Le contexte historique
1972 est une année lourde au plan international, avec le carnage des Jeux olympiques de Munich (18 morts suite à la prise d’otages d’athlètes israéliens par des Palestiniens). Cet aussi cette année-là, en juin, que commence l’affaire du Watergate qui fera chuter le président Nixon en 1974. Au Vietnam, alors que la guerre touche à sa fin, des bombardements intenses ravagent le pays jusqu’en octobre. En France, le premier ministre Jacques Chaban-Delmas est remplacé par Pierre Messmer, un ancien parachutiste, en juillet. C’est la fin du projet de la Nouvelle société.
Les Rolling Stones sortent leur premier double album très marqué par le blues, Exile on Main Street, pendant que deux monstres sacrés de la chanson française proposent leur avant-dernier opus : Georges Brassens avec Fernande et Jacques Brel avec Ne me quitte pas. Au cinéma, Francis Ford Coppola sort Le Parrain avec Marlon Brando et Al Pacino, tandis que Luis Bunuel est à l’affiche avec Le charme discret de la bourgeoisie.
Le contexte sportif
L’année 1972 est marquée par la domination sans partage de l’Ajax d’Amsterdam malgré le départ de Rinus Michels (pour Barcelone), remplacé par le Roumain Stefan Kovacs. Les Hollandais, emmenés par Johan Cruyff, remportent une deuxième coupe d’Europe des champions face au Milan AC. En France, doublé également pour l’Olympique de Marseille : coupe et championnat avec le meilleur duo d’attaque de son histoire, Josip Skoblar-Roger Magnusson.
Le sélectionneur en poste : Georges Boulogne
Nommé en mars 1969, il vient d’échouer à qualifier les Bleus pour la coupe d’Europe des Nations 1972 après une défaite fatale à Sofia en décembre 1971. C’est un nouvel échec pour la fédération française, après l’absence au mundial mexicain de 1970. Du coup, l’année 1972 qui se présente ne sera composée quasiment que de rencontres amicales, hormis les deux dernières à l’automne (qualifications de la coupe du monde 1974). Celui qui a initié la formation à la française, qui portera ses fruits quatre ans plus tard (il a aussi contribué à mettre en place l’Institut national du football, qui ouvre ses portes à Vichy en 1972), a donc du temps pour faire des essais.
Le récit de l’année
Avec cinq victoires, un nul et deux défaites, 1972 est très bien placée au classement général avec une flatteuse 17e place (mieux que 1998 !). Il faut évidemment pondérer ce résultat en précisant que quatre des cinq matches gagnés étaient des amicaux, et qu’hormis le succès face à l’URSS en octobre, les adversaires n’avaient rien de foudres de guerre.
année | joués | G | % G | N | % N | P | % P | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
14 | 1995 | 8 | 5 | 63% | 3 | 38% | 0 | 0% |
15 | 1997 | 8 | 5 | 63% | 2 | 25% | 1 | 13% |
16 | 1993 | 8 | 5 | 63% | 1 | 13% | 2 | 25% |
17 | 1972 | 8 | 5 | 63% | 1 | 13% | 2 | 25% |
18 | 1952 | 8 | 5 | 63% | 1 | 13% | 2 | 25% |
19 | 1953 | 8 | 5 | 63% | 0 | 0% | 3 | 38% |
20 | 1998 | 18 | 11 | 61% | 6 | 33% | 1 | 6% |
Classement mis à jour le 1er janvier 2012 | ||||||||
voir le classement complet |
1972 commence mal, par une défaite à Bucarest contre une triste équipe roumaine. C’est le dernier match international du capitaine Bernard Bosquier, les locaux l’emportent sans forcer face à une équipe dans laquelle un seul joueur est sorti du lot : l’arrière droit Marius Trésor, qui a évincé Jean Djorkaeff (le père de Youri). En juin, pendant que se joue la phase finale de la coupe d’Europe des Nations (remportée par la RFA face à l’URSS), l’équipe de France est au Brésil où se joue la Coupe de l’Indépendance à l’occasion des 150 ans du Brésil. Le tournoi oppose d’abord quinze équipes réparties en trois groupes de cinq, le vainqueur de chaque groupe jouant un tour final contre cinq équipes qualifiées d’office.
Les Bleus rencontrent d’abord une sélection d’Amérique centrale (CONCACAF) privée des internationaux mexicains. pour l’occasion, Dominique Baratelli fait ses débuts dans les cages, et Hervé Revelli se fait plaisir avec un triplé dans la dernière demi-heure (5-0). Le deuxième match, face à une sélection d’Afrique, est plus délicat. C’est la première fois dans l’histoire que les Bleus rencontrent une équipe africaine et la victoire est serrée (2-0). Contre la Colombie, nouvelle petite victoire avec une équipe très jeune dans laquelle Jean-Pierre Adams est titulaire pour la première fois (3-2) au milieu de terrain. La dernière rencontre s’achève sur un bon match nul face à l’Argentine (0-0) qui compte dans ses rangs le défenseur Oswaldo Piazza et l’attaquant Carlos Bianchi, mais ce n’est pas suffisant pour jouer le second tour.
