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Cette septième saison de Didier Deschamps s’achève an après l’éclatant triomphe de Moscou et la conquête du deuxième titre mondial, et un an avant l’Euro 2020 qui pourrait lui permettre de réussir un incroyable double-double, comme on dit à la NBA (doublé Coupe du monde-Euro comme joueur en 1998-2000, doublé Coupe du monde-Euro comme sélectionneur en 2018-2020). Un Euro 2020 dont la finale tombera, les choses sont bien faites, un 12 juillet.
Un calendrier bouleversé par la Ligue des Nations
Mais la Ligue des Nations a perturbé l’ordonnancement de cette saison de transition. Alors qu’habituellement, elle se compose de matchs de qualification pour le tournoi suivant et d’amicaux pour compléter le calendrier, celle de 2018-2019 a commencé par quatre matchs à haute intensité face à l’Allemagne et les Pays-Bas, avant d’enchaîner par quatre autres rencontres de poules qualificatives pour l’Euro. Et trois amicaux intercalés en octobre, novembre et juin.
On savait aussi que les saisons post-titre majeur étaient compliquées à gérer. Deschamps ferait-il mieux que Henri Michel en 1984-85 ou que Roger Lemerre en 1998-99 et en 2000-01 ? Ce dernier cas étant atypique puisqu’il n’y avait alors pas de phase qualificative à jouer (mais la Coupe des confédérations en juin).
Avec un bilan comptable de sept victoires, deux nuls et deux défaites, et une attaque plus fringante au premier semestre 2019 (14 buts en 5 matchs) qu’au dernier de 2018 (7 en 6 matchs), on peut considérer l’ensemble satisfaisant à défaut d’être parfait.
D’un point de vue des résultats, il y avait l’essentiel et l’accessoire. L’essentiel, c’était de mettre l’équipe sur une trajectoire directe vers l’Euro 2020, et de tenir son rang en Ligue des Nations. L’accessoire, c’était de se qualifier pour le carré final de cette nouvelle compétition et de jouer la gagne en juin.
Un automne correct
Alors bien sûr on peut regretter la défaite de Rotterdam en novembre et la deuxième place du groupe, qui assure quand même le maintien en division A (contrairement à l’Allemagne, reléguée en division B). Mais l’expérience montre que gagner un trophée en année impaire (comme la Coupe des Confédérations) se paie toujours cher l’année suivante, et pas que pour la France. Et le faible niveau du carré final de la Ligue des Nations ne donne pas beaucoup de regrets.
Les trois victoires à domicile contre l’Allemagne, les Pays-Bas et l’Uruguay, même minimales, étaient dignes d’un champion du monde en titre. Les niveaux de forme très variables des uns et des autres se sont surtout payés à l’extérieur et lors de l’amical raté contre l’Islande.
En juin, tout est toujours plus compliqué
L’année 2019 était partie sur de très bonnes bases, avec des victoires larges contre des adversaires qui, il y a peu, posaient beaucoup de souci aux Bleus. Le mois de juin et sa vilaine défaite à Konya contre la Turquie, ont ravivé les interrogations nées un soir de novembre à Rotterdam, où Lloris avait évité que le match contre les Pays-Bas ne tourne à la déroute. Mais c’est comme ça : à cette période de l’année, quand il n’y a pas de phase finale, tout est toujours plus compliqué. Raison de plus pour négocier finement le calendrier afin d’éviter d’avoir à jouer un match piège lors du déplacement le plus périlleux du groupe.
Le brassage avait été conséquent depuis l’Euro 2016, et depuis le retour de Russie, Didier Deschamps a calmé le jeu au rayon des nouveaux. S’il a donné deux sélections à Alphonse Areola en septembre, ce dernier était déjà dans le groupe à la Coupe du monde. Et ses remplaçants Benjamin Lecomte et Mike Maignan n’ont pas encore eu leur chance.
