Le nom d’André-Pierre Gignac nous renvoie aux dernières minutes du temps réglementaire de la finale de l’Euro 2016. L’attaquant français, entré quelques minutes plus tôt à la place d’Olivier Giroud, reçoit un centre de Patrice Evra. Il fait tourner son défenseur en bourrique, tire hors de portée du gardien, mais le ballon est repoussé par le poteau. Si l’action avait abouti, le but aurait donné son troisième titre européen à l’équipe de France. Au lieu de quoi, son échec a conduit aux prolongations, et celles-ci seront bénéfiques à l’adversaire.
Cette mésaventure rappelle inévitablement le tir de Manuel Amoros, à Séville en 1982. Tout récemment, lors de l’Euro 2020, le nom de Gignac a été évoqué quand Kingsley Coman a touché du bois contre la Suisse. On se souvient aussi du Néerlandais Robby Rensenbrink en finale de la Coupe du monde 1978...
Une médaille pour faire oublier un poteau
André-Pierre Gignac n’a pas eu un destin ordinaire. Il fait partie de ces joueurs qui ne se sont affirmés qu’à l’âge adulte. Aucune sélection chez les jeunes, ni chez les espoirs, il est passé entre les gouttes de la détection. Plus tard, après une belle carrière dans le championnat de France, il a rejoint le championnat du Mexique où il est devenu une énorme vedette et ne compte plus les buts qu’il marque, ni les titres qu’il collectionne. A tel point qu’il est devenu le premier Bleu sélectionné alors qu’il évolue dans un championnat hors d’Europe. Ultime pirouette de son destin hors norme : André-Pierre Gignac est appelé à défendre les couleurs de la France aux Jeux olympiques de Tokyo en juillet 2021.
L’histoire d’André Pierre Gignac avec l’équipe de France n’a pas été simple. On peut même écrire qu’il a eu deux carrières distinctes chez les Bleus : Seize sélections avec Raymond Domenech entre 2009 et 2010 puis vingt avec Didier Deschamps entre 2013 et 2016.
Formé à Martigues, au club de sa ville natale, puis à Lorient où il fait ses débuts en Ligue 1 (trois buts contre Nantes dès son entrée en jeu !), André-Pierre Gignac rejoint Toulouse en 2007. Après une première saison en demi-teinte, il s’impose à la pointe de l’attaque du TFC, inscrivant 24 buts et terminant meilleur buteur du championnat. La performance attire l’attention du sélectionneur Raymond Domenech qui fait appel à lui en mars 2009 pour une double confrontation face à la Lituanie dans le cadre des éliminatoires de la Coupe du monde 2010. S’il reste sur le banc lors du match à Kaunas (remporté 1-0 par les Bleus), le Toulousain de 23 ans entre en jeu quatre jours plus tard au Stade de France en remplacement de Peguy Luyindula. Après quelques minutes, il est à la réception d’une passe lobée de Thierry Henry sur le côté droit. Il centre aussitôt pour Franck Ribéry qui, seul devant le but, n’a plus qu’à pousser le ballon dans les filets.
Le nouvel international plaît à Raymond Domenech qui le convoque à chaque nouveau rendez-vous des Bleus. Il n’est certes pas aussi doué que Benzema ou Anelka, mais son engagement physique et la précision de ses tirs font souffrir bien des défenses, notamment quand il entre en fin de match. C’est en août 2009 que Gignac est titularisé pour la première fois chez les Bleus, à l’occasion d’un match de qualification à Torshavn contre les îles Féroé. Le Toulousain fête l’événement en inscrivant son premier but en Bleu juste avant la mi-temps, d’un tir en pivot qui fait mouche. C’est le seul but du match pour les Bleus face, pourtant, à l’une des sélections les plus faibles du continent.
De Torshavn à Knysna
De remplaçant, André-Pierre Gignac bascule au statut de titulaire… fréquemment remplacé. C’est souvent lui que l’on sacrifie pour la bonne cause. Contre la Roumanie au Stade de France, il cède sa place à l’heure de jeu à Franck Ribéry alors que les Roumains viennent d’égaliser sur un but contre leur camp des Français. Quatre jours plus tard à Belgrade, il doit à nouveau céder sa place, après seulement dix minutes, pour faire entrer Steve Mandanda, alors que Hugo Lloris vient de se faire expulser.
