Il est fort probable que l’équipe de France a conservé une place à part dans l’esprit d’Antonín Panenka. C’est contre les Bleus que le milieu de terrain tchécoslovaque a inscrit son premier but international, et aussi contre la France qu’il a inscrit le dernier. Il n’a certes remporté qu’une seule victoire en quatre rencontres contre les Bleus, mais ce fut une victoire décisive, ponctuée par un de ces penalties qui ont fait sa légende.
Bertrand-Demanes à Prague
C’est contre l’Ecosse, en septembre 1973, que le jeune milieu de terrain des Bohemians de Prague honore sa première sélection en équipe de Tchécoslovaquie. Une défaite 2-1 qui compromet la participation de son équipe à la Coupe du Monde 1974. Sept mois plus tard, le 27 avril 1974, à l’occasion de sa sixième sélection, il marque contre l’équipe de France le premier but de sa carrière internationale et permet à son équipe d’arracher un match nul (3-3).
En ce début de printemps à Prague, les Tricolores de Stefan Kovacs ouvrent le score dès la septième minute par Serge Chiesa, puis doublent la mise à la 28e par Bernard Lacombe. Mais comme souvent à cette époque, les Français cèdent mentalement et voient leurs adversaires inscrire deux buts en deux minutes (33e et 34e). En seconde période, les Tchécoslovaques obtiennent un penalty. Ce n’est pas (encore) Panenka qui les tire, mais son coéquipier Přemysl Bičovský, lequel envoie sa tentative au-dessus (63’). L’équipe de France saisit l’opportunité en prenant l’avantage sur un nouveau but de Lacombe (72’). C’est à quatre minutes de la fin que surgit Antonín Panenka, lequel, à la réception d’une passe de Zdeněk Nehoda, bat Jean-Paul Bertrand-Demanes d’une puissante frappe.
Deux ans plus tard, les équipes de France et de Tchécoslovaquie se retrouvent au Parc des Princes. C’est la première rencontre des Bleus que dirige Michel Hidalgo et celle où débutent quelques jeunes ayant pour nom Bossis, Six et Platini. Mais Panenka n’a pas été retenu pour cette rencontre. La France concède un match nul (2-2) face à une équipe invaincue depuis quatorze rencontres et qui le restera encore de longs mois [1].
Au passage, le 20 juin 1976, elle décroche à Belgrade le titre de championne d’Europe des Nations au nez et à la barbe des favoris ouest-allemands. Cette finale s’est décidée aux tirs au but, un exercice encore assez rare à l’époque, mais où s’est illustré Antonín Panenka, inscrivant le tir au but décisif d’une frappe piquée dont il s’est fait une spécialité [2].
Dropsy à Bratislava
Cette finale de la cinquième Coupe d’Europe des Nations avait été diffusée par de nombreuses télévisions à travers l’Europe, à l’exception notable de la France. Et peut-être cette négligence a-t-elle eu un impact sur la rencontre Tchécoslovaquie-France du 4 avril 1979. En ce début de printemps à Bratislava, les deux équipes sont opposées dans le cadre des éliminatoires du Championnat d’Europe, épreuve dont les Tchécoslovaques sont les tenants. A la 68e minute, alors que les deux équipes sont à 0-0, un penalty est accordé par M.Aldinger pour une faute de Specht sur Masny.
C’est bien entendu Antonin Panenka qui se charge de le tirer. Dominique Dropsy, le gardien de but français, sait-il vraiment comment l’homme qui lui fait face tire ses penalties ? Peu probable. Le gardien strasbourgeois plonge sur sa droite et voit le ballon passer doucement au dessus de lui, sans qu’il ne puisse intervenir. Dans leur cabine, les commentateurs français sont dubitatifs. Thierry Roland pense que le ballon a touché le poteau, Bernard Père se penche sur le ralenti... où les deux hommes découvrent cette frappe qui les laisse sans voix. La France s’inclinera finalement 2-0, František Štambachr ayant administré une frappe lointaine aussi lourde que soudaine cinq minutes après l’ouverture du score.
