Les résultats : une seule défaite, mais qui coûte cher
Avec 10 victoires (et une seule défaite) pour 15 matches joués, l’année 2014 est plutôt bien placée. C’est la douzième meilleure de l’histoire, et pour trouver mieux, il faut remonter à 2006. C’est même la septième au nombre de victoires. 2014 a un pont commun avec 2004 : le même nombre de matches joués, et le même nombre de défaites. Et comme il y a dix ans, ce seul échec a été payé cash, puisqu’il n’était pas rattrapable. La différence, c’est que le match perdu contre la Grèce sanctionnait une équipe nettement favorite mais sur la pente descendante, alors que celui face à l’Allemagne, largement prévisible, a marqué un coup d’arrêt dans la progression d’une équipe jeune et inexpérimentée.
De même, on peut se féliciter de la bonne tenue de la défense des Bleus en 2014 : sept buts encaissés en quinze rencontres, c’est très peu. Dans le détail, si trois de ces buts n’ont pas eu d’incidence sur le résultat final (les deux contre la Suisse et celui face au Portugal), quatre autres ont pesé lourd : ceux concédés au Paraguay, à la Serbie et à l’Albanie ont coûté la victoire, et celui de Mats Hümmels à Rio a entraîné l’élimination. Les Bleus n’ont été menés que deux fois au score cette année (Allemagne et Albanie) mais n’ont pas su renverser le résultat. C’est aussi une de leurs limites du moment.
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Les adversaires : une Jamaïque très amicale, une Allemagne impitoyable
Il y avait du lourd cette année : le vice-champion du monde (Pays-Bas), le futur champion du monde (Allemagne), le double champion d’Europe (Espagne), l’équipe du dernier Ballon d’Or (Portugal), une sélection en pleine confiance (Suisse) et des équipes moyennes mais pas toujours faciles à manœuvrer (Norvège, Paraguay, Nigéria, Serbie, Suède). La catégorie adversaires prenables comprenait pour sa part la Jamaïque, le Honduras, l’Equateur, l’Arménie et l’Albanie.
Si l’Espagne, le Portugal et les Pays-Bas ont été plutôt décevants (dans des matches amicaux peu propices à un engagement total), et si la Suisse a été laminée, l’Allemagne a montré qu’elle évoluait un cran au-dessus et qu’elle avait l’expérience qui manque encore aux Bleus. Dans la deuxième catégorie, l’équipe de France s’est amusée contre la Norvège, mais elle a sué sang et eau pour battre le Nigéria et une Suède pourtant privée d’Ibrahimovic. Contre le Paraguay et la Serbie, elle a calé après avoir pourtant ouvert le score.
Enfin, les Bleus ont fait parler leur puissance de feu offensive contre le Honduras, l’Arménie et surtout la Jamaïque (il est vrai doté d’un gardien carnavalesque). Mais contre l’Equateur et l’Albanie, ils n’ont jamais trouvé la solution, montrant encore des difficultés à trouver la faille face à des défenses renforcées.
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Le meilleur moment de l’année : la première mi-temps contre la Suisse à Salvador
Face à une équipe en pleine confiance, qui a battu l’Allemagne et le Brésil en amical,Giroud remplace Griezmann en pointe aux côtés de Benzema, alors que Moussa Sissoko supplée Paul Pogba qui avait été moyen (et impulsif) contre le Honduras.
Le début est très prudent, on s’observe et personne ne s’engage. Il faut attendre la 6e minute pour voir un premier tir enroulé de Benzema aux vingt mètres, à côté. Juste après, Giroud percute le défenseur Von Bergen d’un pied levé en pleine tête. C’est peut-être le tournant du match. Van Bergen est le meilleur défenseur suisse, et sans lui ce n’est plus pareil. D’autant que son remplaçant, Philip Senderos, n’est pas un foudre de guerre ni un monstre de vitesse.
A la 16e, une percée de Giroud débouche sur un centre pour Benzema dégagé en corner. Valbuena le tire, Giroud place une tête dans la lucarne de Benaglio. Les Rouges n’auront pas le temps de reprendre leurs esprits : soixante-six secondes plus tard, Benzema intercepte une passe en retrait défectueuse de Behrami à quarante mètres, perce, sert Matuidi lancé dans la surface et le Parisien place un tir du gauche entre le poteau et le gardien. 2-0, le feu d’artifice vient de commencer.