En octobre, à Guingamp, le buteur toulousain retrouve les îles Féroé à qui il plante deux nouveaux buts, le premier étant une copie conforme de celui qu’il réalisa à Torshavn, l’autre un superbe travail de contournement de défense ponctué par un tir aussi puissant que précis. Son remplacement par Benzema au début du dernier quart d’heure lui permet d’obtenir les ovations du public breton. Le match se termine sur un score (5-0) plus conforme à la différence de niveau entre les deux équipes. André-Pierre Gignac confirme quatre jours plus tard qu’il sait se montrer efficace : Contre l’Autriche, il remplace Thierry Henry puis marque d’une magnifique frappe enroulée en partant du côté gauche. Un but... à la Thierry Henry.
C’est tout naturellement que l’on retrouve André-Pierre Gignac parmi les 23 du mondial sud-africain. Il n’a manqué qu’une seule rencontre depuis son arrivée en équipe de France. En Afrique du Sud, il entre en jeu en toute fin de rencontre face à l’Uruguay (0-0) puis à la mi-temps du match France-Mexique. C’est lui qui remplace Nicolas Anelka, dont les mots avec le sélectionneur feront la une des journaux. Gignac n’échappera pas ensuite au peu glorieux épisode du bus de Knysna. Titularisé pour la dernière rencontre contre l’Afrique du Sud, mais remplacé à la mi-temps, il ne se doute alors pas vraiment qu’il ne portera plus le maillot bleu avant longtemps.
Trois ans de doute et d’absence
Le nouvel attaquant de l’OM, qu’il a rejoint après la Coupe du monde sud-africaine, sera en effet absent de l’équipe de France durant trois ans. Laurent Blanc ne fera jamais appel à lui. Il faut dire que la recrue marseillaise aligne des performances en dent de scie dans son nouveau club et prend en outre quelques kilos superflus. Une période d’autant plus difficile qu’il ne s’entend pas vraiment avec l’entraîneur, un certain Didier Deschamps. Gignac ne retrouvera du temps de jeu qu’avec l’arrivée d’Élie Baup, qui succède à Deschamps en juillet 2012, alors que celui-ci prend les commandes de l’équipe de France.
Avec Deschamps sélectionneur, il paraît illusoire de revoir Gignac en équipe de France. Pourtant, le nouveau patron des Bleus n’hésite pas à faire appel à lui au début de la saison 2013/2014. L’équipe de France doit disputer deux rencontres consécutives sur le front de l’Est, en Géorgie et en Biélorussie au cours des éliminatoires de la Coupe du monde 2014. Le revenant entre contre la Géorgie après l’heure de jeu (à la place de Benzema), mais il ne sera plus rappelé par la suite. La Coupe du monde au Brésil se déroule sans lui.
C’est en octobre 2014 que l’on retrouve André-Pierre Gignac en équipe de France. Le joueur est alors transformé par le nouveau coach de l’Olympique de Marseille, l’Argentin Marcelo Bielsa. Il est notamment titularisé à Erevan où il réalise un match de feu, en étant impliqué sur les trois buts français, transformant un pénalty et donnant les ballons de but à Loïc Rémy et Antoine Griezmann.
L’œil du Tigre
Alors qu’à trente ans il est au top de sa carrière, Gignac surprend son monde en rejoignant Monterrey, au Mexique, et les Tigres UANL. Si le championnat mexicain est d’un très bon niveau, tant financièrement que sportivement, on redoute que la distance ne l’éloigne pour de bon de l’équipe de France. Jamais jusqu’alors un joueur évoluant hors du continent européen n’a joué chez les Bleus. Pourtant, Didier Deschamps fait appel à lui pour deux rencontres amicales en novembre 2015. Le « Mexicain » effectue un retour tonitruant au Stade de France en marquant d’une magnifique reprise de la tête contre les champions du monde allemands, après avoir remplacé Giroud au cours de la deuxième période. C’était le soir du 13 novembre 2015.
S’il a manqué la Coupe du monde 2014, Gignac est en selle pour participer à l’Euro 2016 organisé en France. En dépit de la distance, il est régulièrement appelé par Didier Deschamps et marque même contre la Russie (4-2) son septième but en bleu. En juin, le Tigre participe à six rencontres des Bleus durant l’Euro 2016, même s’il n’est titularisé qu’à une seule, le troisième match contre la Suisse (0-0). Absent du match d’ouverture, il entre en jeu pour remplacer, à chaque fois, Olivier Giroud. Il n’inscrit malheureusement aucun but durant le tournoi. En finale, sa frappe a rencontré le poteau.
A l’issue de l’Euro 2016, Gignac dispute encore trois rencontres. Il ne sera plus rappelé après son entrée en jeu à Amsterdam contre les Pays-Bas. Sur 36 rencontres en bleu, André-Pierre Gignac a été 24 fois remplaçant et a été remplacé en dix occasions. Il n’a donc joué que deux rencontres en entier : sa quatrième sélection (Iles Féroé-France le 12 août 2009) et sa vingt-neuvième (France-Suisse à l’Euro 2016).