En septembre, l’équipe de France obtient une victoire facile à Athènes contre une faible sélection grecque (3-1), au cours de laquelle Jean-Michel Larqué fait deux passes décisives pour Henri Michel et Hervé Revelli avant de marquer lui-même à la dernière minute. Les choses sérieuses commencent enfin en octobre, avec la venue de l’URSS au Parc des Princes inauguré quelques mois plus tôt. Les Bleus jouent prudemment avec deux attaquants seulement, mais ce sont eux qui dominent, se créent les meilleures occasions et finissent par marquer par Bereta à l’heure de jeu (1-0). C’est bien parti pour la qualification de 1974, d’autant que la France est dans un groupe à trois équipes (avec l’Eire), où le moindre faux-pas est interdit.
A Dublin le 15 novembre, les Bleus commencent par encaisser un but suite à un tir sous la barre de Conroy, le ballond franchissant la ligne avant de ressortir. Ils parviennent à égaliser par Molitor, mais encaissent un but casquette sur une erreur de défense et s’inclinent 2-1. Autant dire qu’il faudra maintenant battre les Irlandais et aller chercher un nul à Moscou en 1973 pour espérer aller en Allemagne.
Les joueurs de l’année
En cette année 1972, Georges Boulogne n’appelle que 23 joueurs en 8 matches, ce qui est très peu. D’ailleurs, seuls deux d’entre eux ne jouent qu’une fois, Jean-Noël Huck et Serge Chiesa. Trois nouveaux joueurs seulement sont convoqués (alors que l’année ne compte presque que des matches amicaux) : le gardien niçois Dominique Baratelli, le milieu Jean-François Jodar et le défenseur central Jean-Pierre Adams. Le seul joueur à avoir disputé toutes les rencontres est pourtant un débutant : Marius Trésor, qui avait été appelé la première fois à la fin 1971.
Avec lui, la base de l’équipe de Boulogne est composée du gardien Georges Carnus, des défenseurs Claude Quittet, Jean-Pierre Adams et Jean-Paul Rostagni, des milieux Henri Michel, Jean-Michel Larqué et des attaquants Georges Bereta et Georges Lech (c’était l’année des Georges). Ces dix joueurs ont tous participé à au moins six rencontres. On pourrait y ajouter les attaquants Charly Loubet et Louis Floch qui ont disputé cinq matches, dont trois comme remplaçants. Bernard Blanchet, Jean Djorkaeff, Jacky Novi et Bernard Bosquier mettent quant à eux un terme à leur carrière internationale. Avec eux, c’est la page des années soixante qui se tourne.
Les buteurs de l’année
Grâce à son triplé au Brésil contre la CONCACAF, Hervé Revelli a marqué quatre buts en 1972. Jean-Michel Larqué en compte deux, tout comme Charly Loubet et Georges Bereta. Blanchet, Floch, Molitor et Michel complètent le tableau d’une année plutôt prolifique (15 buts en 8 matches).
La révélation de l’année
Dominique Baratelli a 24 ans quand il est appelé par Georges Boulogne en juin 1972. Il a pourtant déjà joué un match avec les Bleus en 1969 contre la Hongrie (2-2), mais il ne comptait pas pour une sélection officielle. Le gardien de l’OGC Nice mettra en concurrence Georges Carnus (dont la carrière internationale s’achèvera en mai 1973) avant de perdre sa place en 1977. Il sera toutefois retenu pour deux coupes du monde, en 1978 (deuxième gardien, il remplace Jean-Paul Bertrand-Demanes contre l’Argentine) et en 1982 (troisième gardien derrière Ettori et Castaneda, il sera le seul de la liste à ne pas jouer). Il compte 21 sélections en équipe de France.
Carnet bleu
1972 restera une des meilleures années en terme de naissances bleues (avec 1955 et 1987) : on y trouve Lilian Thuram (1er janvier), Christophe Dugarry (24 mars), Zinédine Zidane (23 juin), Ulrich Ramé (19 septembre), Alain Goma (5 octobre), Frédéric Déhu (24 octobre), Cyrille Pouget (6 décembre), Richard Dutruel (24 décembre) et Grégory Coupet (31 décembre). Même si le deuxième semestre n’arrive pas à la hauteur du premier (et de ses trois champions du monde), le total est impressionnant.
Cette année-là disparaissent Lucien Gamblin (né en 1890), Maurice Cottenet (1895), Jules Monsallier (1907), Roger Courtois (1912) et François Bourbotte (1913).