Neckarstadion, un stade dans l’histoire des Bleus

Publié le 4 juin 2025 - Richard Coudrais

A l’occasion de la demi-finale de la Ligue des nations, l’équipe de France retrouve Stuttgart et son stade où elle a déjà joué quatre fois. Celui-ci a porté plusieurs noms et subi de nombreux changements dans son histoire.

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La ville de Stuttgart, qui compte aujourd’hui plus de 620.000 habitants, se trouve à une centaine de kilomètres de la frontière franco-allemande. Son stade, qui a porté plusieurs noms au cours de son histoire, est un monument emblématique du sport allemand. Il a abrité dix matchs de Coupes du monde et sept rencontres de l’Euro alors qu’il accueille en juin 2025 deux rencontres de la Ligue des nations. Il a également été le théâtre de championnats internationaux d’athlétisme, de rencontres de boxe, de compétitions gymniques et de finales de Coupes d’Europe de football. L’équipe de France y a joué quatre fois.

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Une défaite au Adolf-Hitler-Kampfbahn

C’est en 1929 aux abords de la rivière Neckar que commence la construction du Stuttgarter Kampfbahn, conçu par les architectes Paul Bonatz et Friedrich Eugen Scholer. Après quatre ans de travaux, le stade est inauguré par une rencontre de football entre une équipe de joueurs locaux contre une sélection de Nuremberg et de Fürth. Il a une capacité de quarante mille spectateurs, dont plus de deux mille qui peuvent se mettre à l’abri sous un toit. L’enceinte est bien entendu destinée au VfB Stuttgart, le principal club de la ville fondé en 1893, mais le premier événement, du 26 au 31 juillet 1933, est la quinzième édition du Festival allemand de gymnastique. A cette occasion, le stade prend le nom d’Adolf-Hitler, le maire de la ville étant un sympathisant du chancelier élu quelques mois plus tôt. Le club du VfB Stuttgart gardera quant à lui cette sinistre réputation d’avoir été un club phare du national-socialisme, au même titre que Schalke 04, le Werder Brême et Munich 1860.

En janvier 1935, la capacité du stade est portée à plus de soixante dix mille spectateurs grâce à des tribunes provisoires en bois. L’équipe nationale allemande y dispute son premier match contre la Suisse. Deux ans plus tard, le 21 mars 1937, elle y revient pour affronter la France. Devant soixante douze mille spectateurs pour la plupart vêtus de chemises brunes, tandis que les drapeaux rouges à croix gammée flottent au vent, l’équipe de France s’incline 4-0, un résultat dont paradoxalement se satisfont la presse française et le sélectionneur Gaston Barreau. La fable des valeureux perdants face à ceux qui gagnent toujours à la fin, en quelque sorte.

  • Le Miroir des sports du 23 mars 1937 (BNF, Gallica)

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, le stade de Stuttgart est réquisitionné par les forces d’occupation américaines qui y organisent des rencontres de base-ball. Il est rebaptisé Century Stadium, en anglais dans le texte. En 1949, il prend le nom de Neckarstadion, en référence au fleuve qui traverse la ville. C’est un nom qu’il conservera pendant plus de quarante ans, et que les Stuttgartois utilisent encore aujourd’hui malgré de nouvelles dénominations. Le stade a subi plusieurs rénovations qui lui permettent d’accueillir près de cent mille spectateurs. La finale de la Coupe d’Europe de 1959, qui voit le Real Madrid conserver son trophée aux dépens du Stade de Reims, est disputée devant 80.000 spectateurs. En septembre 1962, le Neckarstadion accueille la finale à rejouer de la Coupe des vainqueurs de Coupes, l’Atlético Madrid et la Fiorentina n’ayant pu se départager à Glasgow.

Un match nul au Neckarstadion

L’équipe de France revient à Stuttgart le 24 octobre 1962, invitée à une rencontre amicale contre la RFA, puisque le pays a été coupé en deux. C’est la septième opposition entre les deux sélections. Devant soixante quinze mille spectateurs, les Tricolores privés de Kopa mènent 2-0 à la pause mais se font rejoindre en seconde période, les Allemands profitant de l’infortune du gardien français Georges Lamia.

