Si 2015 n’a compté que des matches amicaux et aucun nul, elle aura engendré beaucoup de buts dans les deux sens (17 marqués, 12 encaissés). 29 buts, c’est un total élevé, surtout pour une année à 10 matches. Il y en avait eu 40 en 2014, mais pour 15 matches joués. Et 39 en 2006 (17 matches). La plus prolifique dans l’histoire récente est 2000 (54 buts en 17 matches) devant 2003 (46 buts en 14 matches), 1998 (44 buts en 18 matches) et 1982 (44 en 15 matches). Le record date de 1958 avec 63 buts en seulement 13 matches (39 marqués, 24 encaissés). A la moyenne de buts par match, 2015 est à 2,9. Sur les 30 dernières années, seules 1991 (4,2), 2003 (3,3), 2000 (3,2) et 1993 (3) ont fait mieux. Avec dix matches joués ou moins, il faut remonter à 1966 pour trouver une année plus prolifique en buts (31 en dix matches).
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Quels matches sont importants ? On pourrait mettre de côté le premier (contre le Brésil, seul adversaire non-européen de l’année) et le dernier (contre l’Angleterre, joué dans un contexte émotionnel très particulier qui rend caduque toute tentative d’analyse). Les six victoires françaises de 2015 ont été acquises contre deux équipes qualifiées pour l’Euro, le Portugal et l’Allemagne (toutes deux têtes de série) ainsi que le Danemark (deux fois), l’Arménie et la Serbie. Ils se sont inclinés contre la Belgique (tête de série) et l’Albanie (qualifiée à l’Euro).
En mode panique contre la Belgique
Ce sont ces deux défaites qui inquiètent le plus. On peut bien sûr les relativiser par le fait qu’elles ont eu lieu en juin, après la fin de saison des clubs, à un moment où les joueurs ont la tête (et le reste) déjà en vacances. Mais c’était le cas aussi de leurs adversaires, et ça n’a pas empêché les Belges de se promener à Saint-Denis, dans une sorte de séance d’entraînement festive un an pile avant l’Euro. On se souviendra ainsi qu’après une première période marquée par les largesses de la défense Varane-Koscielny bien exploitées par Marouane Fellaini, la maison bleue a pris l’eau dans des proportions inquiétantes en vivant un quart d’heure en mode panique au retour des vestiaires : but de Naingollan d’un tir de 25 mètres à la 50e (0-3), pénalty de Hazard suite à une faute de Koscielny sur Witsel à la 54e (1-4), coup de billard dans la surface terminé par une frappe de Lukaku sous la barre de Lloris à la 62e.
La réduction du score par Valbuena sur pénalty entre le troisième et le quatrième but belge (1-3, 53e) n’aura été que cosmétique. Ce n’est que dans les dix dernières minutes que les Bleus vont finir par réagir, avec une tête de Lacazette repoussée par Courtois (84e), un but de Fekir suite à un une-deux avec Ntep (89e, 3-4), une frappe de Payet à l’entrée de la surface (91e, 3-4) et un tir contré de Ntep qui prend Courtois à contre-pied (92e).
Perdre de la sorte contre l’un des grands favoris à l’Euro, et qui plus est à domcile, c’est plutôt inquiétant. D’autant que si Pogba et Benzema étaient absents, Varane et Koscielny étaient bien là, et sauf blessure, il y a de fortes chances que ce soit la charnière centrale titulaire à l’Euro. S’ils viennent à croiser à nouveau la route de Hazard, Witsel, Fellaini ou Nainggolan, nul doute qu’ils se souviendront de ce qui leur est arrivé en 2015.
En mode endormi face à l’Albanie
Le manque de réaction et d’envie manifestés cinq jours plus tard à Tirana pose également question. Bien sûr, c’était le dernier match avant les vacances, mais parler d’effet de surprise à propos de l’Albanie serait abusif : en novembre 2014, déjà, les coéquipiers de Lorik Cana avaient montré aux Bleus qu’ils pouvaient les bousculer sérieusement (1-1). Trop statiques, passant systématiquement par l’arrière, maladroits sur coup de pied arrêtés, ils ont perdu pied aussi bien collectivement qu’individuellement, avec une défense centrale à nouveau fébrile, un milieu de terrain bis qui ne ressemblait à rien et un Giroud transparent devant.
L’Albanie sera présente à l’Euro en juin, c’est le profil même d’un adversaire du premier tour. Contre ce genre d’équipe, les Bleus devront hausser leur niveau de jeu et faire preuve d’autrement plus de détermination.
Les promesses offensives de l’automne
Pour autant, il n’y a pas que du négatif dans cette année 2015 qui ne compte aucun match nul. La première mi-temps contre la Serbie, en septembre, a par moments rappelé le niveau atteint contre la Suisse au Brésil en 2014, et les doublés ultrarapides de Benzema contre l’Arménie puis de Giroud au Danemark ont fait la démonstration de la puissance offensive des Bleus, même si elle n’est qu’épisodique. C’est d’ailleurs la caractéristique de l’année 2015, où l’équipe de France aura été irrégulière dans son niveau de jeu, dans son impact physique, dans son envie, dans sa rigueur défensive et dans son efficacité offensive. On pouvait s’y attendre compte tenu de l’absence d’enjeu et du fait que Deschamps semblait avoir déjà en tête son équipe préférentielle.
La victoire contre l’Allemagne, acquise certes dans un contexte dramatique qui a complètement effacé le match dans les mémoires (mais qui n’a pas affecté le jeu puisque les acteurs n’étaient pas informés de ce qui se passait hors du stade), montre que face aux champions du monde, l’équipe de France a été capable de répondre au défi, de contourner un schéma de jeu très défensif, de contenir une attaque adverse potentiellement redoutable et de compenser devant les absences de Valbuena et de Benzema.
La charnière centrale Varane-Koscielny a montré un bien meilleur visage qu’en juin, et le replacement à droite de Griezmann a ouvert des perspectives intéressantes. L’apport décisif de Lassana Diarra au milieu et l’installation d’Anthony Martial sur le côté gauche ont changé la donne au dernier trimestre. Il est d’ailleurs probable, si le duo Valbuena-Benzema n’est pas retenu pour l’Euro, que l’équipe-type que Deschamps alignera en juin prochain sera celle qui a battu l’Allemagne.
2015, répétition générale ?
Enfin, il faut se souvenir qu’en 1983 l’équipe de France avait rencontré tous ses futurs adversaires de l’Euro : le Portugal, la Belgique, la Yougoslavie, l’Espagne et le Danemark. Si l’histoire se répète, les Bleus devraient croiser l’an prochain l’Albanie, le Portugal, l’Allemagne, l’Angleterre et la Belgique. C’est possible, puisque seul le premier de la liste n’est pas tête de série et peut être rencontré au premier tour. Les quatre autres pourraient affronter la France en huitième, quart, demi et finale. Reste à déterminer dans quel ordre. Et pour quel résultat...
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