Qu’attendre de la Coupe du monde 2026 ?

Publié le 3 septembre 2024 - Bruno Colombari

48 équipes, 16 villes d’accueil, trois pays organisateurs, une échelle continentale : la prochaine Coupe du monde sera celle de la démesure. Et du renouvellement ?

6 minutes de lecture

Un nouveau format

Avec son format monstrueux à 48 équipes (trois fois le nombre de participants de 1930 à 1978, deux fois celui de 1982 à 1994), la Coupe du monde 2026 sera celle du gigantisme puisqu’elle sera la première à se dérouler dans trois pays et 16 villes séparées par des distances continentales : 5526 kilomètres entre Vancouver et Miami, 4529 kilomètres entre Seattle et Mexico, 4000 kilomètres entre Boston et Guadalajara…

A titre de comparaison, il y a 2486 kilomètres entre Paris et Moscou et 3361 kilomètres entre Helsinki et Lisbonne, ou 4133 kilomètres entre Dublin et Istanbul.

Ce sera la première fois qu’un pays accueille une troisième Coupe du monde : le Mexique avait en effet été l’hôte unique des éditions 1970 et 1986. Les Etats-Unis avaient organisé l’édition 1994. Enfin, pour le Canada ce sera une grande première. C’est le 19e pays à recevoir la Coupe du monde depuis 1930, le 7e sur le continent américain.

104 matchs seront disputés sur une amplitude de 39 jours. C’est 40 matchs de plus que le précédent maximum (64 de 1998 à 2022, avec 32 équipes). 24 matchs supplémentaires au premier tour (12 poules de 4, contre 8 auparavant) et les seizièmes de finale qui viendront s’ajouter.

Autrement dit, les quatre participants aux demi-finales devront jouer huit fois en tout, dont un record de cinq matchs à élimination directe, avec d’éventuelles prolongations et séances de tirs au but. Voilà qui ne va pas améliorer la qualité du jeu…

D’autant plus que dans son infinie sagesse, la FIFA a créé la Coupe du monde des clubs dont la première édition aura lieu l’été prochain aux Etats-Unis, un an donc avant la vraie Coupe du monde. Et il ne vous échappera pas que les 32 clubs participants (dont 12 européens) concentreront la grande majorité des internationaux des principales nations qualifiées…

A un peu plus de 22 mois du début de la compétition (du 11 juin au 19 juillet 2026), trois équipes sont déjà qualifiées, celles des trois pays organisateurs. Parmi les six confédérations participantes, cinq ont déjà commencé la phase qualificative, l’Europe le fera en 2025. Elle est toujours le continent le plus représenté, même si sa part (16 sur 48, soit une sur trois) sera la plus faible depuis 1934 (4-13 en 1930). L’Afrique aura 9 représentants, l’Asie 8, la Concacaf 6 et l’Amérique du Sud 6. Les 2 places restantes seront attribuées aux vainqueurs des barrages intercontinentaux.

De nouveaux participants ?

A ce jour, 83 pays ont participé au moins une fois à la Coupe du monde, dont certains n’existent plus, comme la Yougoslavie, la RDA, la Tchécoslovaquie ou l’URSS. Les Indes orientales néerlandaises sont devenues depuis l’Indonésie et le Zaïre est désormais la RD du Congo. Le format à 48 pourrait amener de nouveaux participants. Probablement pas en Europe, où seules la Finlande, l’Albanie, le Luxembourg, la Biélorussie et les pays Baltes n’ont jamais joué, en plus des micros Etats (Andorre, Saint-Marin, la Moldavie, Gibraltar, la Macédoine du Nord ou le Kosovo). En Amérique du Sud, le Venezuela est le seul absent, alors qu’en Afrique, seuls 13 sélections sur 49 ont déjà joué en Coupe du monde. Autant dire qu’il y a de la place pour des nouveaux, comme par exemple le Mali, le Gabon, le Liberia, la Tanzanie, la Guinée, la Zambie… En Asie aussi, il y a de la place pour la nouveauté, avec 8 places à pourvoir parmi 46 prétendants, dont 11 seulement ont déjà participé à au moins une édition. Mais il y a déjà 27 éliminés, dont le Cambodge, le Laos, l’Inde, la Syrie, la Thaïlande, le Pakistan ou les Philippines.

Un nouveau vainqueur ?

Après 22 éditions, la Coupe du monde est toujours un club extrêmement fermé. Il n’y a que huit vainqueurs depuis 1930, et cinq finalistes, soit seulement 13 nations qui ont été à 90 minutes d’un titre mondial. Sur un maximum possible de 44, ce n’est vraiment pas beaucoup ! Les deux derniers nouveaux champions du monde sont l’Espgne (2010) et la France (1998), et les deux derniers nouveaux finalistes sont la Croatie (2018) et les Pays-Bas (1974).

Autant dire que la probabilité de voir un neuvième champion du monde est très faible. Le Portugal pourrait être celui-là, mais il a déçu à l’Euro et a du mal à confirmer son doublé Euro/Ligue des Nations en 2016 et 2019. La Belgique semble avoir laissé passer son tour. En Afrique, la Côte d’Ivoire (vainqueur de la CAN en 2024) et le Maroc (demi-finaliste en Coupe du monde 2022, et médaille de bronze aux JO) seront sans doute les meilleures chances continentales.

Un pays organisateur titré à domicile ?

