Jean Vincent, la passion du bleu

Publié le 10 octobre 2023 - Richard Coudrais

A l’occasion de la sortie d’une biographie qui lui est consacrée (“Jean Vincent, la passion du football” de Daniel Ollivier, éditions Eric Jamet), retour sur la carrière en bleu d’un des meilleurs attaquants de l’histoire du foot français.

5 minutes de lecture

Jean Vincent a disputé entre 1953 et 1961 quarante-six rencontres officielles en équipe de France, un total qui le positionnait alors à la quatrième place des footballeurs français les plus sélectionnés derrière Roger Marche, Robert Jonquet et Etienne Mattler.

A 19 ans, le jeune ailier de l’US Auchel participe au premier titre international jamais remporté par une équipe de France, le championnat d’Europe junior (U19) de 1949 organisé aux Pays-Bas. L’équipe française, également composée de Jacques Foix, Antoine Bonifaci, Francis Méano et Jean Fournet-Fayard, s’impose 4-1 à Rotterdam contre l’équipe du pays hôte, après avoir disposé de la Belgique et de l’Ecosse.

Une vrai-fausse première sélection

Jean Vincent est alors recruté par le LOSC, le meilleur club français de l’époque, qui court après son deuxième titre depuis quatre ans et vient de terminer son troisième championnat consécutif à la deuxième place. Vincent est régulièrement appelé en équipe de France espoirs. En décembre 1953, l’équipe de France doit disputer contre le Luxembourg, une rencontre qualificative pour la Coupe du monde. Mais la qualification étant déjà acquise, les sélectionneurs décident de laisser les titulaires habituels au repos et font appel à onze novices, parmi lesquels Jean Vincent, auteur des deux buts qui portent le score à 3-0 après dix minutes de jeu. Les jeunes Français s’imposent 8-0.

Bien qu’il s’agisse d’une rencontre qualificative pour la Coupe du monde, la FFF décide de la classer en catégorie Espoirs et de priver l’ensemble des joueurs de leur première sélection A. Ce n’est qu’en 1991 qu’en vertu des règlements de la FIFA, la rencontre sera reconnue comme le 213e match officiel de l’histoire des Bleus. Chacun des joueurs participant gagnera donc une sélection supplémentaire (la seule pour certains) et les buteurs se verront créditer de quelques unités supplémentaires, notamment le déjà gourmand Just Fontaine, auteur d’un triplé contre les Luxembourgeois.

A cette époque, alors qu’il est âgé de 23 ans, la carrière internationale de Jean Vincent se résume à l’équipe de France B où il est régulièrement appelé. Il obtient sa première sélection A (pour l’époque) en mai 1954 à Bruxelles, avec un Belgique-France de préparation pour la Coupe du monde en Suisse. Les deux équipes font match nul (3-3) mais Jean Vincent ouvre le score et réalise une performance suffisamment intéressante pour être sélectionné in-extremis parmi les 22 pour la Coupe du monde helvétique.

Titulaire indiscutable

L’attaquant lillois participe aux deux rencontres du mondial suisse, qui laisseront un goût d’inachevé aux Tricolores, battus 1-0 à Lausanne par la Yougoslavie et vainqueurs inutiles du Mexique (3-2) à Genève. Jean Vincent devient malgré tout un titulaire indiscutable de l’équipe de France. Il marque notamment lors de victoires mémorables sur terrain adverse, à Hanovre en octobre 1954 contre les champions du monde allemands (3-1) et à Madrid en mars 1955 contre l’Espagne de Di Stéfano (2-1). Il est également présent pour le déplacement historique à Moscou en octobre 1955, mais il doit céder sa place après une demi-heure de jeu en raison d’une blessure au genou.

Jean Vincent a reçu une reconnaissance internationale à l’occasion d’une rencontre de prestige à Belfast opposant une équipe de Grande-Bretagne à une sélection des joueurs du Continent. Jean Vincent évolue dans cette dernière avec Raymond Kopa et Robert Jonquet et marque même le premier des quatre buts de la victoire européenne (4-1).

