdu le match retour contre la Suède (0-2) alors qu’elle avait gagné entre temps à Oslo (3-1). Le 3-0 final face aux Suédois au Parc ne sera pas suffisant.

Conséquences : Démission de Louis Dugauguez en mars 1869, remplacé par Georges Boulogne, élimination de la Coupe du monde en octobre 1969.

Chypre-France 1988 à Nicosie : 1-1

Après des débuts crispants contre la Norvège au Parc en août (1-0), les Bleus arrivent à Nicosie le 22 octobre 1988 pour la deuxième étape des qualifications à la Coupe du monde 1990. L’Ecosse et la Yougoslavie sont les concurrents directs des Bleus, mais il y a deux places qualificatives.

Sur le papier, l’équipe de France a encore de l’allure, avec Bats, Amoros, Papin et Xuereb, mais le milieu Dib-Sauzée-Bravo-Passi ne tient pas la distance. Rien ne va, même après le but de Xuereb juste avant la pause. Seuls quatre tirs français trouvent le cadre, et une faute de Bravo dans la surface offre aux Chypriotes l’occasion inespérée d’égaliser sur pénalty à 12 minutes de la fin.


 

Henri Michel débarqué comme un malpropre à la Toussaint, Michel Platini se fixe comme objectif d’aller en Italie dans sa gabardine de sélectionneur. Mais les Bleus perdent en novembre à Belgrade (2-3), en mars 1989 à Glasgow (0-2) et arrachent un 0-0 bien payé aux Yougoslaves en avril au Parc. Le nouveau nul à Oslo contre la Norvège en septembre (1-1) éliminera définitivement l’équipe de France, qui battra pour des prunes l’Ecosse (3-0) et Chypre (2-0) à l’automne avant de finir troisième.

Conséquences : Limogeage d’Henri Michel le 1er novembre, remplacé par Michel Platini, élimination de la Coupe du monde en septembre 1989.

France-Israël 1993 à Paris : 2-3

Après un début raté à Sofia (défaite 0-2), les Bleus enchaînent six victoires en Israël, contre l’Autriche et la Finlande (deux fois) et un nul en Suède. Une victoire lors des deux derniers matchs à domicile suffit pour aller aux Etats-Unis.

Le 13 octobre, des Bleus beaucoup trop confiants et minés par des conflits internes (entre Marseillais et Parisiens) que le sélectionneur n’arrive plus à gérer se font piéger une première fois par un but surprise de Ronen Harazi. Ils prennent l’avantage avant la mi-temps grâce à Sauzée et Ginola et vendangent à qui mieux mieux après la pause. Mauvaise idée : Berkovitch égalise à la 83e alors que Desailly s’embronche sur la ligne de but et entraîne avec lui le ballon qu’il avait d’abord contré, et Atar porte l’estocade à la 93e après encore une erreur de Desailly. Pour l’anecdote, sept des treize tricolores participant au match seront champions du monde quatre ans et huit mois plus tard (Lama, Desailly, Lizarazu, Blanc, Petit, Deschamps et Djorkaeff).


 

Un nul suffirait contre la Bulgarie un mois plus tard, mais le scénario invraisemblable va se répéter, avec un doublé de Kostadinov (1-2), le but victorieux étant inscrit dans les dernières secondes du temps additionnel.

Conséquences : Démission de Gérard Houllier le 25 novembre et nomination d’Aimé Jacquet, élimination de la Coupe du monde 1994.

France-Israël 2004 à Saint-Denis : 0-0

Ce 4 septembre, Raymond Domenech officie pour la première fois sur le banc des Bleus à Saint-Denis, après un nul à Rennes contre la Bosnie (1-1). Dans un groupe à six composé de la Suisse, de l’Irlande, de Chypre et des Féroé, les Bleus accueillent pour commencer Israël, une vieille connaissance à eux. Orphelins de Zidane, Thuram, Desailly ou Lizarazu, les coéquipiers de Henry ne trouvent pas la brèche (0-0).


 

La suite sera aussi poussive, avec deux autres 0-0 contre l’Irlande et la Suisse et un nul en Israël (1-1), à peine améliorés par des victoires à Chypre (2-0) et aux Féroé (2-0). Il faudra le retour de Zidane, Thuram et Makelele pour voir les Bleus se qualifier enfin avec des succès contre les Féroé (3-0), en Irlande (1-0) et contre Chypre (4-0), avec encore un nul en Suisse (1-1).

Conséquences : aucune.

France-Biélorussie 2010 à Saint-Denis : 0-1

Comme Raymond Domenech six ans plus tôt, Laurent Blanc commence par une contre-performance à domicile, après une défaite amicale en Norvège en août (1-2). Le match du 3 septembre contre la Biélorussie, dont on ne sait pas grand chose, sent le piège à plein nez. Avec une équipe inexpérimentée dont Malouda est le capitaine, les Bleus butent sur Zhevnov et les entrées de Saha, Gameiro et Valbuena n’y changent rien. Ils se font même piéger à quatre minutes de la fin par un slalom de Gleb dans la surface qui sert Kysliak dont la reprise en force trompe Lloris.


 

Le groupe à six avec la Roumanie, la Bosnie, le Luxembourg et l’Albanie est toutefois à la portée des Bleus qui enchaînent une série de 21 matches sans défaite. Ils battent deux fois l’Albanie et le Luxembourg, prennent quatre points contre la Roumanie et la Bosnie et sont encore accrochés par la Biélorussie au retour (1-1). Suffisant pour se qualifier pour l’Euro 2012.

Conséquences : aucune.

Pour conclure

Si stupéfiantes qu’aient été ces contre-performances, aucune d’entre elles n’a été directement fatale aux Bleus dans la course à la qualification. Les trois fois où ils ont été éliminés, c’est lors des matchs suivants, et en 2004 et 2010 l’échec initial a servi de leçon pour la suite. Autrement dit, si l’équipe de France laisse filer la première place du groupe A cette année, ce sera parce qu’elle aura raté le match de Sofia ou le dernier à Saint-Denis. Après le nul contre le Luxembourg, elle a encore toutes les cartes en main.

Entre 1904 et 1919, 128 internationaux ont porté au moins une fois le maillot de l’équipe de France. Si leur carrière internationale est la plupart du temps anecdotique, leur vie est souvent romanesque.

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Hommage à Pierre Cazal