Miroir des Sports du 22 avril 1925 (BNF Gallica)
Le stade Pershing, dans le bois de Vincennes, a été construit par les militaires américains pour accueillir les Jeux Interalliés de 1919. L’équipe de France y a déjà joué cinq fois avant d’accueillir l’Autriche le 19 avril 1925. Elle y jouera sept fois en tout.
Pionnière du football européen
La sélection autrichienne qui débarque à Paris, ou plus précisément à Vincennes, n’est pas encore le Wunderteam qui dominera le football de sélections dans les années 1930, mais elle n’en reste pas moins une équipe de très haut calibre. Pionnière du football européen, l’équipe d’Autriche a affronté la Hongrie dès 1902 dans ce qui est reconnu comme le premier match entre sélections nationales disputé sur le continent européen. Les deux formations de l’empire austro-hongrois resteront jusqu’aux années 1920 deux adversaires privilégiés.
Au printemps 1925, l’équipe de France est au plus mal. Un mois plus tôt, elle a concédé un sévère 7-0 à Turin contre l’Italie. Depuis sa défaite face à l’Uruguay aux Jeux Olympiques de Paris, en juin 1924, la sélection tricolore a accumulé les déconvenues. Pire, elle ne marque plus de buts ! Seulement trois des joueurs présents à Turin sont alignés face à l’Autriche : le gardien de l’Olympique Maurice Cottenet, pourtant vivement critiqué, le demi du Red Star Philippe Bonnardel et le Nord Africain André Liminana, de Sidi Bel-Abbès. Celui-ci fut l’une des rares satisfactions de Turin alors qu’il honorait sa première sélection.
Cette équipe de France a besoin de sang neuf et de nouvelles têtes apparaissent : Le défenseur parisien Pierre Lienert (CASG), le milieu Robert Dauphin (Stade Français) et les attaquants Willy Lieb (Lyon) et Marcel Buré (Le Havre) connaissent leur première sélection. On rappelle aussi, outre Jacques Canthelou et François Hugues absents à Turin, les attaquants Ernest Gross et Paul Nicolas. Ce dernier n’avait plus joué en sélection nationale depuis les Jeux de Paris. On lui confie le brassard de capitaine. Quant au Strasbourgeois, il est dans une situation similaire (l’expérience en moins) puisqu’on ne l’avait plus vu depuis le France-Hongrie du Havre disputé quelques jours après l’élimination aux JO.
Complètement dépassée
La rencontre se dispute devant 25.000 spectateurs. L’Autriche ouvre le score à la 11e minute par son attaquant Ferdinand Swatosch, qui joue alors au FC Cologne, en Allemagne. Elle double la mise à la 23e minute par Gustav « Guggi » Wieser, attaquant du Wiener Amateur-Sportverein, club qui deviendra l’Austria de Vienne en 1926. Cinq minutes plus tard, Ferdinand Swatosch inscrit son deuxième but. L’Autriche mène déjà 3-0 après une demi-heure de jeu. L’équipe de France est complètement dépassée par le jeu très élaboré des Autrichiens, dont la plupart sont professionnels.
Miroir des Sports du 22 avril 1925 (BNF Gallica)
La page centrale qu’accorde le Miroir des Sports trois jours après le match fait malicieusement remarquer qu’un grand nombre de photographes étaient massés près du but de Maurice Cottenet alors que son homologue Rudi Aigner ne préoccupe qu’un seul photographe.
En fin de rencontre, l’arbitre italien Antonio Scamoni accorde aux Français un penalty pour une main de Josef Blum, mais Paul Nicolas voit son tir repoussé du pied par Rudi Aigner. Aussitôt après, l’attaquant Wilhelm Cutti inscrit le quatrième but autrichien. 4-0, l’addition est lourde, mais elle reflète parfaitement la différence de niveau entre les deux nations.
Un buteur à Mulhouse
La France attendra encore un an avant de goûter à nouveau à la victoire. Il faut dire que durant ce laps de temps, elle ne disputera qu’une seule rencontre, en mai à Colombes face à l’Angleterre, perdue 3-2. La sélection connaitra ensuite une belle parenthèse en avril 1926, alignant trois victoires consécutives (et 9 buts) contre la Belgique, le Portugal et la Suisse. La belle série s’arrêtera le 30 mai 1926 avec une nouvelle défaite (4-1) face... à l’Autriche.
Ferdinand Swatosch, le bourreau des Tricolores à Pershing, reviendra en France en 1932 au FC Mulhouse où il deviendra entraîneur-joueur. Il dirigera ensuite Schalke 04 et le Borussia Dortmund.
Autriche bat France 4-0
Buts : Swatosch (11’), Wieser (22’), Swatosch (27’), Cuti (84’).
FRANCE : Cottenet - Lienert, Canthelou - Dauphin, Hugues, Bonnardel - Lieb, Gross, Liminana, Nicolas, Bure.
AUTRICHE : Aigner - Rainer, Blum - Resch, Nitsch, Kurz - Fischer, Swatosch, Gschweidl, Cutti, Wieser.
Arbitre : Antonio Scamoni (Italie)
25.000 spectateurs
Joueur | Âge | Poste | Sél./total | Club |
---|---|---|---|---|
Maurice Cottenet | 30 ans | Gardien | 9/18 | Olympique Paris |
Pierre Lienert | 27 ans | Défenseur | 1/1 | CASG Paris |
Jacques Canthelou | 21 ans | Défenseur | 3/11 | FC Rouen |
Robert Dauphin | 20 ans | Demi | 1/15 | Stade Français |
François Hugues | 29 ans | Demi | 21/24 | Red Star |
Philippe Bonnardel | 26 ans | Demi | 21/23 | Red Star |
André Liminana | 26 ans | Attaquant | 2/2 | SC Bel-Abbès |
Willy Lieb | 21 ans | Attaquant | 1/15 | FC Lyon |
Paul Nicolas (cap) | 26 ans | Attaquant | 18/35 | Red Star |
Ernest Gross | 23 ans | Attaquant | 5/5 | Red Star de Strasbourg |
Marcel Buré | 28 ans | Attaquant | 1/1 | Le Havre |