Depuis 1934, l’équipe de France a disputé 18 prolongations. Parmi elles, 7 ont été gagnées, 3 perdues et 8 n’ont pas pu départager les deux protagonistes et ont donné lieu à une séance de tirs au but, ces dernières débouchant sur 3 victoires et 5 défaites. Autrement dit, quand les Bleus vont en prolongations, ils finissent par l’emporter 10 fois et perdent 8 fois.
En mettant de côté les séances de tirs au but, étudiées dans le détail ici, regardons quels sont les différents scénarios des prolongations, et leurs conséquences. A quels moments les buts ont-ils été marqués ? Dans quelle mesure est-il possible d’égaliser ou de renverser le score en prolongations ? Quel est l’impact des remplaçants ?
Pour commencer cette série de trois articles, voici les sept fois où l’équipe de France a marqué en premier. Les trois premières ont eu lieu en Coupe du monde, les deux suivantes à l’Euro, la sixième en Coupe des Confédérations et la septième en barrages de qualifications.
RFA-France, 8 juillet 1982 : 4 buts, un changement adverse
A Séville contre la RFA en demi-finale, alors que le temps règlementaire s’est achevé sur le score de 1-1, Marius Trésor donne l’avantage aux Bleus dès la 93e minute sur un coup franc obtenu côté droit par Alain Giresse. Ce dernier double la mise à la 99e, mais les Allemands peuvent compter sur leurs deux attaquants lancés par Jupp Derwall : Horst Hrubesch a remplacé Klaus Fischer à la 73e et Karl-Heinz Rummenigge est rentré à la place de Felix Magath à la 97e. La RFA finit le match avec 4 joueurs devant, et c’est Rummenigge qui réduit le score très vite (103e), alors que les Français se sont arrêtés de jouer pour protester sur une faute commise sur Giresse après une séquence de passe à dix dans le camp allemand. A 3-2, évidemment, la pression allemande est intense et c’est Hrubesch qui remet de la tête un centre de Littbarski pour Klaus Fischer, lequel égalise d’un retourné (108e).
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Ces quatre buts en un quart d’heure font sauter le score à 3-3, mais plus rien ne sera marqué avant la première séance de tirs au but de l’histoire de la Coupe du monde malgré plusieurs occasions franches devant la cage d’Ettori. Cette séance sera fatale aux Bleus (4-5). Les deux remplacements successifs et contraints pour blessure de Bernard Genghini par Patrick Battiston (50e) puis de ce dernier par Christian Lopez (60e) ont pesé lourd dans la balance, à un moment du match où l’équipe de France avait pris le dessus.
France-Belgique, 28 juin 1986 : deux buts, pas de changement
Quatre ans plus tard, pour la troisième place de la Coupe du monde mexicaine, la France retrouve la Belgique à Puebla dans l’indifférence générale. Les deux équipes ne peuvent se départager au terme des 90 minutes (2-2) et prolongent leur séjour mexicain d’une demi-heure supplémentaire. Bernard Genghini marque juste avant le changement de côté (104e), et Manuel Amoros assure le résultat sur pénalty (111e). Il n’y a pas eu de remplacements pendant les prolongations, les deux sélectionneurs les ayant effectués dans le temps réglementaire (Maxime Bossis avait remplacé Yvon Le Roux à la 56e et Thierry Tusseau avait suppléé Jean Tigana à la 84e).
France-Paraguay, 28 juin 1998 : un but, un changement adverse
Pour ces huitièmes de finale à Lens, les Bleus partent largement favoris contre le Paraguay. Mais, privés de Zinédine Zidane (suspendu) et de Christophe Dugarry (blessé), ils ne trouvent pas la faille dans une défense très regroupée (0-0) et sont embarqués dans les prolongations, où s’applique pour la première fois en Coupe du monde la règle du but en or : le premier qui marque a gagné. Aimé Jacquet a remplacé Thierry Henry, blessé, par Robert Pirès à la 65e et Emmanuel Petit par Alain Boghossian cinq minutes plus tard, alors que Stéphane Guivarc’h relaie Bernard Diomède à la 77e.
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Côté paraguayen, il reste un changement à faire après le temps réglementaire. C’est Aristides Rojas qui remplace José Cardozo à la 91e. Mais plus le temps passe, plus les Paraguayens défendent avec acharnement, tout en laissant planer la menace d’un contre définitif. Alors que la séance fatidique des tirs au but s’approche, ce qu’attend avec gourmandise le gardien-capitaine-buteur José Luis Chilavert, un centre en cloche de Robert Pirès côté droit trouve David Trezeguet dans la surface, lequel remet de la tête à Laurent Blanc qui marque de près, du tibia (114e). Le soulagement est immense, la catastrophe est évitée.
