Pour chacune de ces trois périodes, l’étude portera sur les matches joués et les résultats obtenus, même bien sûr si ces derniers n’avaient pas d’importance immédiate. On mettra en évidence le point haut et le point bas de chacune des périodes, ces moments-clé où quelque chose s’est mis en place ou, au contraire, s’est déréglé dans l’équilibre de l’équipe.
Enfin, on examinera attentivement les choix du sélectionneur : combien de joueurs utilisés, et parmi eux, combien sont en fin de carrière internationale et combien débutent. Il est particulièrement intéressant de s’arrêter sur le cas des débutants : dans le meilleur des cas, ils se retrouveront dans la liste pour l’Euro ou la coupe du monde à venir. Dans le pire des cas, ils ne seront jamais rappelés. Et entre les deux, certains poursuivront leur carrière internationale mais manqueront la phase finale tant convoitée.
Les matches : la fin des Invincibles
Quatre défaites en 23 matches : le bilan n’est certes pas déshonorant. Mais au-delà des chiffres, il traduit un certain endormissement des Bleus, gavés de titres et de gloire. Si la chute contre l’Australie en 2001 (0-1), avec une équipe de France C, n’a pas vraiment de signification, celle contre l’Espagne en mars (1-2) était plutôt inquiétante. Et plus encore, la déconvenue face au Chili en septembre (1-2) contre une équipe très volontaire mais limitée techniquement. Enfin, le peu de motivation et d’engagement contre la Belgique (1-2) juste avant de partir en Asie après une prestation très moyenne contre la Russie (0-0), posait plus de questions que n’amenait de réponses. Ces nombreux faux-pas étaient finalement prémonitoires : face au Sénégal et au Danemark, les Bleus seront battus par des adversaires certainement pas supérieurs dans le jeu, mais autrement plus motivés et disciplinés.
Tout n’a pas été noir pourtant dans ces vingt mois. Les Bleus ont aussi sorti des matches spectaculaires et enthousiasmants, comme le sommet du jeu face au Portugal en avril 2001 (4-0) ou la raclée assénée à une faible Ecosse (5-0) en février 2002. Et ils ont remporté la Coupe des Confédérations face il est vrai à des adversaires très moyens (le Brésil ayant aligné une équipe de réservistes) qui ont permis à Pires et Vieira de briller. Mais au final, Roger Lemerre aura échoué à renouveler ses cadres vieillissants ou à tout le moins à les mettre en concurrence avec de jeunes joueurs.
# | Date | Ville | Adversaire | score |
---|---|---|---|---|
619 | 26/05/2002 | Suwon | Corée du Sud | 3-2 |
618 | 18/05/2002 | Saint-Denis | Belgique | 1-2 |
617 | 17/04/2002 | Saint-Denis | Russie | 0-0 |
616 | 27/03/2002 | Saint-Denis | Ecosse | 5-0 |
615 | 13/02/2002 | Saint-Denis | Roumanie | 2-1 |
614 | 11/11/2001 | Melbourne | Australie | 1-1 |
613 | 06/10/2001 | Saint-Denis | Algérie | 4-1 |
612 | 01/09/2001 | Santiago | Chili | 1-2 |
611 | 15/08/2001 | Nantes | Danemark | 1-0 |
610 | 10/06/2001 | [Yokohama] | Japon | 1-0 |
609 | 07/06/2001 | [Suwon] | Brésil | 2-1 |
608 | 03/06/2001 | [Ulsan] | Mexique | 4-0 |
607 | 01/06/2001 | [Taegu] | Australie | 0-1 |
606 | 30/05/2001 | [Taegu] | Corée du Sud | 5-0 |
605 | 25/04/2001 | Saint-Denis | Portugal | 4-0 |
604 | 28/03/2001 | Valence | Espagne | 1-2 |
603 | 24/03/2001 | Saint-Denis | Japon | 5-0 |
602 | 27/02/2001 | Saint-Denis | Allemagne | 1-0 |
601 | 15/11/2000 | Istambul | Turquie | 4-0 |
600 | 07/10/2000 | Johannesburg | Afrique du sud | 0-0 |
599 | 04/10/2000 | Saint-Denis | Cameroun | 1-1 |
598 | 05/09/2000 | Saint-Denis | Angleterre | 1-1 |
597 | 16/08/2000 | Marseille | Sélection FIFA | 5-1 |
Les joueurs : le temps des sénateurs
La victoire à l’Euro, dans la foulée du titre mondial, va rendre Roger Lemerre encore plus conservateur qu’il ne l’était déjà. Sur les 44 joueurs qu’il va convoquer entre 2000 et 2002, 30 sont des anciens. Neuf d’entre eux vont s’arrêter en tout début de période, dont les deux poids lourds Blanc et Deschamps. Ils sont accompagnés par Bernard Lama, puis plus tard par Christian Karembeu. Et c’est à peu près tout. Youri Djorkaeff, Marcel Desailly et et Franck Lebœuf continuent, même s’ils ont 34 ans en 2002. Ce ne seront pas les meilleurs, loin de là, en Corée, sans doute faute de concurrence sérieuse. Pour le reste, les 21 confirmés sont presque tous dans la liste finale, à un Ludovic Giuly près. Et bien sûr Robert Pires, qui sera certainement l’absent le plus dommageable chez les Bleus.