Au cours de l’été 1963, l’éclairage artificiel est installé au Neckarstadion afin de pouvoir organiser des rencontres en nocturne. Il s’agit d’une obligation pour les clubs qui souhaitent disputer la toute nouvelle Bundesliga. En septembre 1965, le stade accueille les épreuves masculines de la Coupe d’Europe des nations d’athlétisme.

En 1966, l’Allemagne de l’Ouest est désignée pour organiser la Coupe du monde 1974. Le stade de Stuttgart subit d’importants travaux en vue du tournoi. La tribune principale est démolie pour y construire des gradins sur trois niveaux. En face, un toit est installé et dans le virage apparaît un impressionnant tableau d’affichage numérique. Quatre rencontres de la Coupe du monde sont jouées dans une enceinte pouvant contenir 70.000 spectateurs. En 1976, les Rolling Stones font du Neckarstadion un lieu de concert qui sera très prisé par la suite.

Dans les années 1980, le tableau d’affichage numérique est remplacé par un écran vidéo. Le stade accueille les championnats d’Europe d’athlétisme en 1986 puis de football en 1988. Il abrite également la finale de la Coupe d’Europe des Clubs champions 1988 qui voit le sacre du PSV Eindhoven aux dépens de Benfica (aux tirs au but). La saison suivante, il vit l’épopée du VfB en Coupe de l’UEFA qui conduit le club jusqu’en finale où le Napoli de Diego Maradona met fin à ses rêves de titre européen.

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Une victoire au Gottlieb-Daimler Stadion

En 1993, le stade se prépare à accueillir les quatrièmes championnats du monde d’athlétisme. Pour l’occasion, le Neckarstadion est renommé stade Gottlieb Daimler en hommage à l’inventeur des premiers moteurs automobiles à essence, décédé à Stuttgart en 1900. En vérité, ce naming déguisé fait partie d’un accord conclu avec la firme Daimler-Mercedes-Benz pour le financement d’une partie des travaux.

C’est un peu plus tard que l’équipe de France réapparaît à Stuttgart. Le 1er juin 1996, juste avant l’Euro en Angleterre, un match amical de préparation oppose les hommes d’Aimé Jacquet à ceux de Berti Vogts, et ce sont les premiers qui s’imposent (1-0) sur un but de Laurent Blanc. Les Français n’avaient plus gagné en terre allemande depuis 1954.

Au début du nouveau siècle, une nouvelle phase de travaux transforme le stade de Stuttgart dans la perspective de la Coupe du monde 2006. La capacité de l’enceinte est passée à 55.000 places. Le Gottlieb-Daimler Stadion abrite six rencontres de la compétition notamment le match France-Suisse du 13 juin 2006 où les hommes de Raymond Domenech sont accrochés (0-0) devant 52.000 spectateurs. On est loin d’imaginer alors qu’une des deux équipes va se retrouver en finale un mois plus tard.

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Une ligue des nations à la MHP Arena

Deux ans après la Coupe du monde, le VfB Stuttgart obtient que le stade, pourtant un haut lieu de l’athlétisme international, devienne une enceinte exclusivement réservée au football. L’endroit se voit attribuer un nouveau nom, la Mercedes-Benz Arena, ne cachant désormais plus le naming d’un sponsor. Le stade de quarante et un mille places poursuit sa mue au gré des travaux et des changements de noms. Il est réquisitionné pour l’Euro 2024 et prend le nom de Stuttgart Arena le temps du tournoi avant d’adopter celui de MHP Arena, du nom d’une société de conseil filiale du groupe Porsche. Aujourd’hui, le stade peut accueillir entre cinquante quatre et soixante mille spectateurs selon sa configuration.

Le 5 juin 2025, l’équipe de France évolue pour la cinquième fois de son histoire dans le stade de Stuttgart. Elle y affronte, en demi-finale de la Ligue des nations, l’Espagne qui y joue quant à elle pour la quatrième fois. Une mauvaise soirée pour la défense tricolore qui encaisse cinq buts (du jamais vu depuis cinquante-six ans) mais une soirée plutôt positive pour l’attaque pas loin de réaliser une remontada (score final : 5-4 alors qu’il y avait 5-1 à l’heure de jeu).

