Le résultat était-il prévisible ?

Il faut toujours être prudent avec les matchs présumés faciles, comme l’avait montré le France-Luxembourg de septembre 2017 terminé par un piteux 0-0 avec même un tir adverse sur le poteau en fin de rencontre, sans oublier la double confrontation face à Andorre en 1998 et 1999 (1-0 et 2-0). Mais on se souvenait aussi qu’avant les deux dernières plus larges victoires à domicile (Azerbaïdjan 1995, 10-0 et Kazakhstan 2021, 8-0), les Bleus avaient tiré la langue pour obtenir une victoire minimaliste à l’extérieur face aux mêmes adversaires (2-0 à chaque fois).

La vérité du retour n’est pas celle de l’aller, et hier soir, Gibraltar a coulé dans des proportions bibliques et à la vitesse grand V. La cinquième minute était à peine entamée que le score était déjà de 2-0, et hormis un répit de 17 minutes en début de deuxième période, le déluge n’a pas cessé de s’abattre, jusque dans le temps additionnel.

L’équipe est-elle en progrès ?

Impossible de juger le niveau d’une équipe face à une adversité aussi faible, encore plus réduite à dix après un quart d’heure de jeu. Mais il suffit de se rappeler que ce 14-0 est le troisième score le plus large en compétition entre sélections européennes, et que les deux premiers remontent à avant la Première Guerre mondiale (Danemark 17-1 contre la France aux JO de 1908, Allemagne 16-0 face à la Russie à ceux de 1912). L’équipe de France a fait preuve de sérieux, d’envie, d’application et elle a inscrit de jolis buts comme ceux de Zaïre-Emery, Clauss, Mbappé ou Giroud.

Quels sont les joueurs en vue ?

Avec un double triplé (buts et passes décisives), Kylian Mbappé a marqué les esprits (et un neuvième pénalty, qui lui permet de rejoindre Griezmann comme meilleur buteur dans cet exercice). C’était un match où il aurait pu tenter de battre le record codétenu par Eugène Maës (1913) et Thadée Cisowski (1953), cinq buts, mais il a été très altruiste et toujours cherché des solutions de passe autour de lui. Sauf sur son dernier but, inscrit d’un lob audacieux de 42 mètres, son 300ème en carrière.

Difficile aussi d’évaluer la relation Clauss-Coman dans un contexte aussi peu concurrentiel, mais le Marseillais et le Munichois ont assurément marqué des points à Nice (et trois buts à eux deux). On ne reverra probablement ni Koundé ni Pavard dans le couloir droit, et Dembélé a du souci à se faire, même s’il a enfin marqué après son entrée.

Le quart d’heure passé sur la pelouse par Warren Zaïre-Emery a tenu toutes ses promesses et même un peu plus, puisqu’il a été le Français qui a touché le plus de ballons dans cette période, et qu’il a inscrit un très beau but au terme d’une combinaison avec Coman. Il est vraiment dommage qu’il sorte blessé à la cheville juste après, mais on aura le temps de le revoir en 2024, et les quelques semaines de repos qu’il va prendre lui feront du bien.

Olivier Giroud aurait pu inscrire un nouveau triplé en sélection, mais son premier but a été annulé par la VAR pour une position de hors-jeu pas du tout évidente, et éloignée de la fin de l’action. Il s’est rattrapé avec un doublé tardif, le premier sur une combinaison éclair avec Griezmann dans la surface, le deuxième sur un superbe ciseau retourné que les défenseurs de Gibraltar ont admiré sans réagir.

Quels sont les joueurs en retrait ?

Le fait qu’Antoine Griezmann soit l’un des quatre joueurs de champ titulaires à n’avoir pas marqué à Nice (avec Todibo, Upamecano et Théo Hernandez) est surprenant, alors qu’il est en pleine bourre avec l’Atlético cet automne. Il aura offert le treizième but à Giroud, mais même dans ce registre de passeur, il aurait pu faire mieux. Mais c’est son nouveau rôle en sélection, celui de métronome au milieu de terrain, un peu dans le style de Giresse aussi, qui marquait beaucoup en club et très peu (6 buts en 47 sélections) avec les Bleus.

Quelles sont les attentes pour le prochain match ?

Le seul enjeu de ce France-Gibraltar était d’assurer la victoire et le statut de tête de série pour le tirage au sort de l’Euro 2024, le 2 décembre prochain. Le déplacement d’Athènes mardi n’en a plus aucun, puisque les Grecs sont assurés de finir troisièmes et barragistes. L’équipe de France pourra se fixer comme objectif de finir l’année par une neuvième victoire en dix matchs, et d’étirer sa série d’invincibilité en compétition à 13 rencontres. Didier Deschamps en profitera aussi pour faire tourner son effectif, ce qui profitera sûrement à ceux qu’on n’a pas vu ou peu à Nice comme Samba, Koundé, Disasi, Saliba, Lucas Hernandez, Kamara, Dembélé et Kolo Muani. On se souvient qu’à l’aller, les Bleus avaient arraché une très courte victoire (1-0 sur pénalty). L’objectif pourrait être de faire mieux, avant quatre mois de trêve internationale.