En juin 2022, l’équipe de France va jouer quatre fois en 11 jours, du 3 au 13 contre le Danemark, en Croatie, en Autriche et à nouveau face à la Croatie. Je me suis demandé si c’était déjà arrivé depuis 1904. J’ai trouvé deux précédents, mais les deux fois c’était dans le cadre d’un tournoi, même s’il ne s’agissait ni d’une Coupe du monde ni d’un championnat d’Europe.
Une première aux JO contre l’Uruguay
C’est entre mai et juin 1924 qu’on trouve le premier cas. Cette année-là, l’équipe de France, qui n’a disputé que 59 rencontres en vingt ans d’existence, va jouer quatre fois en 19 jours, entre le 17 mai et le 4 juin. Emmenés par le gardien du Red Star Pierre Chayriguès, qui entame sa dernière année en sélection à 32 ans, les Tricolores affronte une équipe d’Angleterre qui aligne une majorité de professionnels. Ils s’inclinent logiquement (1-3) mais n’ont encaissé le dernier but qu’à sept minutes de la fin par un csc d’Edouard Baumann. Dix jours plus tard, à Saint-Ouen, commence l’épreuve de football des Jeux olympiques de Paris. La France bat largement la Lettonie (7-0) avec un triplé d’Edouard Crut et deux doublés de Jean Boyer et Paul Nicolas. Cinq jours après, à Colombes contre l’Uruguay, meilleure équipe du monde, ce n’est plus la même histoire. Pour le premier match de la France contre une équipe sud-américaine, le suspens dure une demi-heure, le temps que Scarone redonne l’avantage à la Celeste après l’égalisation de Paul Nicolas (1-5). La saison se termine trois jours plus tard contre la Hongrie à la Cavée verte du Havre, pour une courte défaite (0-1).
Il faudra attendre 48 ans pour revoir quatre matchs rapprochés hors Coupe du monde, même si les Bleus ne joueront que deux fois à celle de 1954 et trois fois à celle de 1966. En juin 1972, ils embarquent au Brésil pour disputer la Minicopa, ou Coupe de l’Indépendance, une sorte de tournoi amical vaguement concurrent à la Coupe du monde que nous a raconté Pierre Cazal. Sous un soleil cuisant, ils vont se promener de Salvador de Bahia à Maceio et croiser pour la première fois une sélection africaine, avant de se faire sortir par l’Argentine sans perdre (0-0). Le tout en quinze jours.
Il est arrivé beaucoup plus souvent que l’équipe de France joue trois matchs rapprochés hors phase finale. Nous avons encore tous en tête les semaines internationales d’octobre et novembre 2020, ainsi que celle de septembre 2021 (qui elle, comptait trois matchs de compétition). L’enchaînement est si compliqué que les Bleus y ont laissé des plumes, avec un nul à domicile contre le Portugal, une défaite improbable face à la Finlande et deux nuls contre la Bosnie et l’Ukraine.
Ce n’était guère mieux en juin 2019 (trois matchs en 9 jours, dont une défaite en Turquie au milieu), en juin 2017 (trois matchs en 12 jours, défaite en Suède au deuxième) ou en juin 2011 (un nul en compétition en Biélorussie et deux victoires amicales).
Trois victoires en quinze jours en avril 1926
Le tout premier cas remonte à trois loin, à avril 1911 pour être précis. Ce printemps-là, l’équipe de France du buteur en série Eugène Maës commençait par un nul contre l’Italie (2-2), puis s’inclinait deux semaines plus tard à Genève contre la Suisse (2-5) avant de se faire corriger dans les grandes largeurs par la Belgique (1-7).
Pendant l’entre-deux guerres, après l’épisode de 1924, les matchs par trois vont se multiplier : on en trouve en avril 1926, avec, ô miracle, trois victoires consécutives en quinze jours (Belgique 4-3, Portugal 4-2 et Suisse 1-0), puis en mai 1928, avec cette fois trois défaites en 17 jours, dont la dernière aux JO d’Amsterdam contre l’Italie (3-4), et encore en mai 1929, pour le même résultat (Angleterre 1-4, Yougoslavie 1-3, Belgique 1-4, admirez la symétrie).
En 1930, il s’agit de préparer la première Coupe du monde en Uruguay. En mai les Français de Thépot, Delfour et du débutant Mattler s’inclinent de peu contre la Tchécoslovaquie (2-3 et l’Ecosse (0-2) mais vont gagner en Belgique (2-1). Sans conséquences pour la suite, puisque les trois adversaires en Coupe du monde seront américains (Mexique, Argentine et Chili).
A Berlin en mars 1933
En juin 1932, c’est la tournée en Europe centrale, première du genre, dans des conditions pour le moins folkloriques racontées par Raphaël Perry. En huit jours, l’équipe de France avale des centaines de kilomètres en train pour rencontrer la Yougoslavie à Belgrade le 5 (1-2), la Bulgarie à Sofia le 9 (5-3, quadruplé de Jean Sécember) et la Roumanie à Bucarest le 12 (3-6).
Les trois matchs de mars 1933 se jouent dans une ambiance très lourde, juste après les élections législatives qui mènent Hitler au pouvoir en Allemagne. Le 12, l’équipe de France est largement dominée par l’Autriche du prodige Matthias Sindelar (0-4). Une semaine plus tard, elle est à Berlin où, grâce à René Gérard, auteur d’un doublé dans les dix dernières minutes, elle arrache un nul méritoire (3-3). Et le 26, de retour à Colombes, elle prend le dessus sur la Belgique (3-0).
Il faudra attendre le printemps 1947 pour voir à nouveau trois matchs rapprochés. Le 26 mai, emmenés par un Jean Baratte inspiré, les Tricolores surclassent les Pays-Bas (4-0) avant d’en faire presque de même sur la Belgique (4-2, doublé d’Ernest Vaast) puis d’aller gagner en Suisse (2-1), soit un joli bouquet de trois victoires en quatorze jours.