La Coupe du monde idéale : pour un retour à seize équipes ?

Publié le 10 octobre 2022 - Richard Coudrais

Dans la série d’articles proposant des idées pour une Coupe du monde idéale, nous proposons aujourd’hui de mettre fin au gigantisme de l’épreuve et de revenir au format initial de seize équipes.

Cet article fait partie de la série La Coupe du monde idéale
5 minutes de lecture

Depuis l’édition espagnole de 1982, où la phase finale passa de 16 à 24 équipes participantes, la Coupe du monde n’a cessé de grossir. On est passé à 32 équipes en 1998 et l’on atteindra les 48 à partir de 2026 !

En finir avec le gigantisme

Cette augmentation de participants répond à une progression d’ensemble de la pratique du football à travers le globe. Toutefois, il n’est pas certain que le tournoi ait gagné en qualité. Quel que soit le nombre de participants, il n’y aura jamais qu’un seul gagnant, mais les perdants seront plus nombreux. Combien de matchs des tournois récents sont aujourd’hui passés à la trappe de notre mémoire ? Combien d’équipes n’ont fait que passer sans apporter quoi que ce soit à l’intérêt de l’épreuve ?

Le ventre mou d’une compétition a toujours existé, mais l’augmentation du nombre de participants l’a fait prendre du volume au détriment de la compétition elle-même. Les 48 matchs du premier tour de la Coupe du monde ne sont plus qu’un écrémage supplémentaire, un prolongement des éliminatoires et plus vraiment le lancement d’un tournoi. La presse et les médias ne s’y trompent d’ailleurs pas, annonçant souvent que la Coupe du monde débute vraiment à partir des huitièmes de finale.

L’augmentation du nombre d’équipes et donc de matchs présente un autre inconvénient : elle réduit le nombre de pays susceptibles d’accueillir l’épreuve, et oblige ceux qui aspirent à l’organiser à s’associer avec un pays voisin. Même les Etats-Unis en 2026 délesteront quelques rencontres au Mexique et au Canada. Lors de la Coupe du monde 2002, la seule jusqu’à présent organisée dans deux pays, l’organisation avait rencontré tant de problèmes (liées notamment aux rivalités locales) que la FIFA s’était bien juré de ne plus confier son tournoi qu’à un seul pays à la fois. Mais à moins que celui-ci soit démesurément grand (genre Brésil ou Russie) ou démesurément riche (genre Qatar), peu de pays sont capables désormais d’accueillir le grand cirque de la Coupe du monde dans de bonnes conditions.

En outre, si l’augmentation du nombre d’équipes reste un argument électoral de poids, les dirigeants de la FIFA ne peuvent ignorer que l’humanité est en péril si elle n’adopte pas rapidement une certaine sobriété (qui ne veut pas dire austérité) dans ses pratiques. Cela passe par un tournoi plus soucieux de l’environnement, à l’échelle humaine serait-on tenté d’écrire.

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Osons le retour à 16

Si l’idée semble utopique à première vue, il ne serait pas complètement idiot de revenir aujourd’hui à une Coupe du monde à 16 équipes. Oui, seize ! C’est un chiffre parfait : carré, il évite les tours de passe-passe (les “meilleurs troisièmes”) et autres innovations bancales (groupes de trois avec périodes de repos inégales entre les équipes). Le nombre de 16 donne une compétition claire et compréhensible qui ne traîne pas en longueur. Mieux, il offre des rencontres de haut niveau dès le premier tour. On a bien vu entre 1996 et 2012 comment la phase finale de l’Euro a été régénérée par le format à 16 (avant d’être affadie lors de son passage à 24 en 2016).

Bien sûr, il s’agit de trouver un équilibre entre l’intérêt de la compétition et la représentativité de tous les continents, proportionnelle à leur réelle valeur. Il ne s’agit pas de revenir aux tournois d’avant 1982 où l’Europe et l’Amérique du Sud étaient sur-représentés au détriment des autres continents. Ni de proposer un système égalitaire, comme aux Jeux olympiques, qui ne tient pas compte de la valeur sportive des continents.

Soyons pragmatiques, proposons pour le premier tour deux places par continent, ceux-ci étant au nombre de quatre : l’Europe, l’Amérique (Nord et Sud), l’Afrique et l’Asie/Océanie. Cela fait huit équipes. Pour les huit autres, basons-nous sur le nombre d’équipes par continent présents dans les quarts de finale du tournoi précédent. Ainsi la valeur de chaque continent sera respectée en termes de représentativité, et de manière la plus sportive qui soit.