En 1956, Jean Vincent quitte un LOSC en perte de vitesse pour le Stade de Reims, récent finaliste de la toute nouvelle Coupe des clubs champions. Dans le même temps se construit une équipe de France qui commence à compter quelques attaquants de grande qualité parmi lesquels Just Fontaine, Roger Piantoni, Thadée Cisowski et Jean Vincent. L’équipe de France est pourtant privée de son meilleur joueur, Raymond Kopa, retenu par le Real Madrid.

Un été 1958

C’est en Suède, en juin 1958, que cette équipe de France va concrétiser les espoirs qu’on n’osait placer en elle. Kopa a pu rejoindre ses coéquipiers et devenir le chef d’orchestre d’un quintet composé de Wisniewski, Piantoni, Fontaine et Vincent. Ce dernier participe à l’ensemble des rencontres de l’épopée et même s’il n’inscrit finalement qu’un seul but (le septième contre le Paraguay, battu 7-3), il démontre sa grande capacité d’adaptation en fonction de ses partenaires et du contexte des rencontres.

Si son poste de prédilection est l’aile gauche, Jean Vincent est capable d’assumer n’importe quel rôle avec un égal bonheur. La densité d’attaquant de qualité chez les Tricolores l’a souvent poussé à un rôle plus défensif, se retrouvant inter ou demi, et même parfois en défense quand les circonstances l’exigeaient (il a même terminé une finale de Coupe de France au poste de gardien de but !).

Sur la lancée de son bel été suédois, l’équipe de France poursuit sur sa lancée et accède aux demi-finales de la toute nouvelle Coupe d’Europe des Nations. Elle perd malheureusement un à un les membres de sa prestigieuse attaque, Kopa, Fontaine, Piantoni, tous victimes de blessures. Lors de la demi-finale qui l’oppose à la Yougoslavie, c’est Jean Vincent qui porte le brassard de capitaine. Il inscrit même le premier but français, immédiatement après l’ouverture du score de Galic et donne à Wisniewski le ballon du 3-1.

Le capitaine du déclin

Alors qu’une belle victoire semblait se dessiner, l’équipe de France perd le match de façon rocambolesque (5-4) et entame déjà, sans le savoir encore, une longue traversée du désert. Jean Vincent, qui atteint les trente ans, descend au milieu du terrain et reste le capitaine des Bleus. Un brassard qu’il cède à Raymond Kopa lors du retour de celui-ci chez les Bleus, avant de glisser sur le banc de touche après sa quarante-cinquième sélection (46e aujourd’hui) à Bruxelles pour une défaite (0-3) contre la Belgique.

Sa dernière apparition en bleu date de septembre 1961 pour un match de préparation disputé au Parc des Princes contre le Servette de Genève et une victoire 6-0. Malgré tout, c’est du banc de touche, à Milan, qu’il assiste impuissant à la défaite (1-0) des Tricolores face à la Bulgarie qui leur coûtera la participation à la Coupe du monde au Chili.

22 buts en 46 sélections

Jean Vincent a connu 46 sélections en équipe de France où il a inscrit 22 buts (23 victoires, 12 matchs nuls, 11 défaites). Six fois capitaine, il a joué 4081 minutes selon le site fff.fr.