La défaite contre l’Espagne oblige les Bleus à disputer le match pour la troisième place dans ce même MHP Arena (alors que la finale se joue à Munich). Les hommes de Didier Deschamps y retrouvent l’Allemagne, pour la quatrième fois et s’imposent (2-0).

Stuttgart : deux victoires, deux défaites et deux matchs nuls

NumMatchDateNom du stadeAdversaireScoreAffluence
140 Amical 21/03/1937 Adolf-Hitler-Kampfbahn Allemagne 0-4 72.000
277 Amical 24/10/1962 Neckarstadion RFA 2-2 75.000
538 Amical 01/06/1996 Gottlieb-Daimler Stadion Allemagne 1-0 53.135
672 CM 2006 13/06/2006 Gottlieb-Daimler Stadion Suisse 0-0 52.000
924 LDN 2025 1/2 05/06/2025 MHP Arena Espagne 4-5 51.724
925 LDN 2025 3/4 08/06/2025 MHP Arena Allemagne 2-0 51.313

Après six rencontres disputées à Stuttgart, ils sont douze Tricolores y avoir joué deux fois : Lilian Thuram et Zinédine Zidane sont apparus à dix ans d’intervalle, en 1996 et 2006. Les autres sont ceux qui ont disputés les deux rencontres de Ligue des nations en juin 2025, à savoir Mike Maignan, Malo Gusto, Lucas Hernandez, Manu Koné, Adrien Rabiot, Michael Olise, Rayan Cherki, Randal Kolo Muani, Kylian Mbappé et Désiré Doué.

Les autres Tricolores qui comptent un match à Stuttgart sont chronologiquement Laurent Di Lorto, Maurice Dupuis, Raoul Diagne, Michel Payen, François Bourbotte, Edmond Delfour, Jules Bigot, Roger Rio, Jean Nicolas, Ignace Kowalczyk, Fritz Keller, Georges Lamia, Jean Wendling, Maryan Synakowski, André Lerond, Bruno Rodzik, Joseph Bonnel, René Ferrier, Edouard Stako, Laurent Robuschi, Yvon Goujon, Paul Sauvage, Bernard Lama, Laurent Blanc, Marcel Desailly, Éric Di Meco, Bixente Lizarazu, Christian Karembeu, Jocelyn Angloma, Didier Deschamps, Vincent Guérin, Sabri Lamouchi, Patrice Loko, Youri Djorkaeff, Christophe Dugarry, Reynald Pedros, Fabien Barthez, Willy Sagnol, William Gallas, Éric Abidal, Patrick Vieira, Claude Makélélé, Sylvain Wiltord, Vikash Dhorasoo, Franck Ribéry, Louis Saha, Thierry Henry, Pierre Kalulu, Ibrahima Konaté, Clément Lenglet, Théo Hernandez, Ousmane Dembélé, Bradley Barcola, Loïc Badé, Lucas Digne, Aurélien Tchouaméni, Marcus Thuram et Matteo Guendouzi.

Pierre Kalulu, Rayan Cherki et Loïc Badé ont connu leur première sélection à Stuttgart. Le stade a par ailleurs vu apparaitre trois fois un membre de la famille Thuram, une fois par décennie : Lilian en 1996 et 2006 puis Marcus en 2025.

Sept Tricolores ont marqué à Stuttgart, au moins un but. Kylian Mbappé en a inscrit deux lors de la Ligue des nations 2025. Les autres buteurs français sont Edouard Stako et Yvon Goujon en 1962, Laurent Blanc en 1996, Rayan Cherki, Randal Kolo Muani et Michael Olise en 2025, auxquels il faut ajouter le CSC de l’Espagnol Vivian.

Mots-clés

Entre 1904 et 1919, 128 internationaux ont porté au moins une fois le maillot de l’équipe de France. Si leur carrière internationale est la plupart du temps anecdotique, leur vie est souvent romanesque.

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