Que peut-on retenir de cette quatrième saison de Didier Deschamps, qui ne sera pas la dernière ? En septembre, il entamera probablement le dernier tiers de ses six ans de mandat : en 2018, si les Bleus sont qualifiés pour la coupe du monde en Russie, soit il partira sur un titre mondial qui viendra boucler un incroyable palmarès, soit il laissera la place à Zinedine Zidane (selon toute vraisemblance). L’hypothèse où il resterait en poste au-delà de cette échéance est difficile à retenir, la pression médiatique étant telle que six ans semblent être la limite haute pour un sélectionneur français aujourd’hui [1].
2018, un défi immense mais jouable
Il reste donc deux saisons à Didier Deschamps pour gagner quelque chose avec les Bleus, et, faute de Coupe des Confédérations l’an prochain (sauf forfait de l’Allemagne ou du Portugal), ce quelque chose ne pourra être que la coupe du monde. Le défi est immense, dirons les pessimistes, tant les Bleus de 2016 ont semblé défaillants en régularité, en maturité et en capacité d’adaptation. Avoir atteint une finale européenne en ayant battu la Roumanie, l’Albanie, l’Irlande et l’Islande (soit grosso modo l’équivalent d’un groupe de phase éliminatoire) pour s’incliner contre un Portugal de deuxième catégorie ne ressemble pas vraiment à une saga.
Mais le défi est jouable, répondront les optimistes en rappelant que ces Bleus-là étaient privés de leur meilleur défenseur, de leur meilleur passeur et de leur meilleur buteur, sans compter quelques forfaits de dernière minute. Et que, malgré tout, ils ont terminé avec la meilleure attaque et le meilleur joueur du tournoi et sorti le champion du monde en titre avant de tomber sur moins fort qu’eux, ce qui est une autre manière de dire la faillite des favoris, Angleterre, Belgique et Espagne.
Quatorze victoires sur dix-sept
Statistiquement parlant, le bilan des Bleus en 2015-2016 est très bon : dix-sept matches joués, quatorze gagnés, un nul et deux perdus. Cetta saison aura vu émerger de nombreux nouveaux talents comme Anthony Martial, Kingsley Coman, N’Golo Kanté ou Samuel Umtiti, des joueurs confirmés briller au plus haut niveau à l’instar de Dimitri Payet, Hugo Lloris et Moussa Sissoko et un autre devenir une star mondiale, Antoine Griezmann. Ce n’est pas rien.
Pour autant, et sans noircir le tableau, des inquiétudes perceptibles il y a un an sont toujours là : les deux années de matches amicaux laissent le chantier de la défense en l’état (Sagna et Evra ne sont pas éternels, Rami et Mangala ne sont pas au niveau), Paul Pogba n’a toujours pas de place bien définie au milieu, Blaise Matuidi a déçu et les Bleus peinent toujours autant à faire le jeu. Ce n’est pas un hasard si leur meilleure performance du tournoi a eu lieu alors qu’ils avaient laissé la possession à l’Allemagne.
Privilégier la conquête ou le résultat ?
Du coup, bien malin qui pourra dire à quoi ressemblera l’équipe de France en juin 2018, si bien sûr elle ne se fait pas piéger dans une phase qualificative où tout le monde va l’attendre [2] Pour être honnête, à la même époque l’année dernière [3], on pensait que l’équipe-type de 2014 serait très proche de celle de 2016. Or, Debuchy, Varane, Sakho, Valbuena et Benzema n’étaient pas à l’Euro et Cabaye n’a joué que les utilités. Beaucoup de choses vont se passer pendant les quinze mois à venir, à commencer par dix matches de compétition.
Didier Deschamps sera-t-il capable de faire progresser cette équipe en s’appuyant sur ce qui a marché cette saison, notamment un groupe très soudé et une attaque qui a les moyens de devenir la meilleure du monde si Martial et Coman continuent à progresser et si Ben Arfa s’impose au PSG ? Ou s’enfermera-t-il dans un schéma frileux (pas de jeu long depuis la défense, une position basse sur le terrain et une priorité absolue donnée au résultat aux dépens du jeu conquérant) dont les limites ont été évidentes le 10 juillet face au Portugal ? Dans le premier cas, tous les espoirs sont permis pour 2018. Dans le second, l’Euro 2016 et la demi-finale de Marseille contre l’Allemagne constitueront probablement le point haut des années Deschamps.