Mise à jour d’un article initialement paru en juillet 2019.
C’est normalement le poste le plus stable d’une équipe. Le gardien de but est le dernier à qui on pense pour un remplacement, surtout en compétition : il faut un cas de force majeure comme une blessure ou une expulsion pour voir entrer un gardien remplaçant, même si désormais il y en a deux sur le banc pour les matchs internationaux.
Depuis 1904, les remplacements de gardiens en cours de match sont très rares : on en compte à peine 26, dans des circonstances variées.
Crozier avait un train à prendre
Les deux premiers ont vu un joueur de champ prendre la place du gardien faute de remplaçant. Le motif de la sortie de Georges Crozier, le 7 mai 1905 à Bruxelles, est sans doute le plus burlesque : le gardien français quitte le terrain à la 65e minute... parce qu’il avait un train à prendre pour rejoindre sa caserne ! Il y a déjà 4-0 pour la Belgique à ce moment-là, et le défenseur Fernand Canelle qui prend sa place dans les cages, les Français terminant le match à dix, en encaisse trois autres.
Le deuxième est plus classique, même si le cadre ne l’est pas : c’est en effet à l’occasion du premier match de Coupe du monde à Montevideo contre le Mexique qu’Alex Thépot sort sur blessure après 26 minutes. Augustin Chantrel prend sa place et la France, à dix, battra facilement les Mexicains 4-1. Mais c’est Lucien Laurent qui est entré dans l’histoire en marquant le premier but de la compétition après 19 minutes.
Chaisaz, deux sélections, jamais titulaire
Le gardien du Stade Français Raoul Chaisaz n’a pas fait long feu en sélection, mais il a participé à la tournée homérique dans les Balkans en juin 1932. Et il a disputé les deux premiers matchs en remplaçant à chaque fois le titulaire André Tassin : à Belgrade à la mi-temps alors que le score est de 1-1 (défaite finale 1-2) et à Sofia à la 62e, après que les Bulgares, menés 5-1, aient blessé André Tassin à coups de pieds dans le visage. Chaisaz encaissera deux buts mais les Bleus l’emporteront 5-3. Et Chaisaz ne sera jamais titulaire.
Vignal, casse-cou de service
René Vignal n’était pas seulement l’un des meilleurs gardiens français de l’après-guerre : c’était aussi un joueur intrépide qui n’hésitait pas à sortir dans les pieds des attaquants, quitte à se blesser sérieusement. Le 20 septembre 1953 contre le Luxembourg, il est mis KO d’un coup de genou dans la tête par Antoine Kohn, qui égalise sur l’action dès la 6e minute. Vignal est remplacé par François Remetter et les Bleus l’emportent 6-1. Deux mois plus tard, le 11 novembre face à la Suisse, c’est encore sur un but adverse (le troisième, à la 21e minute) que Vignal est mis KO et hurle qu’il n’y voit plus rien. François Remetter le supplée une nouvelle fois et la France s’incline 2-4.
Bats, KO technique
Plus récemment, on se souvient de la sortie sur civière de Jean-Paul Bertrand-Demanes au Monumental de Buenos Aires contre l’Argentine en juin 1978. Touché au dos après avoir heurté son poteau, le gardien nantais avait été remplacé par Dominique Baratelli, lequel avait été battu par un tir lointain de Luque. Joël Bats a été remplacé deux fois suite à des blessures, en mars 1984 contre l’Autriche (sans gravité) et en août 1987 à Berlin contre la RFA (mis KO par un ballon en plein visage). Enfin, la dernière blessure d’un gardien remonte à Lionel Letizi contre le Cameroun en octobre 2000, remplacé par Richard Dutruel qui ne disputera que 33 minutes en sélection, le plus petit total pour un gardien de l’équipe de France.
L’échange à la mi-temps, un classique passé de mode
Il y a évidemment beaucoup moins à dire sur les remplacements de gardiens à la mi-temps, presque toujours en match amical. Ils représentent plus de la moitié du total (14 sur 26) et étaient très prisés entre 1965 et 1981. Michel Hidalgo en a fait pas moins de quatre en seulement deux ans, preuve qu’il ne savait pas comment résoudre l’équation du gardien qui l’avait pénalisé en 1978 et lui coûterait encore cher en 1982. Les quatre fois, il a fait sortir Dominique Dropsy, pour le remplacer par quatre prétendants différents, qui n’eurent guère plus de succès que lui : André Rey, Philippe Bergeroo, Jean-Luc Ettori et Jean Castaneda.