Les débutants : Sagnol, et puis c’est tout
Quatorze débutants seulement ont été lancés par Roger Lemerre. Et encore, ce chiffre est en partie biaisé par la Coupe des Confédérations qui a été l’occasion d’un grand brassage : ainsi, Frédéric Née, Nicolas Gillet et Zoumana Camara, testés à cette occasion, n’ont plus porté le maillot bleu par la suite. Eric Carrière, Olivier Dacourt, Mickaël Landreau et Jérémie Bréchet ne seront pas dans la liste pour 2002. Grégory Coupet y sera, mais ne jouera pas.
Si on se restreint aux cinq débutants embarqués en Corée du Sud pour le Mondial, un seul, Willy Sagnol, a fait une belle carrière en Bleu. Titulaire sur le flanc droit de la défense après le recentrage de Lilian Thuram, il disputera la finale de la coupe du monde 2006. Djibril Cissé, MIckaël Silvestre et Grégory Coupet n’auront jamais vraiment un statut de titulaire en sélection. Quant à Philippe Christanval, il rejoindra le panthéon des grands espoirs déçus.
Le point haut : France-Portugal (25 avril 2001)
Un mois plus tôt à Valence, les Bleus ont perdu contre l’Espagne, leur première défaite en amical depuis trois ans. Quand le Portugal arrive à Saint-Denis, c’est avec une furieuse envie de revanche : les coéquipiers de Luis Figo ont en travers de la gorge les circonstances de leur élimination en demi-finale de l’Euro un an plus tôt. Mais les Bleus sont encore plus forts : avec un sublime milieu Petit-Vieira-Pires-Zidane-Wiltord et Henry en pointe, ils mettent une véritable raclée à leur adversaire au terme d’une première mi-temps brillantissime. Wiltord ouvre la marque à la 16e, et alors que les Blancs tentent de revenir dans le match, ils subissent une pluie de corners dont le dernier est transformé par Mikaël Silvestre sur une remise de la tête de Patrick Vieira (32e). A peine le temps de réengager, et les Bleus récupèrent et construisent une incroyable séquence de jeu de 15 passes consécutives en 35 secondes au terme de laquelle Pires sert Henry qui vient aligner le gardien portugais Quim (3-0, 33e). En deuxième période, Trezeguet et Djorkaeff font leur entrée, et le dernier ajoute un quatrième but (79e) en forme de ruban autour du paquet cadeau. Cette équipe-là est sans doute la meilleure du monde.
Lire l’article détaillé sur le match : 25 avril 2001 : France-Portugal
Le point bas : Chili-France (1er septembre 2001)
Dix jours avant le 11 septembre, les Bleus s’envolent pour Santiago où ils affrontent le Chili de Zamorano. Trop loin, trop peu motivant pour des Bleus qui, pourtant quasiment au complet (seul Barthez s’est fait porter pâle, remplacé par Ramé), ne font que le minimum syndical face à des Chiliens beaucoup plus motivés. Résultat des courses : 2-1 pour les locaux et la désagréable impression que cette équipe de France, gavée de succès et de louanges, est prenable pour peu qu’on lui marche un peu dessus. On se rend compte aussi que les départs de Blanc et de Deschamps n’ont pas été compensés, et que la charnière Silvestre-Desailly n’est pas exempte de tous reproches. On se dit alors qu’il reste neuf mois pour remédier à tout ça, et que rien ne presse. Mais les deux matches suivants de l’automne contre l’Algérie (arrêté un quart d’heure avant la fin) et en Australie (au terme d’un déplacement record de 22h d’avion) n’apporteront rien de nouveau.