En septembre 2018, j’avais voulu en avoir le cœur net : d’où vient cette impression que l’équipe de France ouvre souvent le score mais peine à marquer ce deuxième but qui assurerait la victoire ? J’avais alors décortiqué tous les matchs de l’ère Deschamps depuis août 2012.
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Lires les articles Ce qui se passe après l’ouverture du score depuis 2012 et Ce qui se passe après l’ouverture du score en phase finale
Après avoir listé les joueurs français qui ont ouvert le score depuis 1904, je me suis dit qu’il serait intéressant de compléter cet article en l’élargissant à l’ensemble des 916 matchs des Bleus. En effet, autant depuis les années 1960, le nombre de buts par match est suffisamment bas (2,6) pour qu’une ouverture du score soit déterminante, autant dans la première moitié de l’histoire des Bleus, celle qui va du début du siècle jusqu’au premier Championnat d’Europe des Nations, les scores pléthoriques étaient fréquents (4,6 buts par match). De nombreux buts étaient marqués en début de rencontre, ce qui laissait du temps à l’équipe menée de revenir au score et de l’emporter.
Sur l’ensemble des matchs depuis 1904, la proportion de 0-0 est moindre que depuis 2012 : il y en a eu 67 sur 915 (7%). Restent donc 848 rencontres comptant au moins un but.
78% de chances de victoires pour les Bleus quand ils marquent les premiers
Sur ce total, l’équipe de France a ouvert le score 497 fois (59% environ) et son adversaire 351 fois (41%). Donc, une fois mis de côté les 0-0, les Bleus marquent en premier près de six fois sur dix (contre sept fois sur dix sur la période Deschamps). Autant dire que si c’est désormais une habitude, elle est récente (disons depuis une quarantaine d’années).
Une fois que l’équipe de France mène 1-0, que se passe-t-il ? Le score en reste là, dans 88 cas. Ou bien les Bleus marquent un deuxième but et mènent alors 2-0, ce qu’ils ont fait 267 fois. Ou alors c’est l’équipe adverse qui égalise, dans 142 cas.
Seulement deux défaites depuis 1904 après avoir mené 2-0
A 2-0, c’est l’assurance quasi-certaine de la victoire : les Bleus n’ont perdu que deux fois dans cette configuration : en mai 1928 contre l’Italie aux JO d’Amsterdam (3-4) et beaucoup plus récemment, contre la Colombie en mars 2018 (2-3). Ils ont aussi fait 8 nuls, dont deux restés célèbres et datant de la même année 1976 : celui en amical contre la Tchécoslovaquie en mars pour les débuts de Platini (2-2) et celui de Sofia contre la Bulgarie en octobre (2-2). Il n’y en a plus eu depuis.
Pour résumer, quand ils marquent en premier, les Bleus doublent la mise dans 54% des cas. Dans 18%, ils s’en tiennent là et gagnent 1-0. Le reste (28% des cas), l’adversaire égalise. Les proportions sont à peu près les mêmes que pour la période récente.
Et quand l’adversaire égalise à 1-1 ? C’est alors très serré. Les Bleus gagnent dans 32% des cas, l’équipe adverse dans 30% et le reste (38%) se termine par un nul. Ici, les chiffres sont très différents de la période récente, où les Bleus ne perdent quasiment jamais après une égalisation adverse [1]. Autrement dit, quand les Bleus marquent les premiers, ils gagnent 390 fois sur 497 (78% des cas), pour 63 nuls (13%) et 44 défaites (9%).
L’adversaire gagne deux fois sur trois quand il ouvre le score
Quand c’est l’adversaire qui ouvre le score, que se passe-t-il ? C’est arrivé 350 fois, et dans 52 cas, le score est resté à 0-1. Et là, surprise, les Bleus ont moins souvent égalisé qu’encaissé un second but (155 fois contre 144). Et à 0-2, c’est perdant dans 86% des cas. L’équipe de France a toutefois arraché 15 nuls (le dernier contre l’Argentine en décembre 2022, 3-3), et, quand même, 6 victoires dont quatre dans une période récente contre la Slovénie en 2000, le Costa Rica en 2005, l’Islande en 2012 et la Belgique en 2021 (3-2 à chaque fois).
Si les Bleus égalisent, ils font mieux que lorsque c’est l’adversaire qui revient à leur hauteur (comme pour la période récente d’ailleurs) : 64 victoires qui sont autant de renversements pour 32 défaites et 48 nuls. Si on se souvient de ceux de l’Euro 2000 (Portugal et Italie), celui contre le Paraguay en 1958 n’est pas mal non plus : les Bleus y sont menés 0-1 puis 2-3 et l’emportent 7-3 dans un feu d’artifice offensif.
Celui qui marque le premier l’emporte dans 79% des cas
En résumé, en 915 matchs, les Bleus ont gagné moins souvent (460 fois) qu’ils ont ouvert le score (497), ce qui confirme bien la moindre importance du premier but dans les époques lointaines. Mais ça reste quand même un avantage important : celui qui marque d’abord l’emporte 608 fois sur 848 (72% des cas) et ne perd que 114 fois (13%). Une fois le score ouvert, il y a 126 nuls (15%).
L’équipe qui mène 2-0 a quasiment toujours match gagné : 391 fois sur 422 (93%). Mais quand une équipe égalise à 1-1, elle a un peu plus de chances de l’emporter (110 fois) que de faire un nul (103), le risque de perdre (73 fois) étant moindre.
Pour synthétiser toutes ces informations en un coup d’œil, voici une arborescence. Elle se lit de la façon suivante : sont détaillés pour l’ensemble des 915 matchs les victoires de la France (en bleu), les nuls (en gris) et les défaites (en rouge).
Pour chaque score, le chiffre au-dessus indique le nombre de matchs terminés sur ce résultat : pour les 0-0 c’est 67, pour les 1-0 c’est 88, pour les 0-1 c’est 52.
Les traits orange orientent vers les différents cas, avec pour chacun les statistiques de tout ce qu’il y a à côté et en dessous. Par exemple, les Bleus ont mené 497 fois 1-0, et dans ce cas, ils ont gagné 390 fois (en bleu dans le cercle). A l’inverse, ils ont été menés 351 fois 0-1 et ont perdu 218 fois (en rouge dans le cercle).
Au-delà du deuxième but du match, l’arborescence s’arrête, mais les scores des rencontres à trois buts ou plus sont indiquées en dessous.
Vos commentaires
# Le 21 janvier à 19:35, par Thierry Mégard En réponse à : Ce qui se passe après l’ouverture du score depuis 1904
Respect pour ce gros travail ! Merci beaucoup