C’est désormais quasi-disparu, alors même qu’on pourrait imaginer qu’avec six changements possibles en amical, un sélectionneur pourrait sans grand risque tester un nouveau gardien sans pour autant le titulariser. Mais le dernier à avoir fait l’expérience est Didier Deschamps Alphonse Aréola remplaçant Mike Maignan contre l’Autriche en septembre 2022. Le précédent était d’ailleurs Mike Maignan suppléant Steve Mandanda (qui avait pris un coup en fin de première période) contre l’Ukraine en septembre 2020. Raymond Domenech était le précédent avec le duo Sébastien Frey-Steve Mandanda contre l’Equateur en mai 2008, ce qui profita au second contre le premier. Roger Lemerre avait huit ans plus tôt sorti Fabien Barthez à la mi-temps du match contre la Sélection FIFA à Marseille pour faire jouer Ulrich Ramé quelques semaines après l’Euro.
Hugo Lloris expulsé, sérieusement ?
Avant celui de Mandanda par Maignan, le précédent remplacement de gardien datait de septembre 2009 : c’était Hugo Lloris, expulsé à Belgrade lors d’un Serbie-France pour une faute dans la surface sur Zigic, en position de dernier défenseur selon l’arbitre M. Rosetti. Carton rouge et pénalty à la 9e minute : Lloris, remplacé par Mandanda, est le seul gardien exclu de l’histoire des Bleus. Ce n’est pourtant pas le plus fou...
Les 26 changements de gardiens depuis 1904
# | date | adv. | score | titulaire | remplaçant | mn |
---|---|---|---|---|---|---|
887 | 22/09/2022 | Autriche | 2-0 | Maignan | Aréola | 45 |
859 | 07/10/2020 | Ukraine | 7-1 | Mandanda | Maignan | 45 |
718 | 09/09/2009 | Serbie | 1-1 | Lloris | Mandanda | 9 |
699 | 27/05/2008 | Equateur | 2-0 | Frey | Mandanda | 45 |
599 | 04/10/2000 | Cameroun | 1-1 | Letizi | Dutruel | 57 |
597 | 16/08/2000 | Sélection FIFA | 5-1 | Barthez | Ramé | 45 |
512 | 28/07/1993 | Russie | 3-1 | Martini | Lama | 45 |
464 | 12/08/1987 | Allemagne | 1-2 | Bats | Martini | 85 |
432 | 28/03/1984 | Autriche | 1-0 | Bats | Bergeroo | 62 |
404 | 15/05/1981 | Brésil | 1-3 | Dropsy | Castaneda | 45 |
385 | 27/02/1980 | Grèce | 5-1 | Dropsy | Ettori | 45 |
393 | 10/10/1979 | Etats-Unis | 3-0 | Dropsy | Bergeroo | 45 |
391 | 02/05/1979 | Etats-Unis | 6-0 | Dropsy | Rey | 45 |
384 | 06/06/1978 | Argentine | 1-2 | B.-Demanes | Baratelli | 55 |
360 | 26/04/1975 | Portugal | 0-2 | Charrier | Baratelli | 45 |
308 | 22/03/1967 | Roumanie | 1-2 | Eon | Carnus | 45 |
292 | 24/03/1965 | Autriche | 1-2 | Bernard | Aubour | 45 |
268 | 02/04/1961 | Espagne | 0-2 | Bernard | Colonna | 45 |
254 | 11/11/1959 | Portugal | 5-3 | Colonna | Lamia | 62 |
249 | 26/10/1958 | Allemagne | 2-2 | Colonna | Abbes | 30 |
211 | 11/11/1953 | Suisse | 2-4 | Vignal | Remetter | 22 |
208 | 20/09/1953 | Luxembourg | 6-1 | Vignal | Remetter | 8 |
111 | 09/06/1932 | Bulgarie | 5-3 | Tassin | Chaisaz | 62 |
110 | 05/06/1932 | Yougoslavie | 1-2 | Tassin | Chaisaz | 45 |
97 | 13/07/1930 | Mexique | 4-1 | Thépot | Chantrel* | 26 |
3 | 07/05/1905 | Belgique | 0-7 | Crozier | Canelle* | 65 |