Le résultat était-il prévisible ?
Jouer les Pays-Bas est rarement une promenade de santé, à l’exception notable d’un joli 4-0 lors du dernier jour d’août 2017, un soir où Kylian Mbappé avait inscrit son premier but en sélection. Le dernier, en revanche, avait pris la forme d’une fessée édulcorée, tant ce 0-2 de Rotterdam aurait pu être beaucoup plus cuisant. Mais en ce printemps 2023, les hommes de Ronald Koeman sont arrivés à Saint-Denis en mauvais état, avec une vague de forfaits qui changeait forcément la donne. La victoire française, avec une équipe quasiment identique à celle de Lusail (parmi les titulaires, seul Maignan n’était pas à la Coupe du monde), semblait probable.
Elle l’a été dans les mêmes proportions qu’en 2017, mais acquise beaucoup plus tôt : il y a cinq ans et demi, les Bleus avaient profité de l’expulsion de Strootman pour enfoncer le clou dans le dernier quart d’heure. Là, à onze contre onze, les espaces étaient suffisamment béants dans la défense orange que les Français n’avaient qu’à accélérer un peu pour ouvrir des brèches. Evidemment, avec un 3-0 avant la moitié de la première mi-temps, l’intérêt du match s’est vite évaporé. Mais les coéquipiers de Depay, qui a vu son pénalty repoussé par Mike Maignan à la dernière minute, n’avaient pas les moyens de lutter.
L’équipe est-elle en progrès ?
Elle peut même donner des regrets, avec huit des onze titulaires de la finale contre l’Argentine (avec Lloris, Varane et Giroud en moins, Maignan, Konaté et Kolo Muani en plus). Bien sûr, l’état de forme général n’avait rien à voir avec celui de la mi-décembre, et l’intensité mise en première mi-temps par les Argentins pouvait difficilement être comparée au jeu de possession stérile et bien trop lent des Néerlandais. Mais quand ils emballent le match comme ça, les Bleus sont irrésistibles et font peser une menace énorme sur la défense adverse.
On pourra, pour ergoter un peu, regretter quelques erreurs d’inattention, comme ces trop nombreuses fautes à proximité de la surface, ce ballon dégonflé pris à la main par Tchouaméni, ou cette main, involontaire, d’Upamecano entraînant le pénalty en fin de match. Trop de cartons aussi, pas moins de quatre, largement évitables. Et un passage à vide conséquent pendant une grande partie de la deuxième période. Mais vue l’ampleur du score, c’est évidemment pardonnable.
Quels sont les joueurs en vue ?
Randal Kolo Muani surfe sur sa grande forme depuis la Coupe du monde. Il aura été omniprésent devant, dans un style plus proche de Dembélé que de Giroud, mais il aura été aussi maladroit que le premier dans la finition. Dommage.
Antoine Griezmann ne pouvait pas mieux commencer en étant à l’origine et à la conclusion de l’ouverture du score, et en tirant le coup franc entraînant le but de Upamecano. Il a un peu disparu en deuxième mi-temps, quand justement les Bleus ne tenaient plus le ballon.
Les deux centraux Upamecano et Konaté ont confirmé toutes les promesses entrevues au Qatar. Ils n’ont pas laissé passer grand chose et se sont même créé chacun une occasion de but, preuve qu’ils n’hésitent pas à monter.
Kylian Mbappé, brassard de capitaine fluo bien visible, a commencé fort en servant parfaitement Griezmann dans un beau geste altruiste, mais il a un peu trop joué seul par la suite. Ça ne l’a pas empêché de marquer un second but en fin de match, d’une frappe croisée violente.
Enfin, Mike Maignan a dégagé beaucoup d’assurance dans son jeu au pied et ses relances à la main, et il sort le pénalty de Depay. Il est bien le grand gardien annoncé.
Quels sont les joueurs en retrait ?
Adrien Rabiot n’a pas semblé au mieux au milieu, alors que Jules Koundé ne s’est presque jamais projeté vers l’avant, alors qu’il y avait la place. Devant, Kingsley Coman a touché pas mal de ballons mais n’en a pas fait bon usage, avec un déchet considérable. Et comme à chaque fois qu’il est titulaire, il est sorti avant la fin.
Quelles sont les attentes pour le prochain match ?
Il va arriver très vite, puisque 70 heures seulement séparent la fin du match de vendredi au début de celui de lundi, à Dublin contre une République d’Irlande qui n’a plus battu les Bleus depuis 1981, au moment où Didier Deschamps venait de fêter ses 13 ans. Autant dire que l’envie est immense sur l’île de corriger ces Bleus qui avaient joué un bien vilain tour aux Irlandais de Robbie Keane un soir d’automne 2009, avant de ruiner leurs espoirs de quart de finale d’Euro sept ans plus tard, mais à la régulière cette fois.
Mais il n’y a rien de mieux qu’une belle victoire pour lancer une campagne qualificative, et dans un groupe à deux qualifiés, enchaîner avec un nouveau succès à Dublin ouvrirait en grand la route de l’Allemagne, tant on n’imagine pas la Grèce ou Gibraltar voler le moindre point aux vice-champions du monde. Et avec ce 4-0 parfait face aux Pays-Bas, les Bleus s’offrent même le luxe d’une marge d’erreur, ce qui devrait leur enlever toute pression au moment d’entrer sur la pelouse de l’Aviva Stadium, dans une ambiance qu’on imagine volcanique. Il leur en faut plus pour les impressionner.