Les probabilités sont quasi-nulles. Les Etats-Unis (qui accueilleront l’essentiel des matchs, dans 11 des 16 villes, dont la finale et tous les matchs à partir des quarts de finale), le Mexique et le Canada ne semblent pas capables, du moins aujourd’hui, de jouer un rôle de prétendant sérieux au dernier carré. A ce jour, seuls six pays organisateurs ont été champions du monde : l’Uruguay en 1930, l’Italie en 1934, l’Angleterre en 1966, l’Allemagne en 1974, l’Argentine en 1978 et la France en 1998. Et deux autres (le Brésil en 1950 et la Suède en 1958) ont joué une finale.

Qui parmi les précédents vainqueurs ?

Depuis 1930, le Brésil n’a jamais manqué plus de cinq finales consécutives. C’est arrivé deux fois, entre 1974 et 1990 et depuis 2002. Il serait étonnant qu’il échoue encore une fois en 2026, surtout avec son duo Vinicius-Endrick qui aura le temps de peaufiner des automatismes au Real lors des deux prochaines saisons. Mais son instabilité chronique au niveau des sélectionneurs et un manque de joueurs de classe mondiale en défense pourrait lui coûter cher.

L’Argentine, tenant du titre et double vainqueur de la Copa América (2021 et 2024) fera forcément partie des favoris, avec ou sans Lionel Messi, qui aura quand même 39 ans à l’été 2026. Ceci dit, au rythme qui est le sien en MLS, il peut durer jusque là. A quel niveau, c’est une autre question. Mais les champions du monde 2022 ont aussi des joueurs jeunes ou en milieu de carrière (Enzo Fernandez a 23 ans, Julian Alvarez 24, Alexis McAllister 25, Nahuel Molina et Cristian Romero 26, Lautaro Martinez 27...) qui seront toujours là dans deux ans.

L’Uruguay de Marcelo Bielsa serait une énorme surprise, même si la Celeste a fini quatrième en 2010 et quart-finaliste en 2018. Elle a calé en demi-finale de la Copa América contre la Colombie, et il est trop tôt pour dire si elle va continuer de monter en puissance ou si elle a déjà atteint son maximum.

Absente en 2018 et 2022, l’Italie va bien finir par se redresser, même si son dernier Euro n’a pas été rassurant. Il semble improbable que la Squadra Azzurra vise le titre en 2026, vingt ans après sa dernière finale, alors qu’elle en avait disputé quatre en 36 ans, avec une régularité d’horloge (1970, 1982, 1994 et 2006).

L’Allemagne de Julian Nagelsmann a été traumatisée par ses deux éliminations au premier tour en 2018 et 2022, un bilan à peine amélioré par un quart de finale à l’Euro 2024, toujours mieux que le huitième de finale de 2021. Autant dire que la Mannschaft est absente du dernier carré des deux tournois majeurs depuis 2016, ce qui commence à faire beaucoup. Quant à la Ligue des Nations, elle est le seul champion du monde européen à n’avoir participé à aucune phase finale.

L’Angleterre a disputé les deux dernières finales européennes sans en gagner aucune, et a échoué aux niveaux inférieurs lors des Coupes du monde 2018 (demi-finaliste) et 2022 (quart). Avec une génération de très grande qualité organisée autour de Jude Bellingham (21 ans), Bukayo Saka et Cole Palmer (22), Kobbie Mainoo (19) ou Phil Foden (24), elle peut encore progresser, à condition de trouver un sélectionneur capable de sublimer tout ça, ce que n’a pas pu faire Gareth Southgate en huit ans, même s’il n’est pas passé loin. Et l’Euro 2028 aura lieu au Royaume-Uni...

Autant dire que le principal favori sera l’Espagne. Même si elle a calé en 2022 (éliminée en huitièmes de finale par le Maroc), elle sort de deux Euros très probants avec une demi-finale en 2021 et le titre en 2024, auxquels il faut ajouter une victoire en Ligue des Nations en 2023, deux ans après une finale perdue contre la France (en 2021). Et surtout, elle dispose de nombreux joueurs très jeunes (Yamal et Cubarsi 17 ans, Gavi 20 ans, Pedri et Fermin Lopez 21 ans, Williams 22 ans) et dispose d’un réservoir impressionnant, que l’on a pu voir à l’œuvre aux JO de Paris.

Une troisième finale consécutive pour les Bleus ?

Ce ne serait pas la première fois qu’une équipe nationale enchaînerait trois finales mondiales d’affilée, mais ce n’est arrivé qu’à deux reprises depuis 1930. La première, c’était entre 1982 et 1990, ou la RFA en a perdu deux contre l’Italie (1-3) puis l’Argentine (2-3) avant de remporter la troisième, encore contre l’Argentine (1-0). La deuxième série est arrivée juste après : le Brésil a battu l’Italie en 1994 (0-0, tirs au but) et l’Allemagne en 2002 (2-0), mais entre les deux, les Auriverde ont perdu la deuxième contre la France en 1998 (0-3).

En cette fin d’été 2024, c’est une perspective qui semble bien lointaine pour l’équipe de France, surtout si l’on reste sur l’impression amère de l’Euro 2024. Mais rappelez-vous de l’été 2021 : éliminés en huitièmes de finale par la Suisse, après avoir gagné un match sur quatre, les Bleus semblaient très loin d’une nouvelle finale mondiale. Et c’était encore plus le cas en novembre 2022, après une série de matchs ratés en Ligue des Nations et une cascade de forfaits qui allait continuer jusqu’à deux jours du premier tour. Et pourtant…

Entre 1904 et 1919, 128 internationaux ont porté au moins une fois le maillot de l’équipe de France. Si leur carrière internationale est la plupart du temps anecdotique, leur vie est souvent romanesque.

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Hommage à Pierre Cazal