2001, une année dans le siècle

Publié le 11 décembre 2011 - Bruno Colombari

C’est l’année du 11 Septembre que les Bleus ont battu leurs records de distance en avion, avec des voyages au Japon, en Australie et au Chili. C’est aussi en 2001 qu’ils ont disputé le match le plus court de l’histoire contre l’Algérie. Et qu’ils ont sans doute atteint un sommet contre le Portugal.

6 minutes de lecture

Le contexte historique

JPEG - 58.3 kioL’année 2001 restera bien sûr dans l’histoire pour une date, le 11 septembre, jour de l’attaque de quatre commandos terroristes contre les Etats-Unis. Mais le sort de l’Afghanistan s’est sans doute joué deux jours plus tôt avec l’assassinat du commandant Massoud, bien avant l’offensive menée par les Etats-Unis en octobre et novembre 2001. En Algérie, des émeutes violemment réprimées éclatent en Kabylie avant qu’une coulée de boue et des inondations ne fassent 900 morts en novembre.

En France, la précampagne présidentielle prend le virage de l’insécurité qui amènera Le Pen au second tour en 2002. Le 21 septembre, l’explosion de l’usine AZF à Toulouse fait 30 morts. Charles Trenet meurt à 87 ans. Fred Vargas publie son roman sur la peste, Pars vite et reviens tard, Marjane Satrapi présente le deuxième tome de Persepolis et David Lynch sort un film inclassable et troublant, Mulholland Drive.

Le contexte sportif

Après une année 2000 riche en émotions, les Bleus se retrouvent, comme en 1983 et en 1997, avec une année peuplée de matches amicaux et d’un tournoi sous-côté (la coupe des Confédérations). Avec une différence de taille : l’équipe de France est désormais la meilleure du monde, et doit supporter le statut de grand favori pour l’édition 2002. Le football de clubs, lui, n’est pas au mieux : ni Lyon, ni le PSG, ni le champion de France Monaco ne sortent de la phase de poules alors que le FC Nantes de Raynald Denoueix survole le championnat.

Le sélectionneur en poste

Champion d’Europe l’année précédente, Roger Lemerre est toujours en froid avec la presse, mais il faut mettre à son crédit un jeu beaucoup plus offensif qu’auparavant : depuis l’Euro, le dispositif des Bleus s’oriente vers un 4-2-3-1 avec Zidane dans l’axe, Pires (ou Wiltord) et Henry (ou Dugarry) sur les côtés, et Trezeguet (ou Anelka) en pointe. Sous son impulsion, l’équipe de France a gagné en créativité ce qu’elle a perdu en solidité défensive, les départs de Deschamps et Blanc n’ayant pas été vraiment remplacés. L’échec du lancement massif des nouveaux à la Coupe des confédérations poussera le sélectionneur à éliminer progressivement toute concurrence chez les titulaires.

Le récit de l’année

Pas de doute, au bilan carbone, l’année 2001 a été désastreuse pour l’équipe de France. Après cinq premiers mois à pantoufler à la maison, Roger Lemerre est subitement pris d’une envie d’ailleurs et se met à collectionner les miles : un petit tour en Corée du Sud et au Japon pour la coupe des Confédérations, un autre en septembre (juste avant le 11) au Chili, et pour faire le tour de la question en même temps que de la planète, une virée aux antipodes, en Australie en novembre. Soit près de soixante-dix mille kilomètres, sans compter le déplacement beaucoup plus court à Valence.

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L’année commence donc par un match de prestige face à l’Allemagne qui sort de deux phases finales décevantes en 1998 (quarts) et 2000 (premier tour). Les coéquipiers de Ballack sortent la machine à baffes et limitent les dégâts à un but rapide de Zidane (1-0). Un mois plus tard, c’est le Japon qui se présente à Saint-Denis. Zidane marque encore sur pénalty, accompagné par les attaquants Wiltord, Henry et Trezeguet (doublé) : 5-0, l’addition est salée pour les futurs organisateurs de la coupe du monde 2002.

Avant d’affronter l’Espagne à Valence, les Bleus se voient peut-être plus beaux qu’ils ne le sont : la presse espagnole titre avant le match « Champions de tout contre champions de rien » (les choses ont bien changé depuis). Avec Letizi dans les cages, l’équipe de France est dominée et battue (2-1), pour la troisième fois seulement depuis son titre mondial.

Dommage pour le Portugal, qui vient au stade de France avec une grosse envie de revanche : les cicatrices de la demi-finale de Bruxelles à l’Euro ne sont pas encore fermées. Le suspens dure un quart d’heure, le temps que Wiltord trompe Quim. Mais c’est à la demi-heure de jeu que les Bleus vont monter le niveau d’un ou deux crans : au terme de cinq corners consécutifs, Mikaël Silvestre marque du gauche sur une remise de Henry. Et moins d’une minute plus tard, c’est une vertigineuse série de passe à dix qui ouvre le chemin du troisième but à Henry. Youri Djorkaeff mettra le point final à un quart d’heure de la fin (4-0) parachevant ce qui restera sans doute comme la plus éblouissante démonstration des champions du monde (lire l’article 25 avril 2001 : France-Portugal).