Pourtant, pendant un quart d’heure, les Suisses vont sembler réagir. A la 25e, Benzema accélère plein axe après un relais Valbuena-Matuidi et tire du gauche à l’entrée de la surface. Benaglio se couche, mais on sent que ce n’est que partie remise. Le temps que Shaqiri place un coup-franc repoussé par la défense et repris par Xhaka en position de hors-jeu (27e), et Giroud se signale sur une ouverture longue de Varane par une frappe puissante au dessus après avoir effacé Senderos (28e). Le match s’emballe et sur une frappe plein axe de Mehmedi repoussée par Lloris et repris par Shakiri (30e) et dévié encore par le gardien français.
Pas le temps de souffler qu’un ballon intercepté par Cabaye dans ses 30 mètres arrive très vite sur Benzema qui accélère, entre dans la surface puis est balancé par Djourou alors que le ballon allait sortir (31e). Pénalty. Benzema le tire, Benaglio le sort, Debuchy suit et frappe la barre. On se dit que ce n’est pas bon du tout, mais avec deux buts d’avance, ce n’est évidemment pas comme à 0-0...
A la 40e, alors que le match baisse un peu d’intensité, Shaqiri obtient un corner que frappe Rodriguez. Le contre français est fulgurant. Giroud dégage de la tête dans la surface vers Benzema qui s’appuie sur Varane, lequel lance Giroud plein champ d’une splendide ouverture. L’attaquant d’Arsenal pique un sprint, entre dans la surface adverse et sert parfaitement Valbuena au second poteau qui n’a plus qu’à couper la trajectoire. C’est le frère jumeau du but de Trezeguet en 2003 contre l’Allemagne.
Les Bleus s’amusent, Matuidi tricote au milieu de trois Suisses, sert Benzema qui centre pour Valbuena dont la volée est repoussée comme il peut par Benaglio (42e). Quand l’arbitre siffle la pause, le match est plié, le reste ressemblera plus à une partie amicale. Les Bleus sont intouchables et changent tout à coup de statut. Ce 8-2 en trois heures leur est-il monté à la tête ? Toujours est-il que la suite sera beaucoup plus laborieuse, jusqu’à la panne d’essence du Maracana contre l’Allemagne.
Le pire moment de l’année : le premier quart d’heure contre l’Allemagne à Rio
Il fait une chaleur terrible (29°C) sur le Maracana ce 4 juillet pour le quatrième France-Allemagne de l’histoire de la coupe du monde. Deschamps opte pour une équipe classique en 4-3-3 avec Valbuena-Benzema-Griezmann devant et Sakho en défense centrale alors que le défenseur de Liverpool n’a pas terminé un seul match. Sissoko et Giroud, pourtant très bons, sont sur le banc. Les premières minutes sont très lentes, mais un premier ballon perdu bêtement par Evra côté gauche à hauteur de la ligne médiane entraîne immédiatement une double occasion allemande avec Özil qui percute et Kroos qui frappe, mais Varane s’interpose (3e).
Nous voilà prévenus : la moindre erreur se paiera cash. Les attaquants français sont confinés dans le rond central et n’en touchent pas une. La possession de balle est allemande. La première impression n’est pas rassurante. Il faut attendre la 7e minute pour voir les Bleus s’installer dans le camp adverse, avec une longue possession terminée par une percée côté gauche de Valbuena pour Griezmann qui remet sur Valbuena, lequel se retourne près de la ligne de but et trouve Benzema à douze mètres des cages, mais le plat du pied de l’avant-centre madrilène n’est pas cadré.
On se dit alors qu’il y a la place pour faire quelque chose, à condition d’être réaliste devant. Le milieu de terrain a toujours beaucoup de mal. Côté droit, Lahm accélère, trouve Müller plein axe qui sert Özil dans la surface, sans résultat (9e). Benzema réplique par un débordement à droite pour Valbuena qui cherche Griezmann, mais l’attaque n’aboutit pas (10e). Juste après, une longue ouverture de Sakho trouve Griezmann seul dans la surface, mais le centre vers Benzema est coupé par Hummels (12e).
C’est alors qu’une faute anodine et inutile de Pogba sur Kroos (il pose la main sur l’épaule du milieu adverse) à 35 mètres côté gauche va donner une occasion aux Allemands. Kroos frappe le coup franc et Hümmels dégage Varane du bras et place une tête sous la barre de Lloris (13e). C’est le pire scénario possible qui s’est joué là. Les Bleus sont menés au score pour la première fois depuis le match aller contre l’Ukraine et face à une équipe comme celle-là, ce n’est pas une bonne nouvelle. L’ironie de l’histoire voudra que c’est par des erreurs de ses deux joueurs les plus prometteurs (et les plus jeunes parmi les titulaires) que l’équipe de France perd le fil du match. C’est moins par le talent que par l’expérience du haut niveau que tout s’est joué à Rio ce jour-là.
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