Si l’on devait appliquer ce principe dès la prochaine Coupe du monde (en nous basant sur les quarts de finale de la Coupe du monde russe de 2018), nous aurions huit sélections européennes, quatre américaines, deux africaines et deux asia-océaniques. On peut estimer que la proportion de chaque continent représente bien son niveau footballistique réel. Il faut en outre garder en tête que par la suite, une équipe qui passe le premier tour accède directement aux quarts de finale. Et donc gagne une place pour son continent. Or, il est de moins en moins rare aujourd’hui qu’une équipe africaine ou asiatique franchisse le premier tour.

Une Coupe à la dimension d’un pays

Le format à seize équipes génère 24 matchs au premier tour (quatre groupes de quatre équipes) puis les quarts de finale, les demi-finales et la finale (on peut bazarder le match pour la troisième place qui ne sert pas à grand-chose). Le total de 31 matchs plaira certes peu aux télévisions, mais cela permettra de ne mobiliser entre quatre et six stades à minima, ce qui est la portée de nombreux pays. Et dans les plus petits, les déplacements pourront se faire en train, ce qui est toujours mieux que l’avion.

Il serait sympa de voir se dérouler une Coupe du monde en République Tchèque, en Colombie ou au Maroc. Il faut pouvoir donner à ces pays un tournoi idéalement dimensionné, sans qu’il aient besoin de s’associer avec un ou plusieurs voisins. L’unité du lieu est très importante. Imagine-t-on les Jeux olympiques étalés dans plusieurs villes ?

Récemment, la temporalité et la saisonnalité de la Coupe du monde ont été remises en cause. La prochaine édition se déroulera en fin d’année alors qu’elle a toujours eu lieu en début d’été. En outre, le projet de disputer une Coupe du monde tous les deux ans revient régulièrement sur le tapis. Il est peu probable que ce projet représente un intérêt sportif. La Coupe du monde doit rester un événement rare pour préserver son statut d’exception.

Quant aux dates du tournoi, nous sommes habitués à vivre celui-ci en fin de saison régulière, lorsque les clubs en ont fini avec leurs championnats et coupes diverses. La tenue du tournoi qatarien en fin d’année a été motivée par l’impossibilité de jouer sous la chaleur aux dates habituelles. C’est un sujet dont il faudra tenir compte à l’avenir, puisque les étés deviendront de plus en plus chauds. Faut-il garder coûte que coûte un tournoi en juin ou faut-il s’adapter aux contraintes du pays d’accueil ? Nous penchons a priori pour la deuxième solution, quitte à bousculer, une fois tous les quatre ans, le calendrier des clubs.

Quid des éliminatoires ?

Pour en revenir au seize équipes en phase finale, la diminution du nombre de représentants par continent va bien entendu relever le niveau des éliminatoires, car les places deviendront plus chères. Cela peut se révéler intéressant à condition toutefois de travailler sur un défaut majeur des éliminatoires actuelles : elles opposent souvent des équipes de valeurs différentes, ce qui génère rarement un bon match (soit la favorite s’impose largement, soit elle s’embourbe face à une opposition qui refuse le jeu).

Or, une récente épreuve a sans doute donné la clé pour réinventer des éliminatoires de qualité : la Ligue des nations et ses groupes de quatre étalés sur quatre divisions. Projetons nous : l’Europe a besoin de qualifier huit équipes. Elle sélectionne les seize meilleurs pays (que nous appellerons le Top 16 par commodité). Toutes les autres disputent le temps d’une saison des éliminatoires pour dégager seize équipes, lesquelles rejoignent les seize du Top 16 pour disputer la deuxième phase des éliminatoires durant la première partie de la saison aboutissant à la Coupe du monde : huit groupes de quatre équipes sont seule la première sera qualifiée pour la phase finale.

Bien entendu, le format dépendra du nombre d’équipes à qualifier, mais l’idée principale est de terminer les éliminatoires par des groupes de quatre équipes et de poursuivre, sur la durée, dans un système de promotion/rélégation qui protègerait les meilleures sans pénaliser les équipes moyennes.

Conclusion

Le principal danger qui guette la Coupe du monde est son gigantisme, c’est pourquoi nous proposons de revenir à une phase finale à seize participants, organisée dans un seul pays, avec des éliminatoires plus dynamiques. Nous sommes conscient que ces propositions feront tousser les sponsors et les télévisions, tout comme certaines fédérations habituées au confort d’une qualification assurée. Bref, notre candidature à la présidence de la FIFA a d’entrée du plomb dans l’aile…

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