Ni Tanguy Ndombele, ni Ferland Mendy, et encore moins Alassane Plea ne se sont imposés pour l’instant. Les deux premiers ont tout de même été rappelés en juin après avoir été absent (pour Mendy) ou pas utilisé (pour Ndombele) en mars. Léo Dubois et Clément Lenglet ont fait leurs débuts contre la Bolivie et Andorre, alors que Mike Maignan a pris la place de troisième gardien, Alphonse Areola glissant en doublure d’Hugo Lloris.
Thauvin requinqué, ça bouge sur le banc
Mais c’est plutôt Florian Thauvin qui a gagné quelque chose cette année. Confiné au banc en Russie, auteur d’une prestation ratée contre l’Islande en octobre, il a été titularisé deux fois en juin, et il a marqué des points en Andorre (buteur et passeur décisif). Si Mbappé s’installe en pointe dans les prochains mois, il sera un candidat possible pour le poste de milieu offesnsif droit.
Bien malin toutefois qui pourra dire à quoi ressemblera l’équipe de France à l’Euro l’an prochain. Les cadres de 2014 (Lloris, Varane, Pogba, Matuidi, Griezmann et Giroud) sont toujours là, ceux de 2016 (Umtiti et Kanté) ont encore la confiance du sélectionneur, et Mbappé est évidemment hors catégorie.
Il sera intéressant de voir comment Lucas Hernandez et Benjamin Pavard digèreront leur arrivée au Bayern, mais c’est plus certainement dans les 12 remplaçants que les mouvements par rapport à 2018 seront les plus nombreux. Exit Mandanda, Rami, Sidibé, Benjamin Mendy ou Nzonzi, tous absents pour différentes raisons du dernier rassemblement de juin ? D’autres champions du monde, comme Presnel Kimpembe, Nabil Fekir ou Ousmane Dembélé (sans doute la plus grosse déception du lot) ont vu leur crédit dangereusement diminuer. Pour eux, ça commence à sentir le brûlé.
Par ailleurs, cette saison aura été l’occasion d’une pluie de récompenses individuelles pour Didier Deschamps : le prix du meilleur sélectionneur de l’année 2018 décerné par la Fédération internationale de l’histoire du football et de la statistique (IFFHS) (le 14 mars), meilleur entraîneur 2018 pour la FIFA (le 24 septembre), France Football (le 7 janvier) et pour le journal sportif algérien le Buteur (le 10 janvier), le Trophée Joseph Maigrot 2018 attribué par l’association Club INSEP (le 15 novembre) et le Prix de la « Légende du Sport » lors de l’édition 2018 des Sportel Awards (le 24 octobre).
Le précédent : Michel Hidalgo en 1983
A ce niveau de longévité, on ne connaît qu’un précédent en France, du moins depuis la mise en place du sélectionneur unique en 1964 : il s’agit de Michel Hidalgo, pour qui la saison 7, composée uniquement de matchs amicaux, s’était terminée par une impression mitigée et un nul contre la Belgique au Luxembourg, le 31 mai 1983, et bien peu de certitudes un an avant l’Euro à domicile. Les Bleus avaient dû d’abord digérer une gifle retentissante infligée par la Pologne en août 1982 au Parc (0-4), puis se contenter de deux victoires minimalistes contre la Hongrie (1-0) et aux Pays-Bas (2-1) avant d’être tenu en échec en mars au Parc contre une très forte équipe d’URSS (1-1).
Il y avait quand même eu des motifs d’espoir : l’arrivée très convaincante de Luis Fernandez au poste de milieu défensif à l’automne, et deux victoires brillantes au Portugal en février (3-0, trois passes décisives de Platini) et contre la Yougoslavie en avril (4-0), avec deux débutants buteurs, le défenseur central de Brest Yvon Le Roux et l’attaquant nantais José Touré. Il manque alors une pièce du puzzle à Michel Hidalgo. Il la trouvera en septembre contre le Danemark, avec le gardien auxerrois Joël Bats.