Cette défaite à Bratislava donne un avantage aux tenants du titre pour la qualification à la phase finale de l’Europeo italien. Si bien que lorsque les deux équipes se retrouvent au Parc des Princes le 17 novembre 1979, la rencontre ne représente quasiment aucun enjeu (Une victoire placera bien les Bleus en tête du groupe, mais il reste aux Tchécoslovaques à jouer une rencontre à domicile face au Luxembourg...). La France s’impose grâce à ses buteurs nantais Pécout et Rampillon. Panenka est présent sur la pelouse mais c’est son coéquipier Ján Kozák qui réduit l’écart en fin de rencontre. C’est la seule fois de sa carrière où Panenka ne marque pas contre l’équipe de France.
Ettori à Valladolid
France et Tchécoslovaquie se retrouvent en juin 1982 à Valladolid au premier tour de la Coupe du Monde espagnole. Le match est décisif : son vainqueur est qualifié pour le second tour. En cas de match nul, c’est la France qui passe. Panenka, 34 ans, est sur le banc. Titulaire lors du premier match, il n’a pas joué le suivant. L’équipe tchécoslovaque donne du fil à retordre aux Français. A la 66e minute d’un match très crispant, Didier Six ouvre le score en poussant un ballon que n’a pu arrêter le gardien Karel Stromšík sur un tir de Bernard Lacombe.
Les Bleus jouent la peur au ventre. Panenka fait son apparition quatre minutes après le but français en remplacement de l’avant-centre Petr Janečka. Très actif, on le voit courir, faire les touches, tirer les corners, tenter un tir de loin et même prendre un carton jaune après avoir fauché Platini près de la ligne médiane. Blessé, Platini devra déclarer forfait pour le match suivant. Michel Hidalgo le remplacera numériquement par Tigana. L’association de ce dernier avec Giresse et Genghini sera un tel succès que le sélectionneur n’osera pas la modifier quand Platini sera rétabli. Il associera donc les quatre hommes au milieu de terrain, constituant son fameux carré magique. Dont Antonin Panenka, finalement, est à l’origine.
A six minutes de la fin, Maxime Bossis fait tomber Masny das la surface et l’arbitre italien M. Casarin accorde un penalty aux Tchécoslovaques. Inutile de préciser qui va le tirer. Jean-Luc Ettori, le gardien français, reste sur ses gardes, mais il n’ignore pas que Panenka tire désormais ses penalties de manière conventionnelle. Contre le Koweït, sept jours plus tôt, il avait transformé un penalty d’une frappe à ras de terre au pied du poteau gauche. Contre la France, il choisit de tirer à mi-hauteur sur le côté droit, avec la même efficacité. Il reste ensuite cinq minutes pour bousculer une équipe de France aux abois. Dans les dernières secondes, un tir flottant de Bičovský échappe à Ettori, mais il est est repoussé par Amoros sur sa ligne.
Cette rencontre (1-1) marque la fin d’une vieillissante génération tchécoslovaque. C’est la 59ème et dernière sélection d’Antonin Panenka, qui a donc inscrit son 17ème et dernier but. Il a d’ailleurs été, en 110 minutes de présence sur le terrain, le seul buteur tchécoslovaque de ce mundial espagnol.
L’ancien joueur des Bohemians Prague poursuit sa carrière au Rapid Vienne. Il marque encore de nombreux buts dans le championnat autrichien, mais également en Coupe d’Europe. En septembre 1983, il élimine quasiment à lui tout seul le FC Nantes du premier tour de la Coupe des Clubs Champions, en inscrivant trois buts (deux au match aller, un au retour) à un certain Jean-Paul Bertrand-Demanes, celui-là même contre qui il avait inscrit son premier but international.
4 matchs, 3 buts, 2 penalties, 1 victoire
Sel. | Date | Match | Lieu | Equipe | score | Notes |
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6e | 27/04/1974 | Amical | Prague | Tchécoslovaquie | 3-3 | But (86’, 3-3) |
30e | 04/04/1979 | qEuro | Bratislava | Tchécoslovaquie | 0-2 | But (68’ penalty, 1-0) |
36e | 17/11/1979 | qEuro | Paris | Tchécoslovaquie | 2-1 | |
59e | 24/06/1982 | CM T1 | Valladolid | Tchécoslovaquie | 1-1 | But (84’ penalty, 1-1) |