Classer les 20 meilleurs joueurs de l’histoire est un jeu amusant mais complexe, voire impossible : s’il peut être pertinent de comparer deux joueurs poste pour poste à un instant donné (c’est après tout ce que fait le sélectionneur), évaluer les valeurs respectives d’un gardien et d’un avant-centre, ou d’un joueur de 1930 et d’un autre de 2018 est un exercice contestable, puisque les critères sont très différents. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas s’y essayer, avec toutes les réserves possibles.

Pour affiner un peu le travail, j’ai imaginé quatre critères qui pourraient être relativement communs aux différentes époques et aux différents postes occupés (ces derniers pouvant d’ailleurs varier au fil d’une carrière, comme Griezmann par exemple, qui a été successivement ailier droit, attaquant de soutien ou meneur de jeu axial derrière trois attaquants.

Embed from Getty Images

Un petit truc en plus

Ces quatre critères sont l’impact, le palmarès, le caractère unique et l’image globale. L’impact est l’importance prise par le joueur dans l’équipe, aussi bien techniquement, tactiquement que psychologiquement. Le palmarès est le moins subjectif, puisqu’il donne un avantage déterminant aux champions du monde sur les champions d’Europe et sur ceux qui n’ont pas atteint de finale internationale. Le caractère unique, c’est ce petit truc en plus qui va caractériser le joueur parmi ceux qui l’ont précédé ou suivi au même poste. Et enfin, l’image globale est celle donnée sur le terrain et en dehors : ce qui a pénalisé Zidane ou Henry, voire Barthez. Chaque critère est noté de 1 à 5, sachant qu’aucun joueur du top 20 n’a moins de 3, et que tous ont au moins un 5.

Un cinquième critère n’apparaît pas ici : c’est le fait d’avoir terminé sa carrière internationale. Ne cherchez donc pas Kylian Mbappé ou Ousmane Dembélé, par exemple, ils n’y sont pas : A 26 et 28 ans, ils ont encore le temps de progresser et d’entrer dans le top 20 (pour le second) ou d’approcher le top 5 (pour le premier).

Enfin, un dernier critère entre en compte : diversifier les époques afin d’éviter une surreprésentation des champions du monde 1998 et 2018 au détriment de la période Platini, des années 1950, voire de l’avant-guerre.

Cette dataviz radar permet de trier les joueurs du top 20 non seulement par le cumul des notes obtenues dans les quatre critères (cinq points pour chaque, donc vingt possibles au total), mais aussi par périodes (via le filtre déroulant) et par postes : il y a deux gardiens, six défenseurs, cinq milieux et sept attaquants.

Embed from Getty Images

Platini, Zidane et Griezmann devant

Le trio de tête devrait normalement faire consensus : Platini, Zidane et Griezmann ont été à la fois très impactants, avec des profils uniques, une image forte et un palmarès riche. Il peut évidemment y avoir débat sur l’ordre (en tout cas des deux premiers), et on peut discuter de la logique de privilégier le seul des trois qui n’a pas été champion du monde, et n’a même pas atteint la finale de cette compétition.

Embed from Getty Images

Quatre très grands au pied du podium

Kopa, Henry, Giresse et Fontaine arrivent selon moi après. Le Ballon d’or 1958 paie le fait de n’avoir rien gagné en sélection, à une époque, il est vrai, où l’équipe de France était loin d’être favorite, et a été dépassé par Griezmann. Après un début fulgurant, Henry a connu quatre dernières saisons décevantes et a gâché sa sortie, entre la main contre l’Irlande et une Coupe du monde 2010 hors sujet. Giresse aurait pu prétendre à mieux s’il s’était révélé en sélection bien avant ses 28 ans. Pour Fontaine, c’est l’inverse, puisque sa carrière internationale s’est éteinte à 27 ans, alors qu’il aurait certainement pu faire beaucoup mieux sans ses deux graves blessures mal soignées.

Embed from Getty Images

Viennent ensuite trois champions du monde 1998 : Barthez, Deschamps et Thuram, accompagnés de Bossis et Lloris. Hormis le défenseur nantais, ils ont en commun un palmarès XXL, et un double record de sélections et de capitanat pour Lloris. Ils ont marqué l’histoire du football français, sans pour autant jouer un rôle de premier plan. Mais sans eux, sans doute, rien n’aurait pu être possible.

Carrières contrariées

Papin, Giroud et Trésor ont aussi laissé une trace durable, même si le premier est passé à côté d’une carrière plus grande encore, mais il est mal tombé, entre la fin de la génération Platini et le début de celle de Zidane. Le second a démarré tard (à 25 ans, après être passé par le National), mais il a fini plus tard encore (37 ans et 8 mois) et a pulvérisé le record de buts de Henry. Le dernier a manqué l’apothéose de la génération Hidalgo en étant forfait pour l’Euro 84, mais il reste pour toujours un des héros de Séville, avec un art consommé pour marquer des buts qui impriment la rétine.

Embed from Getty Images

Les cinq derniers de ce top 20 se sont tous illustrés en Coupe du monde : trois l’ont gagnée (Desailly, Trezeguet et Varane), un y a brillé en 1958 (Piantoni) et un autre a participé aux trois premières de l’histoire (Mattler).

Bien sûr, il y a autant de listes possibles que de supporters-trices des Bleus, et à l’intérieur d’une même liste, un grand nombre de classements possibles. Vous chercherez certainement des noms qui n’y sont pas, comme Eric Cantona, Karim Benzema, Jean Vincent, Franck Ribéry, Paul Nicolas, Eugène Maës, Larbi Ben Barek, Joël Bats, Bixente Lizarazu ou Georges Bereta. Mais on pourrait dire que ces noms qui viennent spontanément pourraient arriver juste après, et intégrer un top 30.