36 sélections, 7 buts
# | genre | date | lieu | adversaire | score | tps jeu | but |
---|---|---|---|---|---|---|---|
1 | qCM | 01/04/2009 | Saint-Denis | Lituanie | 1-0 | 22 | |
2 | Amical | 02/06/2009 | Saint-Etienne | Nigéria | 0-1 | 45 | |
3 | Amical | 05/06/2009 | Lyon | Turquie | 1-0 | 45 | |
4 | qCM | 12/08/2009 | Torshavn | Féroé | 1-0 | 90 | 1 |
5 | qCM | 05/09/2009 | Saint-Denis | Roumanie | 1-1 | 33* | |
6 | qCM | 09/09/2009 | Belgrade | Serbie | 1-1 | 12* | |
7 | qCM | 10/10/2009 | Guingamp | Féroé | 5-0 | 73* | 2 |
8 | qCM | 14/10/2009 | Saint-Denis | Autriche | 3-1 | 39 | 1 |
9 | qCM | 14/11/2009 | Dublin | Rep. d’Irlande | 1-0 | 89* | |
10 | qCM | 18/11/2009 | Saint-Denis | Rep. d’Irlande | 1-1 | 56* | |
11 | Amical | 26/05/2010 | Lens | Costa Rica | 2-1 | 6 | |
12 | Amical | 30/05/2010 | Radès | Tunisie | 1-1 | 27 | |
13 | Amical | 04/06/2010 | Saint-Pierre | Chine | 0-1 | 27 | |
14 | CM T1 | 11/06/2010 | Le Cap* | Uruguay | 0-0 | 5 | |
15 | CM T1 | 17/06/2010 | Polokwane* | Mexique | 0-2 | 45 | |
16 | CM T1 | 22/06/2010 | Bloemfontein | Afrique du sud | 1-2 | 45* | |
17 | qCM | 06/09/2013 | Tbilissi | Géorgie | 0-0 | 28 | |
18 | Amical | 11/10/2014 | Saint-Denis | Portugal | 2-1 | 1 | |
19 | Amical | 14/10/2014 | Erevan | Arménie | 3-0 | 87* | 1 |
20 | Amical | 14/11/2014 | Rennes | Albanie | 1-1 | 21 | |
21 | Amical | 18/11/2014 | Marseille | Suède | 1-0 | 69* | |
22 | Amical | 13/11/2015 | Saint-Denis | Allemagne | 2-0 | 21 | 1 |
23 | Amical | 17/11/2015 | Londres | Angleterre | 0-2 | 57* | |
24 | Amical | 25/03/2016 | Amsterdam | Pays-Bas | 3-2 | 17 | |
25 | Amical | 29/03/2016 | Saint-Denis | Russie | 4-2 | 79* | 1 |
26 | Amical | 30/05/2016 | Nantes | Cameroun | 3-2 | 25 | |
27 | Amical | 04/06/2016 | Metz | Ecosse | 3-0 | 27 | |
28 | Euro T1 | 15/06/2016 | Marseille | Albanie | 2-0 | 13 | |
29 | Euro T1 | 19/06/2016 | Villeneuve d’Ascq | Suisse | 0-0 | 90* | |
30 | Euro 1/8 | 26/06/2016 | Lyon | Rep. d’Irlande | 2-1 | 16 | |
31 | Euro 1/4 | 03/07/2016 | Saint-Denis | Islande | 5-2 | 30 | |
32 | Euro 1/2 | 07/07/2016 | Marseille | Allemagne | 2-0 | 13 | |
33 | Euro fin | 10/07/2016 | Saint-Denis | Portugal | 0-1 | 42 | |
34 | Amical | 01/09/2016 | Bari | Italie | 3-1 | 45 | |
35 | qCM | 07/10/2016 | Saint-Denis | Bulgarie | 4-1 | 18 | |
36 | qCM | 10/10/2016 | Amsterdam | Pays-Bas | 1-0 | 11 | |
- | Ol. (am.) | 16/07/2021 | Séoul | Corée du Sud (ol.) | 2-1 | 69* | |
- | JO | 22/07/2021 | Tokyo | Mexique (ol.) | 1-4 | 90 | 1 |
. | JO | 25/07/2021 | Saitama | Afrique du Sud (ol.) | 4-3 | 90 | 3 |
. | JO | 28/07/2021 | Yokohama | Japon (ol.) | 0-4 | 90 |