Sel.MatchDateLieuAdversaireScoreTpsJeuNote
Amateur 08/04/1950 Southampton Angleterre amateur 0-0 90
France B 05/10/1952 Strasbourg Sarre 1-3 90
France B 11/11/1952 Toulouse Ecosse B 0-0 90
France B 16/11/1952 Luxembourg Luxembourg 1-0 90
France B 14/05/1953 Constantine Sél.Constantine 6-0 90
France B 22/10/1953 Le Caire Egypte 0-0 90
1 qCM 17/12/1953 Paris (Parc) Luxembourg 8-0 90 2 buts
France B 10/04/1954 Rome Italie B 0-0 90
2 Amical 30/05/1954 Bruxelles Belgique 3-3 90 1 but
3 CM 16/06/1954 Lausanne* Yougoslavie 0-1 90
4 CM 19/06/1954 Genève* Mexique 3-2 90 1 but
N/O 07/10/1954 Paris (Parc) Sél. Afrique du Nord 2-3 90
5 Amical 16/10/1954 Hanovre RFA 3-1 90 1 but
6 Amical 11/11/1954 Colombes Belgique 2-2 90
N/O 09/03/1955 Paris (Parc) Standard de Liège 3-2 90
7 Amical 17/03/1955 Madrid Espagne 2-1 90 1 but
8 Amical 03/04/1955 Colombes Suède 2-0 90
9 Amical 15/05/1955 Colombes Angleterre 1-0 90
10 Amical 09/10/1955 Bâle Suisse 2-1 90
11 Amical 23/10/1955 Moscou URSS 2-2 31’ >
12 Amical 25/03/1956 Colombes Autriche 3-1 90 1 but
13 Amical 07/10/1956 Colombes Hongrie 1-2 90
14 Amical 21/10/1956 Colombes URSS 2-1 90 1 but
15 qCM 11/11/1956 Colombes Belgique 6-3 90 1 but
16 Amical 24/03/1957 Lisbonne Portugal 1-0 90
17 qCM 02/06/1957 Nantes Islande 8-0 90 2 buts
France B 05/10/1957 Athènes Grèce 1-2 90
France B 08/10/1957 Tel Aviv Israël 5-4 90 1 but
18 qCM 27/10/1957 Bruxelles Belgique 0-0 90
19 Amical 27/11/1957 Londres Angleterre 0-4 90
20 Amical 25/12/1957 Paris (Parc) Bulgarie 2-2 90
21 Amical 13/03/1958 Paris (Parc) Espagne 2-2 90
22 Amical 16/04/1958 Paris (Parc) Suisse 0-0 90
N/O 13/05/1958 Paris (Parc) Sélection Paris 2-1 90
23 CM T1 08/06/1958 Norrköping* Paraguay 7-3 90 1 but
24 CM T1 11/06/1958 Västeras* Yougoslavie 2-3 90
25 CM T1 15/06/1958 Örebro* Ecosse 2-1 90
26 CM 1/4 19/06/1958 Norrköping* Irlande du Nord 4-0 90
27 CM 1/2 24/06/1958 Solna* Brésil 2-5 90
28 CM 3pl 28/06/1958 Göteborg* RFA 6-3 90
29 qEuro 01/10/1958 Paris (Parc) Grèce 7-1 90 2 buts
30 Amical 05/10/1958 Vienne Autriche 2-1 90
31 Amical 26/10/1958 Colombes RFA 2-2 90
32 Amical 09/11/1958 Colombes Italie 2-2 90 1 but
33 Amical 01/03/1959 Colombes Belgique 2-2 90 2 buts
34 Amical 11/10/1959 Sofia Bulgarie 0-1 90
35 Amical 11/11/1959 Colombes Portugal 5-3 90
36 qEuro 13/12/1959 Colombes Autriche 5-2 90 2 buts
37 Amical 17/12/1959 Paris (Parc) Espagne 4-3 90 1 but
38 Amical 28/02/1960 Bruxelles Belgique 0-1 90
39 Amical 16/03/1960 Paris (Parc) Chili 6-0 90 1 but
40 Euro 1/2 06/07/1960 Paris (Parc) Yougoslavie 4-5 90 1 but (cap)
41 Euro 3pl 09/07/1960 Marseille Tchécoslovaquie 0-2 90 (cap)
42 qCM 25/09/1960 Helsinki Finlande 2-1 90 (cap)
43 Amical 28/09/1960 Varsovie Pologne 2-2 90 (cap)
44 Amical 12/10/1960 Bâle Suisse 2-6 90 (cap)
45 Amical 30/10/1960 Solna Suède 0-1 90
46 Amical 15/03/1961 Paris (Parc) Belgique 1-1 90 (cap)
N/O 13/09/1961 Paris (Parc) Servette Genève 6-0 90

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Hommage à Pierre Cazal