Portugal-France, 28 juin 2000 : un but, un changement français, un changement adverse
Avec une équipe brillante et très ambitieuse, le Portugal veut sa revanche, seize ans après la demi-finale de Marseille. A la fin du temps réglementaire, le score est de 1-1, mais avec la règle du but en or (qui aurait qualifié les Portugais en 1984), il ne peut pas y avoir plus d’un but cette fois-ci. Les deux sélectionneurs ont procédé chacun à deux changements, il leur reste une dernière cartouche. Humberto Coelho remplace dès le début des prolongations Dimas par Rui Jorge, alors que Roger Lemerre sort Thierry Henry pour David Trezeguet à la 106e, quand débute la deuxième période.
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La tension est immense, les deux équipes attaquent et s’exposent à des contres. A la 114e minute, après qu’une phénoménale remontée de balle de Zidane ait été interceptée in extremis par Rui Jorge, les Bleus poussent et Sylvain Wiltord sert David Trezeguet dans la surface. Le tir de ce dernier est repoussé par Vitor Baia mais Wiltord a suivi et sa frappe est sortie en corner par Abel Xavier, près de son poteau. Mais il a dévié le ballon de la main et l’arbitre, dans le chaos des protestations portugaises, consulte son juge de touche (il n’y a pas de VAR, évidemment) et désigne le point blanc.
Un pénalty qui peut devenir potentiellement un but en or, c’est un peu comme une séance de tirs au but mais à un seul coup, sans possibilité de riposter. Il faut des nerfs d’acier pour résister à la pression immense, mais Zidane est parfaitement calme et envoie son ballon dans la lucarne gauche alors que Vitor Baia est parti à droite. Les Bleus sont en finale, comme en 1984, comme en 1998.
Italie-France, 2 juillet 2000 : un but, pas de changement
Quatre jours plus tard, à Rotterdam, l’équipe de France retrouve non pas les Pays-Bas, qui l’avait battue au premier tour, mais l’Italie. La finale est plus ouverte qu’on aurait pu le penser et la Squadra pense l’avoir emporté quand elle tient son petit but d’avance (Delvecchio, 55e) dans le temps additionnel. Mais comme Dino Zoff, Roger Lemerre a déjà lancé ses trois remplaçants, les mêmes que face au Portugal (Sylvain Wiltord, David Trezeguet et Robert Pirès), et c’est Trezeguet qui dévie de la tête le ballon de l’égalisation signée Wiltord.
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Les prolongations sont un énorme coup dur pour des Italiens qui ont déjà joué deux heures, dont une bonne partie à dix, lors de la demi-finale contre les Pays-Bas, et les Bleus poussent sur le but de Toldo, KO quelques minutes après un choc contre le pied de David Trezeguet. On approche du quart d’heure (103e minute) quand Robert Pirès récupère un ballon côté droit, percute et délivre un centre en retrait qui trouve David Trezeguet dans la surface. Lequel claque une volée du gauche victorieuse entrée dans l’histoire.
Cameroun-France, 29 juin 2003 : un but, un changement adverse
Dans un monde idéal, ce match-là n’aurait pas dû avoir lieu : trois jours après le décès tragique de Marc-Vivien Foé sur la pelouse du stade de Gerland, les Camerounais sont en deuil et pas en état de jouer une finale de Coupe des Confédérations. Mais la FIFA tient à son match, et donc le match a lieu. Comme on pouvait s’y attendre, il ne s’y passe pas grand chose, même si le Cameroun fait mieux que se défendre face à des Bleus la tête ailleurs. Jacques Santini a fait ses trois changements quand le temps réglementaire est sifflé, avec Robert Pirès, Lilian Thuram et Olivier Kapo qui ont remplacé Sylvain Wiltord, Willy Sagnol et Olivier Dacourt. Winfried Schäfer remplace Valéry Mezague par Achille Emana au tout début des prolongations. Mais le but en or s’applique encore, et au bout de sept minutes, un centre venu de Thuram venu de la droite est dévié du genou par Thierry Henry. C’est terminé prématurément, pour la quatrième fois au profit des Bleus depuis 1998.
France-République d’Irlande, 18 novembre 2009 : un but, un changement adverse
Embarqué dans un périlleux barrage aller-retour face à l’Irlande, l’équipe de France croit avoir fait le plus dur après l’avoir emporté à Dublin (1-0, but de Nicolas Anelka). Mais au retour, les Irlandais ouvrent le score par Robbie Keane et pousse des Bleus très maladroits en prolongations. Raymond Domenech a déjà fait tous ses changements (Sébastien Squillaci pour Julien Escudé en tout début de match, puis Sidney Govou pour André-Pierre Gignac et enfin Florent Malouda pour Yohan Gourcuff). Côté irlandais, Giovanni Trapattoni a encore un changement à faire : ce sera McGeady pour Lawrence à la 107e minute.
Il n’y a plus de but en or désormais, mais c’est un but de handball que signent les Français à la 103e minute quand, sur un coup franc de Florent Malouda, Thierry Henry contrôle le ballon de l’avant-bras puis de la main pour l’empêcher de sortir, puis centre pour William Gallas qui égalise de la tête. A 1-1, les Français sont qualifiés pour la Coupe du monde alors que les Irlandais protestent. Ils n’iront pas en Afrique du Sud, et les Bleus ne feront qu’y passer.