Un mois plus tard, Roger Lemerre emmène son équipe en Corée du Sud pour disputer la coupe des confédérations. Une équipe-bis qui concentrera en cinq matches l’essentiel des essais du sélectionneur en quatre ans. Barthez, Zidane, Thuram, Henry, Trezeguet et Petit ne sont pas là, et Coupet, Landreau, Gillet, Camara, Bréchet, Dacourt, Carrière et Née font leurs débuts. Après une victoire large et facile (5-0) contre la Corée du Sud (histoire de ne pas faire de jaloux avec le Japon), Roger Lemerre change ses onze titulaires contre l’Australie. Mauvaise pioche, défaite surprise (0-1, la deuxième de l’année pour la première fois depuis 1993) et retour au classique contre le Mexique (4-0, doublé d’Eric Carrière).

La demi-finale est un France-Brésil en solde car si les Bleus jouent avec l’équipe B, les Auriverde alignent plutôt une sélection C peuplée d’inconnus. Marcel Desailly marque le but de la victoire en deuxième période (2-1) et gagne le droit d’aller tester le stade de la finale de la coupe du monde, à Yokohama, contre le Japon. Prévenus, les hôtes sont beaucoup plus prudents qu’en mars et il faudra une tête astucieuse de Vieira pour assurer une courte victoire (1-0) et un troisième titre en trois ans.

Le match amical du mois d’août, à Nantes contre le Danemark, est l’occasion pour Zidane de tester son tout nouveau crâne rasé (1-0). Qualifiés d’office pour 2002, les Bleus continuent donc leur tournée mondiale inaugurée un an plus tôt à Johannesbourg. Au Chili, le 1er septembre, Ivan Zamorano, surnommé l’hélicoptère, fête sa dernière sélection en beauté et contribue largement au succès des siens (2-1). En six mois, l’équipe de France a perdu autant de matches que lors des trois années précédentes et montre une singulière incapacité à se remettre en question.

Arrive alors le 6 octobre ce qui devait devenir un match historique, le premier France-Algérie, dont la ministre des sports Marie-George Buffet voulait faire une grande fête. Mais dans le contexte irrespirable de l’après 11-Septembre, la fête tourne court, à tous les sens du terme : la Marseillaise est copieusement sifflée, et à la 76e minute, alors que les Bleus mènent 4-1, le terrain est envahi par un, puis deux, puis dix, puis plusieurs centaines de jeunes. L’arbitre portugais Gomes Costa renvoie tout le monde au vestiaire, et la FIFA valide le résultat de ce qui restera le match officiel le plus court de l’histoire des Bleus.

Le 11 novembre, l’équipe de France bat un nouveau record, celui du match le plus loin à Melbourne, contre l’Australie. Intérêt sportif nul, nouvelle distribution de coups (notamment un attentat de Muscat sur Dugarry), et un partout au final, Trezeguet ayant répondu à Moore. Impériaux contre le Portugal, les Bleus n’auront donc pas réussi à battre l’Australie en deux matches, et auront été trois fois au tapis.

Les joueurs de l’année

Treize matches, dont huit amicaux et cinq avec une quasi-équipe réserve : il était inévitable que Roger Lemerre fasse tourner l’effectif en 2001. Avec 35 joueurs convoqués, ce fut le cas, même si la coupe des confédérations y compte pour beaucoup, avec huit débutants testés. Trois joueurs seulement ont participé à tous les matches : Vieira, Pires et Wiltord, ce dernier étant cinq fois remplaçant. Marcel Desailly, promu capitaine (12 matches) et Bixente Lizarazu (10) complètent le haut du tableau.

Les autres cadres ont été plutôt ménagés : Lebœuf (9), Zidane (8) , Petit, Henry et Trezeguet (7), Barthez (5) ne se déplacent que pour les grandes occasions. Nicolas Anelka, au contraire, n’a quasiment joué que lors de la coupe des Confédérations. On remarque enfin la présence parmi les dix plus sélectionnés du défenseur Mikaël Silvestre, un des débutants de l’année (9 sélections dont cinq comme titulaire).

Les buteurs de l’année

Avec cinq buts en sept matches joués, David Trezeguet se rend petit à petit indispensable après une année 2000 marquée par son coup d’éclat en finale de l’Euro. Il est titularisé pour les trois derniers matches de l’année et deviendra le premier choix de Lemerre en Corée du sud. Derrière lui, Sylvain Wiltord fait presque aussi bien (4 buts), suivi de près par le duo Henry-Pires (3). Carrière, Zidane, Djorkaeff et Vieira ont pour leur part marqué deux fois chacun.

La révélation de l’année

Faire sa place dans un groupe aussi hermétique que celui des champions du monde et d’Europe n’était pas une mince affaire. A 23 ans et demi, le défenseur de Manchester United Mikaël Silvestre est appelé pour la première fois contre l’Allemagne en février 2001, où il remplace Marcel Desailly. Après le départ de Laurent Blanc, il y a des places à prendre en défense centrale, d’autant que Franck Lebœuf n’offre pas toutes les garanties. Buteur dès sa quatrième sélection contre le Portugal, Silvestre jouera dix des treize rencontres cette année-là, gagnant au passage sa place pour la coupe du monde. La suite sera beaucoup moins glorieuse, mais il sera présent encore à l’Euro 2004 et à la coupe du monde 2006, et comptera 40 capes.

Carnet bleu

Max Charbit (né en 1908, 4 sélections en 1934 et 1935) est mort en 2001. Les internationaux nés cette année-là sont encore à l’école primaire, et Arsène Wenger les surveille.

Portfolio

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